Les manuels de la réussite
Une organisation montréalaise s’est livrée à un exercice de rédaction pour inspirer son personnel. Résultat : trois guides qui résument les meilleures pratiques en éducation.
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La dernière mode en pédagogie, Dominic Bertrand s’en moque! Le directeur général du Centre de services scolaire Marguerite-Bourgeoys, à Montréal, recourt uniquement aux méthodes validées par la recherche. « Il y a beaucoup de mythes en éducation, déplore-t-il. Pourtant, les pratiques gagnantes sont connues depuis 30 ans. »
Depuis 2015, le spécialiste en administration scolaire teste cette approche raisonnée dans son organisation. Son réseau de 102 écoles instruit 72 000 élèves. Parmi ces jeunes, les deux tiers parlent français comme langue seconde, et le tiers vivent en milieu défavorisé. Néanmoins, ils réussissent en pros. Près de 89 % terminent leurs études secondaires – un bond de 10 % en cinq ans. Les garçons ont 10 % plus de chances de diplômer là-bas qu’ailleurs au Québec. Les enfants en difficulté, 16 %.
La recette Bertrand, décrite en entrevue à Radio-Canada? « On est aussi sérieux en éducation que d’autres le sont en médecine. On applique des pratiques pédagogiques probantes et des stratégies de gestion efficaces pour favoriser la réussite. »
Pour concerter les 11 500 membres du personnel, une vision claire s’impose. D’où ces trois guides qui vulgarisent la bonne marche d’un centre de services scolaire, d’une école et d’une classe. En 20 pages, les priorités sont déclinées en actions assorties de manifestations concrètes, avec bibliographie scientifique. Et non, ce ne sont pas des manuels du parfait employé soufflés par le patron. « Ces documents ont été construits par et pour notre personnel. » Même que le syndicat des enseignants y a contribué!
Le Centre a d’abord produit le référentiel sur la gestion d’un établissement. Les 102 directions d’école y résument leur conception de l’éducation. Elles prônent notamment la gouverne axée sur les résultats et l’approche collaborative, mais aussi le leadership pédagogique. Elles disposent d’ailleurs d’un sondage pour vérifier comment leur personnel les évalue à cet égard.
Le deuxième référentiel examine la gestion des services. Secrétariat général, ressources humaines, informatique… Comment ces départements peuvent-ils soutenir les écoles? Partisan de l’administration allégée (lean), Dominic Bertrand pourchasse la paperasse. « La bureaucratie éloigne les directions de leur mission première, l’éducation. »
Son référentiel préféré touche l’enseignement efficace. Cosigné par une quinzaine de profs, il synthétise les meilleures pratiques du domaine. En s’appuyant sur la science, le Centre a implanté des méthodes choc. Et ça marche! La « réponse à l’intervention » facilite l’accompagnement des clientèles difficiles, libérant les orthopédagogues pour les cas lourds. Et le « soutien aux comportements positifs » a aidé une école secondaire à réduire les évictions de classe motivées par la turbulence. En un an, les sanctions ont chuté de 1 600 à 100. « Ensemble, ces petits gestes décuplent la réussite des élèves », estime celui qui prône la création d’un Institut national d’excellence en éducation.
La nomination au prix Éducation ravit l’équipe. « C’est un beau cadeau pour ces gens qui ont tant travaillé à relever le taux de diplomation », sourit Dominic Bertrand. Marguerite Bourgeoys, qui a fondé la première école de Montréal en 1658, applaudirait sûrement!
Partenaire du prix Éducation : Ministère de l’Éducation