L’évaluation foncière, un jeu d’enfant?
Voir la vidéo de l’équipe lauréate et des deux équipes finalistes au prix Monde municipal
Les propriétaires de Québec contribuent à estimer la valeur de leur bâtiment en remplissant un questionnaire en ligne. Une innovation qui fait épargner un temps fou à toutes les parties.
Chaque année, comme le prescrit la loi, la Ville de Québec doit produire un résumé de l’inventaire de dizaines de milliers d’immeubles sur son territoire. Jusqu’à tout récemment, l’opération nécessitait temps et déplacements. Un évaluateur visitait chaque bâtiment, puis rédigeait un rapport. Dans un contexte de manque de main-d’œuvre, l’affaire prenait des allures de casse-tête. En effet, il était difficile pour la Ville de faire l’évaluation de tous les bâtiments dans les temps requis.
Les propriétaires et résidents, pour leur part, devaient obligatoirement se rendre disponibles pour la visite de l’inspecteur même si le moment ne convenait pas à leur horaire. Certaines personnes âgées ou handicapées parmi elles devaient, en plus, faire face au stress de trouver un accompagnateur qui saurait les sécuriser et répondre aux questions pour l’occasion.
« Depuis quelques années, nous cherchions à apporter une solution qui faciliterait la vie de tous », explique Éric Racine, directeur du Service d’évaluation de la Ville de Québec. « L’idée d’une autoévaluation par le citoyen était dans notre mire. Mais la mettre en place représentait un bon défi. Les impliquer dans l’estimation de leur propriété ne s’était jamais fait au Québec.»
D’une part, l’équipe responsable devait s’assurer que les changements proposés n’enfreignaient pas la Loi sur la fiscalité municipale ni les normes de l’Ordre des évaluateurs agréés du Québec, qui encadrent l’appréciation des immeubles. D’autre part, il fallait trouver le moyen de gérer et de traiter adéquatement les nombreux renseignements à recueillir.
Simple questionnaire, calculs complexes
L’ingéniosité de la solution retenue? Elle tient à la conception d’un algorithme. Ce dernier convertit les réponses des gens, recueillies par un questionnaire simple et convivial, en données actuarielles pertinentes pour estimer la valeur des immeubles.
L’équipe a élaboré ce questionnaire, qu’on peut remplir en 20 minutes dans le confort de sa résidence, grâce au concours d’un groupe témoin de propriétaires. S’en est suivi un rigoureux processus de validation. « Nous avons constaté que faire confiance aux citoyens, c’est gagnant. Les renseignements qu’ils rapportent sont collés à la réalité », résume le directeur.
En 2020, la version papier du produit, transmise par la poste, était lancée. L’initiative tombait à point! « Nous avons pu maintenir nos activités malgré la crise sanitaire. La nouvelle s’est répandue et plusieurs grandes villes nous ont sollicités pour obtenir le questionnaire. Nous l’avons partagé sans hésiter. »
Un portail Web pour les propriétaires
Depuis 2021, la version numérique se trouve sur un portail Web pour encore plus de simplicité. Finis, les casse-têtes. Grâce à son nouveau système, qui réduit de 60 % les coûts de traitement, la Ville enregistre des économies annuelles de 1 M$. S’ajoute un gain en productivité de 300 %. « Antérieurement, le délai entre la visite d’un technicien et l’évaluation du dossier était de 70 à 180 jours. Maintenant, il se maintient entre 6 à 26 jours », détaille Éric Racine.
Le public est tout aussi avantagé, sans compter les bénéfices écologiques associés à la diminution du papier et à l’élimination des déplacements en automobile.
La portée de cette réalisation a vite franchi les frontières de la capitale. En plus de s’étendre aux quatre coins du Québec, le modèle a influencé la mise à jour des pratiques d’évaluation foncière, dont la réglementation a été revue en juin 2021.
Éric Racine et son équipe sont très fiers de leur nomination au prix Monde municipal. « Ça permet de mettre en lumière des côtés parfois méconnus de notre travail, qui entraînent des réussites. La reconnaissance est très appréciée. »
Partenaire du prix : ministère des Affaires municipales et de l’Habitation