Faire confiance, ça rapporte!
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Simplifer les procédures de renouvellement du permis de conduire pour les 75 ans et plus peut-il se traduire en gains pour la société? Deux organisations se sont unies pour le démontrer.
Jusqu’à tout récemment, les automobilistes à l’aube de leur 75e anniversaire de naissance recevaient un avis de la Société d’assurance automobile du Québec (SAAQ) les obligeant à se soumettre à des examens médical et visuel. La méthode, établie depuis au moins 30 ans, était-elle efficace? En réalité, elle engendrait stress, frais et perte de temps pour les aînés ainsi qu’une pression sur le réseau de la santé, déjà fortement sollicité. Sur les 55 000 personnes testées annuellement, moins de 1 % voyaient leur permis révoqué.
« Les limites induites par la pandémie nous ont incités de revoir cette formule, en partenariat avec le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) », explique Jean-Philippe McKenzie, vice-président à l’accès sécuritaire au réseau routier de la SAAQ. « L’ancien processus faisait écho à une idée reçue associant les conducteurs âgés à plus de danger. Or, des études démontrent qu’il n’en est rien; ces conducteurs sont sous-représentés dans les collisions de la route. »
Vérifier la santé plutôt que l’âge
En réalité, l’état de santé plutôt que l’âge doit déterminer le besoin de suivi. « En renversant une pratique discriminatoire, nous avons remplacé la présomption de risque généralisé par la confiance envers l’usager et sa responsabilisation. »
À partir de 2020, la SAAQ et le MSSS ont joint leurs efforts pour opérer cette réforme. Les travaux étaient menés par une vingtaine de personnes auxquelles se sont ajoutées quelques dizaines de collègues au fil du temps.
En 2021, le groupe a d’abord envoyé un formulaire d’autodéclaration de l’état de santé à un groupe de 1 000 conducteurs et conductrices atteignant les 75 ans. Seules les personnes présentant une condition médicale pouvant être incompatible avec la conduite sécuritaire d’un véhicule routier ont été soumises à des examens. « Les rétroactions nous ont permis de peaufiner l’outil, indique Jean-Philippe McKenzie. L’équipe a aussi constaté que les répondants transmettent des données très fiables. Il y a corrélation entre la proportion des conditions de santé qu’ils déclarent et les taux populationnels officiels. »
La méthode est dorénavant instaurée à la grandeur du Québec. Le Réseau FADOQ et diverses associations de gens à la retraite, entre autres partenaires, ont contribué à la faire connaître auprès de leurs membres. Par sa simplicité, la formule séduit notamment le public, qui aura la possibilité de remplir le questionnaire en ligne en 2023.
Allégement pour le système de santé
De fait, le projet fait passer de 55 000 à 9 000 annuellement le nombre d’individus de 75 ans devant rencontrer du personnel professionnel à des fins d’évaluation. Cette baisse se traduirait par 46 000 heures libérées dans le système de santé, donc par un meilleur accès aux soins pour la population québécoise.
À ce jour, plusieurs organisations se sont montrées intéressées par cette approche qui considère les usagers comme des partenaires. « Notre projet les inspire parce qu’il démontre que placer le client au cœur de nos actions, en lui faisant confiance, peut s’avérer très porteur. De même, il est un bel exemple des résultats obtenus lorsqu’on défait les silos pour œuvrer en équipe gouvernementale élargie. »
La nomination au prix Fonction publique constitue une preuve du chemin parcouru. « C’est une récompense encourageante, car pour mener ce projet, il a fallu remettre en question une pratique très bien ancrée, souligne Jean-Philippe McKenzie. Cela vaut la peine de sortir des sentiers battus! »
Partenaire du prix : Caisse Desjardins de l’Administration et des Services publics