M. Rémi Quirion a eu une riche carrière de professeur-chercheur ; il a encadré les travaux de nombreux doctorants et possède une production scientifique de haut niveau. Il a aussi été directeur scientifique de l’Institut des neurosciences, de la santé mentale et des toxicomanies (INSMT) et directeur général de la Stratégie internationale de recherche concertée sur la maladie d’Alzheimer.
Depuis 2011, il est président du conseil d’administration des Fonds de recherche du Québec et scientifique en chef du Québec. Détenteur d’un Ph.D. en pharmacologie de l’Université de Sherbrooke, il a fait évoluer les fonds de recherche et a accru leur financement.
Dans son rôle de scientifique en chef, M. Quirion conseille le ministre et le gouvernement dans plusieurs domaines prioritaires, notamment l’intelligence artificielle, les changements climatiques et la radicalisation. Il a ainsi contribué activement à de nombreux travaux d’importance pour le Québec, comme les stratégies et plans d’action en matière de recherche, d’agriculture durable et de changements climatiques ainsi que les réflexions sur l’université québécoise du futur. Il a mis sur pied le Forum Sciences et politiques pour promouvoir l’utilisation de la recherche dans l’appareil gouvernemental et par les élus. Il a créé un programme de scientifiques en résidence au sein de l’appareil public québécois et a favorisé l’émergence de scientifiques en chef dans des municipalités. Outre ses avis scientifiques aux gouvernements, il s’investit en diplomatie scientifique et dans la promotion de la science en français. Son influence dépasse largement les frontières du Québec notamment à titre de président, depuis 2021, de l’International Network for Government Science Advice (INGSA). M. Rémi Quirion a positionné le Québec comme un pôle d’excellence en recherche et en innovation.
Mme Manuelle Oudar a été active au sein de la fonction publique québécoise durant plus de trente ans, où elle a été notamment sous-ministre adjointe au ministère de l’Éducation, sous-ministre au ministère du Travail puis présidente-directrice générale de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail. Détentrice d’une maîtrise en droit de l’Université Laval, elle a contribué à plusieurs réformes au sein de la fonction publique, dont celles du Régime québécois d’assurance parentale, de la Loi sur l’équité salariale et la révision de la Charte québécoise des droits et libertés.
Mme Oudar a contribué, puis dirigé à titre de présidente-directrice générale, durant huit ans, la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST). Cette organisation est née de la fusion de trois commissions (Santé et sécurité du travail, Normes du travail et Équité salariale) et elle y a exercé un leadership rassembleur et influent, empreint d’humanisme. La CNESST a reçu, sous son leadership, de nombreux prix dont le prestigieux prix des Nations-Unies pour la fonction publique en 2022. Mme Oudar a également présidé le conseil d’administration de l’Institut de recherche en santé et sécurité du travail.
Elle a aussi reçu de nombreux prix à titre personnel et elle a été nommée parmi les 100 femmes les plus influentes au Canada, par le Réseau des femmes exécutives en 2024. Ayant constamment joué un rôle de mentor auprès des femmes et auprès de futurs leaders prometteurs, elle est sans cesse guidée par des valeurs de justice sociale et d’équité. Finalement, elle a été nommée sénatrice indépendante à Ottawa en février 2024.
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Jérémy Lebeuf est un avocat passionné de droit public et de droit contractuel. Gradué de l’Université de Sherbrooke en 2017 et de l’école du Barreau en 2018, il a rejoint les rangs du contentieux d’Hydro-Québec où il a pratiqué comme avocat pendant 4 ans. En 2020, il débute son parcours à la maîtrise en administration publique à l’ÉNAP sous le mentorat du Professeur Nicholas Jobidon. Il anticipe de publier son mémoire de maîtrise portant sur les enjeux juridiques entourant la réalisation de projets d’infrastructures publiques selon le mode traditionnel de construction, le mode de gérance et de conception-construction avant la fin de l’année 2024. D’ailleurs, son projet qui est présenté dans le cadre des Prix d’excellence met l’accent sur la saine administration et les enjeux juridiques sur les contrats publics. L’étude qui aborde les enjeux contractuels et administratifs associés à la réalisation de projets d’infrastructures publiques suivant les modes de gérance de la construction et de conception-construction, met l’accent sur les règles de droit privé et de droit public encadrant les actions de l’Administration publique lors de la mise en place d’un mode de gestion de projet de construction ainsi que les conséquences d’un tel choix
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Eriole Zita Nonki Tadida est détentrice d’un doctorat en science politique et d’une maitrise en affaires publiques/finances publiques de l’Université Laval. Sa thèse analyse le rôle des institutions supérieures de contrôle des finances publiques dans la lutte contre la corruption. Ses intérêts de recherche incluent la gestion des finances publiques, l’analyse et l’évaluation des politiques publiques, le management public et l’audit interne. Le système national d’intégrité a été développé par l’organisation non-gouvernementale Transparency International dans les années 2000. Il prône l’implication et l’interdépendance entre les institutions publiques comme solution à la corruption. Cet article identifie cinq principes permettant à une institution supérieure de contrôle (ISC) placée au centre du système national d’intégrité de remplir efficacement son rôle. Ces principes sont l’imputabilité, l’indépendance, le contrôle, la collaboration et le professionnalisme. L’information recueillie auprès de treize membres d’ISC de France, du Sénégal et du Québec révèle que, bien que des mécanismes fonctionnels et organisationnels soient mis en place, un grand travail demeure pour assurer l’indépendance des ISC. Des divergences contextuelles sont aussi relevées dans la collaboration entre les ISC et les acteurs sociaux.
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Christyne Tremblay est présidente-directrice générale de Revenu Québec depuis 2021. Au cours des 30 dernières années, elle a occupé divers postes clés ayant un impact significatif sur les citoyens et les entreprises du Québec. Elle a marqué les fonctions publiques du Québec et du Canada grâce à son expertise et sa vision stratégique. Première femme à occuper les postes de sous-ministre du Développement économique, de l’Innovation et de l’Exportation ainsi que de présidente-directrice générale de Revenu Québec, elle a un sens de l’État inné et sait mener les dossiers qui lui sont confiés avec conviction, aplomb et diplomatie.
Dès ses débuts professionnels, Mme Tremblay a participé à l’élaboration de plusieurs politiques publiques de grande importance pour la société québécoise, comme les réflexions sur le déficit zéro et la relance économique ainsi que le Sommet du Québec et de la jeunesse. En 2012, nommée sous-ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie, elle reçoit le mandat de trouver une voie de passage pour dénouer l’impasse dans les négociations qui perduraient avec la communauté étudiante; elle a su orchestrer de main de maître avec son équipe le Sommet sur l’enseignement supérieur. À l’été 2013, alors qu’elle occupait la fonction de sous-ministre des Ressources naturelles, elle a joué un rôle crucial dans la gestion de crises telles que les feux de forêt et la tragédie de Lac-Mégantic.
En 2016, elle est recrutée par le gouvernement du Canada et nommée sous-ministre des Ressources naturelles. Première femme francophone à accéder au poste de dirigeante du plus ancien ministère du Canada, elle a contribué à la négociation de dossiers importants comme la crise du bois d’œuvre et l’expansion de l’oléoduc Trans Mountain. Durant cette période au fédéral, elle a atteint les plus hauts sommets de la fonction publique canadienne, notamment en tant que sous-greffière du Conseil privé du premier ministre du Canada et sous-ministre des Affaires intergouvernementales.
Mme Tremblay est reconnue pour son leadership authentique et inspirant et l’importance qu’elle accorde à la diversité et l’inclusion. Elle soutient la relève féminine en gestion et encourage l’épanouissement professionnel de chacun. Elle a été reconnue en 2016 en tant que l’une des femmes les plus influentes au Canada dans l’administration publique et a reçu le titre de diplômée d’influence de l’École nationale d’administration publique en 2019.
Sur le plan humain, on ne peut nier que l’engagement personnel de Mme Tremblay est à la hauteur de son incroyable dévouement professionnel. Mère, conjointe, sœur et aidante naturelle de son père en perte d’autonomie, cette femme est un véritable modèle et une réelle inspiration pour les personnes qui l’entourent. Elle s’engage activement dans plusieurs initiatives sociales et bénévoles, démontrant son attachement aux valeurs d’entraide et de solidarité. Pour toutes ces raisons, la lauréate du prix Hommage 2023 incarne un modèle de leadership inspirant, mettant en avant la diversité, l’innovation et l’engagement au service des citoyens et de la société dans son ensemble.
Créé en 1987 par le chef Paul Bocuse, le Bocuse d’Or constitue la compétition culinaire la plus prestigieuse au monde. Elle fédère un réseau comptant plus de 4 000 chefs répartis dans plus de 60 pays. Le Bocuse d’Or est souvent comparé aux Jeux olympiques de la gastronomie; ses participants doivent se soumettre à un programme d’entraînement soutenu afin de pouvoir se mesurer aux meilleurs chefs de la planète.
En 2023, le Canada y était représenté par une brigade provenant entièrement de l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec (ITHQ). Composée des professeurs Samuel Sirois et Gilles Herzog ainsi que du diplômé Léandre Legault-Vigneau, l’équipe a d’abord ravi en 2022 le deuxième rang lors de la sélection des Amériques, obtenant ainsi leur laissez-passer pour la finale. Grâce à leur détermination, leur persévérance et au soutien de la communauté culinaire québécoise, canadienne et de l’ITHQ, l’équipe s’est classée au onzième rang.
La participation de l’ITHQ s’est aussi fait remarquer, en marge du Bocuse d’Or, lors de la Coupe du Monde de la Pâtisserie où a brillé le professeur Patrick Bouilly, spécialiste du sucre, accompagné notamment du coordonnateur de la formation professionnelle Daniel Garcia. L’équipe s’est hissée au 10e rang de la compétition face à 19 autres pays; elle a également remporté le Prix spécial écoresponsable. Une participation à une telle compétition d’envergure permet non seulement de développer la notoriété du Québec sur la scène internationale, mais crée aussi des possibilités de maillage avec d’autres chefs de la province ou du pays et représente une formidable expérience pour la relève. La présence de l’ITHQ dans ces événements internationaux permet de présenter la gastronomie québécoise et canadienne et de promouvoir nos produits et notre culture. La performance de l’équipe au Bocuse d’Or a permis à ce jour de générer 908 clips ou éditoriaux – totalisant plus de 257 millions d’impressions, dont 85 % proviennent de l’extérieur du Québec.
Le projet « Sécurité alimentaire : une agriculture adaptée » (SAGA) est un partenariat technique et financier novateur entre l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et le Québec. Il vise le renforcement de la planification de l’adaptation d’agriculture aux changements climatiques et il déployé dans deux pays francophones vulnérables à ces changements : le Sénégal et Haïti.
Le projet SAGA comporte 4 composantes principales : politique (développement d’outils d’appui aux politiques et intégration des pratiques SAGA dans le processus décisionnel d’adaptation climatique), société civile (mise en œuvre d’initiatives communautaires pour renforcer la résilience et l’entreprenariat agricole), recherche (génération de données et preuves scientifiques), et sensibilisation, plaidoyer et dialogue (mise en valeurs des résultats et faciliter le dialogue entre les partenaires locaux, nationaux et internationaux).
Le projet est l’une des retombées du Colloque international sur la sécurité alimentaire et la nutrition à l’heure des changements climatiques organisé par le ministère des Relations internationales et de la Francophonie (MRIF) et la FAO à Québec en 2017. Neuf partenaires québécois sont impliqués dans sa mise en œuvre : l’Union des producteurs agricoles développement international, le Carrefour international, le Centre d’étude et de coopération internationale, Solidarité Union Coopération, la Société de coopération pour le développement international, Mer et Monde, l’Université McGill, l’Université Laval et le consortium Ouranos.
Le projet a permis aux organisations partenaires de travailler en collaboration plutôt que dans un processus de compétition traditionnellement engendré par un appel à projets. Cette approche a d’ailleurs inspiré le MRIF à offrir une nouvelle programmation multiacteurs au sein de ses activités de solidarité internationale. Une seconde phase, intitulée « sécurité alimentaire : une adaptation accélérée », débutera même cet automne et jusqu’en 2026 au Sénégal, en Haïti et en Côte d’Ivoire.
En 2013, 17 centres de services scolaires (CSS) et commissions scolaires (CS) s’unissaient autour de la coopérative Éducation internationale et avec le soutien du ministère de l’Éducation afin de créer un service centralisé et unique de recrutement d’élèves internationaux en formation professionnelle: Québec métiers d’avenir. Leur but : attirer davantage d’étudiants internationaux en formation professionnelle au Québec.
Vingt ans plus tard, plus de 40 CSS/CS présentent plus de 100 programmes de formation possibles au sein de ce regroupement. Plus de 2 500 élèves venant de 30 pays ont suivi une formation professionnelle au Québec depuis la création de Québec métiers d’avenir et contribuent maintenant au rayonnement du Québec à l’international. Ces personnes apportent une richesse culturelle dans leurs salles de classe, ateliers pratiques et milieux de stage. Elles sont aussi nombreuses à travailler dans leur communauté à l’extérieur des heures de formation, puis à s’installer au Québec après afin de contribuer à son développement socio-économique. Ceux qui repartent dans leur pays d’origine emportent avec eux un savoir-faire développé au Québec à travers leur parcours de formation.
Depuis 2021, Québec métiers d’avenir connaît une croissance exponentielle en termes de visibilité et de notoriété à l’international. Cette croissance est principalement due à la mise en place d’une stratégie de communication et de promotion unique permettant ainsi de faire connaître la formation professionnelle du Québec à des milliers de personnes à l’international. Le projet communicationnel et promotionnel met à profit tous les canaux de communication disponibles entre l’organisation et son public cible et adapte son message en fonction de celui-ci. En deux ans, le nombre de visites sur le site web a augmenté de 175 %, plus de 100 événements virtuels et en présence ont été réalisés, générant maintenant plus de 200 demandes d’information par semaine.
Le projet global « Sécurité Alimentaire: une agriculture adaptée » (SAGA) vise à renforcer la planification de l’adaptation pour la sécurité alimentaire et la nutrition dans deux États francophones particulièrement vulnérables aux changements climatiques: Haïti et le Sénégal. En tant que tout premier projet FAO mis en œuvre grâce à un partenariat financier et technique avec le gouvernement du Québec, SAGA est aligné sur l’Initiative Main dans la Main de la FAO et répond à l’appel du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et de l’Accord de Paris pour des efforts de collaboration ambitieux. SAGA promeut des pratiques qui protègent la biodiversité et valorisent les services écosystémiques, et reconnaît l’importance de s’appuyer sur les connaissances traditionnelles et le rôle clé des femmes et des jeunes ruraux dans la planification de l’adaptation aux changements climatiques.
Chaque année, des milliers de patients âgés arrivent en ambulance à l’hôpital pour des problèmes de santé réels, mais non urgents. Que faire pour réduire ces transports?
Le projet de para-médecine de régulation du CISSS de la Montérégie-Centre a été mis en place avec la collaboration de la Coopérative des techniciens ambulanciers de la Montérégie (CETAM), Ambulances Demers et le Centre de communication santé. Ce projet augmente la disponibilité ambulancière pour les situations d’urgence et évite l’utilisation du plateau technique des urgences.
Dès qu’une demande au 911 venant de patients âgés de 50 ans et plus correspond aux critères et dont l’état de santé n’est pas considéré urgent, elle est transmise à la para-médecine de régulation. En 30 minutes en moyenne, un technicien ambulancier paramédical se présente au domicile de l’usager. Il apprécie l’état de santé du patient et communique avec une infirmière du soutien à domicile qui, à distance, réalise l’évaluation de l’usager. Selon l’évaluation clinique, l’infirmière proposera un rendez-vous au patient dans une clinique ou une visite de l’infirmière du soutien à domicile. En cas de doute, l’infirmière peut consulter un médecin. Tous les usagers bénéficient d’un suivi d’une infirmière dans les 24 heures suivant la visite.
Des ambulanciers ont reçu une formation de 60 heures pour les outiller afin de développer une acuité dans l’appréciation de la condition d’un usager qui ne nécessite pas des services urgents. Les infirmières du soutien à domicile ont appris de leur côté faire des évaluations à distance. Quelque 84 indicateurs de suivi ont été mis en place afin d’assurer que le service répond aux besoins pour lesquels il a été créé, qu’il est sécuritaire, performant, apprécié et pertinent du point de vue des coûts-bénéfices.
De janvier 2020 à mars 2023, 4 528 personnes ont reçu ce service. Dans 63 % des cas, tous les soins ont été offerts en évitant le recours à l’urgence. Et le taux de satisfaction des usagers est de 96 %!
Le tout nouveau Centre intégré de cancérologie (CIC) du CHU de Québec-Université Laval est la première composante du nouveau complexe hospitalier du site de l’Hôpital de l’Enfant-Jésus. Ce Centre est un véritable environnement guérissant, qui a été pensé pour et par le patient. On y retrouve des activités de radio-oncologie, curiethérapie, chimiothérapie et la majorité des cliniques externes en cancérologie, ainsi que des activités d’enseignement et de recherche.
Du personnel et des patients ont participé à des ateliers de cocréation afin d’améliorer l’organisation du travail avant même de concevoir les plans. Construit sous le principe de la démarche Lean design, la conception a été guidée par les principes de l’architecture de guérison, qui signifie que l’espace a une influence sur la récupération ainsi que le bien-être physique et psychologique des patients et des intervenants. Ce sont d’ailleurs les 4 éléments – terre, eau, air et feu – qui ont guidé le choix des couleurs et des matériaux de l’aménagement intérieur, très lumineux.
Dès leur entrée au CIC, les patients sont invités à s’enregistrer sur des bornes d’accueil numérique. Ils reçoivent ensuite une liste des différents lieux et heures où ils sont attendus. Les cliniques externes ont été regroupées par clientèles plutôt que par spécialité, ce qui entraîne une proximité des équipes de soins, favorise la concertation et l’interdisciplinarité de l’ensemble des professionnels. Ce fonctionnement amène une diminution du nombre de visites pour le patient, qui peut rencontrer plusieurs intervenants dans la même journée. Un centre de prélèvements spécifique pour cette clientèle a aussi été créé. Puisque la clientèle est principalement ambulatoire, un service d’intervention rapide en oncologie a été mis en place, afin d’éviter aux patients une visite à l’urgence entre les soins. Avec l’augmentation et la mise à jour des plateaux techniques, le CIC permettra d’offrir 6 000 traitements d’hémato-oncologie et 39 000 consultations en oncologie de plus par année et accueillera près de 3 500 patients pour des traitements en radio-oncologie.
Le cancer colorectal est le quatrième diagnostic de cancer le plus fréquent au Canada. Chaque année, environ 6 800 Québécois en sont atteints. La chirurgie demeure le principal traitement curatif. Traditionnellement, les patients demeuraient à l’hôpital pendant 5 à 7 jours, mais les progrès en matière de soins périopératoires et de techniques de chirurgie peu invasive ont permis de réduire la durée du séjour moyen à 3 jours. Plus de deux tiers de ces patients ne présentent pas de complications et restent hospitalisés en attendant le retour de la fonction intestinale et/ou un contrôle adéquat de la douleur, des critères jugés à ce jour essentiels pour le congé.
C’est dans cette optique que le Centre universitaire de santé McGill a mis en place un parcours de chirurgie d’un jour (CDJ). Il comprend deux parties : une optimisation du parcours périopératoire et un suivi numérique à distance. Un téléphone intelligent est prêté au patient et contient tout le matériel éducatif pertinent, un questionnaire de contrôle quotidien de la santé et une fonction de communication patient-médecin. Cette intervention de santé numérique réduit de manière significative le nombre de visites inutiles aux urgences et améliore la satisfaction du patient et son sentiment de sécurité.
Depuis le premier patient opéré en janvier 2020, le CUSM a réalisé plus de 200 interventions chirurgicales sur le côlon. Plus de 85 % des patients sont sortis le jour de l’intervention, sans visite imprévue aux urgences. Une analyse économique du parcours CDJ indique une économie de 3 500 $ par rapport à une hospitalisation standard. Le parcours raccourci peut également aider à fournir des soins en temps opportun et libérer des lits plus rapidement. À ce jour, le CUSM a partagé son protocole avec trois autres grands établissements de santé du Québec. Bonne nouvelle, d’autres procédures avec des hospitalisations courtes et planifiées ont un potentiel de CDJ, comme l’hystérectomie et les procédures bariatriques.
Le règlement d’une succession après le décès d’un proche est complexe. Bien souvent, la personne désignée comme liquidateur a peu de connaissances des différentes étapes ainsi qu’en fiscalité. De plus, elle doit assurer ce rôle même si le moment pour le faire n’est pas l’idéal pour elle. Pour soutenir ces personnes, Revenu Québec a pris l’initiative de simplifier leur parcours. Les processus ont donc été revus afin de les accompagner dans leurs démarches, les informer des délais et des obligations, limiter les preuves à fournir et diminuer les délais de traitement des documents.
Pour mettre en place ce parcours, l’organisation a consulté des liquidateurs de succession issus de son propre personnel. Cette méthode de consultation innovante, peu coûteuse et efficiente en matière de temps, a permis d’élaborer des solutions répondant réellement à la clientèle. De plus, plusieurs partenaires externes comme des comptables et des notaires ont été consultés afin de bonifier la compréhension des enjeux vécus par les liquidateurs de succession.
Un aide-mémoire a été conçu pour rappeler les étapes clés du parcours. En 2023, plus de 70 000 personnes ont reçu ce document, qui est aussi disponible en ligne. Tous les documents et formulaires ont été regroupés dans une même section du site web. Lorsque le liquidateur s’inscrit, il reçoit automatiquement un rappel des échéances de même qu’une confirmation de la réception des documents obligatoires à transmettre.
Plusieurs étapes se font maintenant automatiquement. Par exemple, la preuve de décès n’a plus à être transmise par le liquidateur, car c’est le Directeur de l’état civil qui en a la charge et le crédit d’impôt pour solidarité est automatiquement transféré au conjoint survivant. Depuis cette simplification, le personnel de Revenu Québec a constaté une diminution de 46 % du nombre de documents manquants lors de l’inscription d’un liquidateur de succession, ce qui signifie que les liquidateurs comprennent mieux la démarche. Ils peuvent ainsi la compléter plus rapidement et y consacrer moins de leur temps.
Au Québec, la collecte de données sur les décès s’effectuait depuis 100 ans à partir d’un bulletin papier, le formulaire SP-3. L’objectif principal du projet était de mettre en place un système qui permette la saisie informatique de ces renseignements à travers la province. Le bulletin de décès est devenu le premier document à être intégré au Système d’information des événements démographiques (SIED). Pour ce faire, il a fallu tenir compte des particularités liées aux habitudes et aux usages insoupçonnés ayant modelé divers processus dans le réseau depuis longtemps.
Le SIED permet aux auteurs de certificats médicaux de décès et aux directeurs de funérailles de remplir électroniquement les bulletins de décès. Le système transmet automatiquement les informations pertinentes à l’Institut de la statistique du Québec (ISQ) et au Directeur de l’état civil (DEC). Cette transition numérique a grandement accéléré le processus et évite la double saisie et les risques d’erreurs, réduisant le délai moyen entre le décès et son enregistrement à environ 4 jours, par rapport aux 18 jours précédents.
L’information concernant le don d’organes et de tissus humains pour la transplantation et la recherche est de plus intégrée au système. Plusieurs organismes souhaitent connaître, en temps réel ou a posteriori, les décès survenant au Québec. L’utilisation du SIED, en tenant compte des mandats des organisations et de la légitimité d’y avoir accès, améliore la communication auprès de ces organismes. L’information du bulletin pourra se déployer à d’autres services. Outre les médecins, il existe de multiples personnes (agent administratif, infirmière, archiviste, etc.) dans le réseau sociosanitaire qui sont impliquées dans le processus de gestion des décès. Le déploiement du SIED est l’occasion de réviser des processus établis et de les ajuster en tenant compte des technologies de l’information. Le système a également été conçu en prévision de la collecte des données sur les naissances et les mortinaissances qui forment, avec celles des décès, le registre des événements démographiques.
Il y a deux ans, le personnel clinique CIUSSS de l’Estrie-CHU de Sherbrooke (CIUSSSE) passait jusqu’à 80 % de son temps à gérer les horaires plutôt que de donner des soins. Avec AgiliT, les employés se retrouvent maintenant au cœur du processus de confection des horaires.
En dépit de la complexité du projet associée notamment à sa transversalité, aux particularités de chaque secteur, de la nature continue des soins et services (24/7), au manque de modernité des outils informatiques, aux contraintes des conventions collectives, aux opinions divergentes des partenaires syndicaux et aux limites budgétaires, le CIUSSSE souhaitait implanter rapidement et largement la nouvelle solution, alors qu’habituellement on procède par petits groupes.
Le processus initial ne permettait pas de faire des demandes concernant l’horaire de la maison, ce qui est maintenant possible. Et plutôt que de recevoir une réponse à la sortie de l’horaire seulement, sans possibilité d’offrir des alternatives et sans explication, les employés peuvent donner leurs disponibilités directement en fonction des besoins de l’unité, de l’horaire des collègues et de leurs propres besoins.
Pour l’été 2023, 5224 employés cliniques de plus de 100 centres d’activités confectionnent leur propre horaire de travail. Avec AgiliT, plus de 130 000 heures de volontariat additionnel par année sont offertes par les employés. Le taux de temps supplémentaire obligatoire est 20 % plus bas qu’ailleurs au Québec et on observe une réduction des absences de dernière minute de 17 %. Ce qui différencie réellement le projet du CIUSSSE en matière d’autogestion des horaires est la capacité d’ajustement du projet. De nombreux moyens ont été prévus pour s’assurer d’obtenir une vision 360 des obstacles et une rapidité de réaction. Plusieurs moyens ont été mis en place pour sonder le personnel et des rencontres avec un groupe de référence constitué d’employés des différents secteurs pilotes ainsi que des représentants des parties syndicales sont prévues pour et permettre d’apporter les modifications requises.
Marc-Antoine Parent est chef du service Fournisseurs hors Québec à Revenu Québec. Détenteur d’un baccalauréat en administration des affaires, il a démontré, depuis son arrivée à Revenu Québec en 2012, sa volonté de promouvoir l’évolution de la fiscalité, notamment dans le domaine de l’économie numérique. Après avoir gravi les échelons, il s’est vu confier, en décembre 2022, la responsabilité d’un nouveau service regroupant une équipe multidisciplinaire composée de 13 professionnels, dont des vérificateurs et des analystes en informatique.
Sa contribution a entre autres été cruciale dans le développement d’une expertise en cryptomonnaie au sein de l’organisation. En autodidacte, il a suivi des séminaires mondiaux en ligne pour perfectionner ses compétences. Sa maîtrise de ce domaine l’a rendu essentiel dans l’élaboration de nouvelles approches de vérification et dans l’intégration de questions relatives à la cryptomonnaie dans les formulaires de déclaration de revenus.
En 2019, Marc-Antoine a pris l’initiative de participer, avec les membres de l’équipe du commerce électronique, à une simulation dans le portail d’Europol (Agence européenne de police criminelle), en collaboration avec Interpol, dans le cadre d’un concours international. Au terme de la simulation, son équipe a terminé au 9e rang mondial sur les 155 équipes participantes.
Marc-Antoine a également démontré son ingéniosité et ses grandes connaissances en informatique en concevant un système de suivi des remises de taxes. Cet outil, désormais utilisé par plusieurs directions de Revenu Québec, permet la production de statistiques pour le suivi du Plan d’action pour assurer l’équité fiscale et pour le rapport annuel de gestion de Revenu Québec.
Ses compétences ne se limitent pas à la sphère technique. M. Parent s’est distingué en organisant des semaines thématiques et en créant des capsules vidéo pour partager l’expertise en commerce électronique au sein de l’organisation. Il a également joué un rôle essentiel dans la planification de la reprise des activités de vérification fiscale pendant la pandémie, démontrant ainsi sa capacité à s’adapter aux défis. Sa passion, son engagement et son leadership font de Marc-Antoine un atout inestimable pour Revenu Québec. Il a su développer une expertise pointue, contribuer à des projets novateurs et inspirer ses collègues. Sa nomination pour le prix Relève d’excellence témoigne de sa capacité à aller encore plus loin dans sa carrière et de son rôle essentiel au sein de l’administration publique québécoise.
Mathieu Laporte est coordonnateur du Square de Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ). Designer de formation, il est détenteur d’un baccalauréat en science politique et une maîtrise en droit international. Mathieu incarne tout à fait le changement de vocation des bibliothèques publiques, qui ont évolué d’espaces réservés aux érudits vers des lieux ouverts au grand public, encouragé à explorer, apprendre et interagir.
À son arrivée en 2018, Mathieu a dirigé le développement du laboratoire de création en art médiatique et de l’atelier de fabrication numérique de BAnQ, élargissant la gamme de services offerts. L’espace technologique mis à disposition du public permet la fabrication d’objets variés grâce à des machines-outils modernes, créant une expérience d’apprentissage et d’innovation. Il a réorganisé la philosophie d’accueil, passant de la simple mise à disposition de l’équipement à un accompagnement personnalisé pour aider les utilisateurs à concrétiser leurs projets.
Le coordonnateur s’est engagé dans l’inclusion en organisant des ateliers adaptés pour les personnes non voyantes et sourdes afin d’évaluer l’accessibilité des équipements. L’objectif est double, renforçant l’engagement de BAnQ en faveur de l’inclusion. Dans une logique de design centré sur l’humain, l’équipe de Mathieu évalue également comment les équipements disponibles pourraient permettre de créer et de fabriquer des outils capables de faciliter le quotidien de ces personnes. Séduite par le potentiel du service, la direction de l’institution propose d’en étendre la portée à l’ensemble de l’organisation.
En tant qu’ambassadeur des laboratoires de fabrication collaborative, Mathieu a étendu l’influence de BAnQ au sein de la coopérative de solidarité Fab Labs Québec, contribuant à l’image innovante des institutions publiques. Il a également participé à des événements nationaux et internationaux en tant que conférencier, mettant en lumière les succès de BAnQ.
Le leadership de Mathieu a permis d’élargir l’offre de services de BAnQ, touchant une population souvent moins représentée dans les institutions culturelles. Son approche créatrice a enrichi l’accès à la culture et au patrimoine québécois, préparant les citoyens aux défis d’une société en évolution. La contribution de Mathieu dépasse largement le cadre de BAnQ et mérite d’être saluée pour son impact positif sur la promotion de l’apprentissage, de l’innovation et de l’inclusion au sein des bibliothèques publiques. Sa nomination au prix Relève d’excellence témoigne de son enthousiasme communicatif qui a pavé la voie à la planification de divers projets d’innovation au sein de BanQ.
Présidente-directrice générale adjointe du CISSS du Bas-Saint-Laurent, Claudie Deschênes était, au moment du dépôt de sa candidature aux Prix d’excellence de l’administration publique du Québec 2023, directrice des programmes santé mentale et dépendance de ce même CISSS.
Son parcours professionnel a débuté en tant que préposée aux bénéficiaires au début des années 2000, puis elle a travaillé en tant qu’infirmière pendant près de 10 ans. Elle a rapidement évolué vers un poste de gestionnaire clinique au CSSS de la Matapédia. Lors de la création du CISSS du Bas-Saint-Laurent en 2015, elle a été nommée directrice adjointe de la direction des programmes santé mentale et dépendance pour ensuite en devenir la directrice en 2018.
Claudie a su démontrer ses compétences de leader en supervisant des projets transversaux, dont la consolidation de l’Accueil-Analyse-Orientation-Référence pour simplifier l’accès aux services sociaux et psychologiques de la région. Elle a également initié le guichet d’accès intégré en santé mentale et dépendance, améliorant l’accès aux services pour la population locale. Elle a aussi joué un rôle majeur dans la création du guichet intégré jeunesse en partenariat avec d’autres directions.
Son leadership est remarquable, s’appuyant sur la collaboration et la mobilisation des équipes. Membre active du comité de direction, elle contribue au positionnement stratégique de l’organisation et s’est formée en coaching pour accompagner les personnes dans le besoin. D’un naturel bienveillant et doté d’un altruisme hors du commun, elle se positionne en alliée en étant à l’écoute et en sachant proposer des stratégies de soutien élaborées en co-construction.
Elle est également engagée dans sa communauté, en tant que répondante d’installations pour la MRC de la Matapédia et en s’impliquant sur le terrain. Elle sait faire preuve de leadership lors de situations exceptionnelles, comme la tragédie du printemps 2023 à Amqui. Elle incarne comment les ressources de proximité peuvent avoir un impact sur le bien-être populationnel en situation de crise quand elles sont soutenues par une leader efficace.
Son intégrité, son courage managérial et son leadership collaboratif ont fait d’elle une chef d’orchestre efficace qui motive et mobilise ses équipes pour atteindre des objectifs communs. Sa personnalité pétillante et accessible en fait une gestionnaire appréciée de tous. Sa nomination au prix Relève d’excellence témoigne de ses qualités humaines et de son influence positive à l’amélioration des soins de santé en région.
Pour les cols bleus municipaux, devoir consulter ou remplir des rapports papier au vent et à la pluie n’est pas toujours une sinécure, sans compter que cela écourte le temps passé sur le chantier. C’est pourquoi la Ville de Trois-Rivières a mis en place Requêtes mobiles, une application web de gestion des requêtes citoyennes, des tâches internes et de l’entretien. Elle permet aux cols bleus d’avoir accès via leur cellulaire ou tablette à toute l’information liée à leurs tâches en tout temps. De son côté, le contremaître et le planificateur reçoivent aussi en temps réel les avancements des tâches de leurs équipes. Plus de 300 employés l’utilisent, permettant d’accomplir plus de 35 000 tâches chaque année.
L’utilisation de Requêtes mobiles a contribué à augmenter de 5,6 % le respect des délais de service entre 2021 et 2022 pour une charge de travail équivalente. L’application a aussi permis de diminuer les erreurs, les délais du traitement de la donnée et l’utilisation du papier. La double saisie des informations terrain par des techniciens au retour des cols bleus à la fin de la journée est également éliminée, ce qui représente des gains de temps de plusieurs heures par semaine pour chacun.
Les données récoltées sur le terrain alimentent directement un entrepôt de données sur lequel se basent de nombreux indicateurs de gestion consultés quotidiennement par les membres de la direction, ce qui leur permet d’obtenir des données à jour de façon autonome. Un module pour les élus municipaux, anonymisé en respect de la Loi 25 sur la protection des renseignements personnels, est également disponible. Trois-Rivières rend le code source disponible gratuitement à toute autre organisation municipale. Sa structure basée sur un web service permettrait à une équipe de développement tierce de l’intégrer à un autre système déjà existant de gestion des tâches auquel une partie terrain serait manquante.
Aménager ou réaménager nos villes vient avec son lot de conséquences : rues entravées ou fermées, coupures d’eau ou d’électricité, modification des trajets de transport en commun ou à l’horaire de cueillette des matières résiduelles, pour ne nommer que celles-ci. Même si les travaux sont planifiés, et malgré des efforts de communication et de diffusion, les citoyens et les commerces écopent parfois.
Préoccupée et sensible aux multiples problèmes soulevés, la Ville de Québec a d’abord mis en place en 2020 un projet-pilote consistant à déployer une équipe dédiée à l’accompagnement des citoyens et des commerçants sur deux chantiers majeurs. Le Bureau Info-Chantier invitait les gens à venir en apprendre davantage sur les travaux et recueillait leurs besoins et attentes. Malgré des retombées importantes et des commentaires positifs, l’expérience a démontré que ce modèle ne permettait pas de rejoindre l’ensemble des clientèles touchées par les chantiers.
À l’été 2022, la Ville a déployé une brigade mobile d’agents de service à la clientèle. Agile et réactive, cette brigade se rend chez les citoyens, sur leur lieu de travail et aux abords des chantiers pour observer et discuter de leurs préoccupations. Cette façon de faire permet de joindre un plus grand nombre de citoyens, dont les clientèles à mobilité réduite. La formule réduit également le temps de déplacement des citoyens et évite aux entrepreneurs de fermer leur commerce. De plus, le projet représente des économies importantes en ressources matérielles et en coûts d’opération puisqu’on évite la location et l’aménagement de locaux. En 2022, pour plus de 12 000 portes touchées par un chantier, les agents Info-Chantier ont mené près de 4 000 interactions avec les citoyens, dont la moitié de façon proactive. Des 2 000 demandes citoyennes, seulement 0,25 % d’entre elles se sont avérées être des plaintes. La formule est maintenant rodée : à l’été 2023, plus de 40 chantiers sont ainsi suivis!
Dans le cadre de leur travail, les pompiers et pompières peuvent développer neuf types de cancer. Il s’agit de la plus importante cause de décès chez ces professionnels.
À leur arrivée sur la scène d’un incendie maîtrisé, les enquêteurs et enquêtrices du service de protection contre les incendies de chaque municipalité amorcent leur mission : déterminer les causes du drame. Soulevant les débris, se faufilant derrière les structures, marchant sur un sol accidenté, ces personnes doivent être mobiles et agiles. L’équipement de protection respiratoire utilisé est lourd et contraignant; il pèse plus de 10 kg et occasionne parfois des blessures musculosquelettiques. Puisque le feu est éteint, le personnel préfère parfois le retirer. Mais les risques pour la santé sont présents, car des contaminants demeurent dans l’air plusieurs jours après un incendie.
Le projet mis de l’avant par le Service de protection contre les incendies de la Ville de Sherbrooke consiste à documenter l’efficacité du masque à cartouche. Avec le soutien de l’Association paritaire pour la santé et la sécurité du travail et du CIUSSS de l’Estrie – CHUS, un projet pilote a été mis de l’avant en 2022. Pour déterminer quel appareil l’enquêteur ou l’enquêtrice doit enfiler avant d’amorcer son travail, on a mis en place un arbre décisionnel. Ce protocole permet de bien sélectionner le type de protection : depuis combien de temps le feu est-il éteint? Des gaz ont-ils été détectés? Des tests avec divers combustibles ont été réalisés dans une maison laboratoire et des prélèvements ont été faits chez les pompiers pour valider l’efficience du nouveau matériel sur la santé. En attente d’une validation formelle faite par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité au travail, le projet constitue une innovation dont tous les corps de pompiers ainsi que les équipes d’enquête des services de police de la province pourront éventuellement bénéficier.
La Ville de Terrebonne a entamé, en 2021, une opération d’envergure permettant de collecter des données géospatiales en trois dimensions sur les infrastructures comprises dans l’emprise de rue à l’aide d’une technologie de cartographie mobile. Un projet global qui a permis de mettre à jour, de bonifier et de cartographier l’inventaire de plus de 50 000 actifs en eau, mobilier urbain, éclairage et signalisation.
Les données en 3D sont au cœur des activités des travaux publics et du génie aujourd’hui. Elles alimentent des applications mobiles et des tableaux de bord. En plus de permettre d’atteindre et de maintenir un haut niveau de connaissance du territoire, les données servent également à faciliter et à accroître l’efficacité des opérations de la Ville et à renforcer les pratiques de gestion des actifs. Certains employés municipaux qui travaillent sur le terrain sont désormais équipés d’une tablette électronique, ce qui leur permet d’exécuter une panoplie de tâches auparavant faites en remplissant des formulaires papier.
Le projet a permis de partager et de réutiliser des données et ainsi réduire la prolifération des doublons. Par exemple, trois inventaires des bornes d’incendie existaient à la Ville. Bien que l’on parle de la même borne d’incendie, chaque direction la représentait différemment dans ses unités d’affaires, créant ainsi autant de versions différentes du même actif. Le projet a été déployé en tenant compte des conseils et des demandes de modifications du personnel de la Ville et des partenaires externes, ce qui a facilité par la suite son adoption. Les processus mis en place ont permis de renforcer la collaboration interservices en améliorant la rapidité et la fluidité de circulation des données, qui sont utilisées dans d’autres projets. Entre autres, les accès aux réseaux souterrains d’eau potable et d’égout, comme les vannes, les regards et les puisards, servent actuellement de référence pour la mise à jour et pour compléter le plan général d’eau de la municipalité
La pandémie a forcé toutes les organisations à revoir leurs pratiques. Pour l’Institut national de psychiatrie légale Philippe-Pinel, un hôpital universitaire offrant des services surspécialisés en psychiatrie légale, cela signifiait entre autres que ses psychiatres légistes ne pouvaient plus se déplacer dans les établissements de détention pour répondre aux demandes d’évaluations ordonnées par les tribunaux. De plus, le transport des détenus vers l’Institut était retardé ou même impossible. L’organisation devait donc trouver un moyen de maintenir ses services d’évaluations médicolégales et de traitements accessibles à l’ensemble du territoire de la province, tant pour la clientèle détenue que celle en liberté, et ce, de manière virtuelle.
Le programme de télésanté a permis à l’Institut d’augmenter sa capacité à répondre aux demandes ordonnées par les tribunaux dans les délais légaux prescrits. Et la clientèle ambulatoire peut maintenant recevoir les soins et services appropriés à distance.
La télé-comparution représentait un défi étant donné leur nombre important et le caractère imprévisible de ces rencontres. L’Institut ne possédait que trois salles sécuritaires, qui ne suffisaient plus à la demande, qui a d’ailleurs quintuplé depuis la pandémie. C’est sans compter le manque de personnel formé pour accompagner les patients dans ces salles. En déployant des tablettes dans les unités de soins, les patients peuvent maintenant comparaître directement de celles-ci, dans un environnement adapté et sécuritaire. Ils peuvent également communiquer plus régulièrement avec leurs proches. Le programme a également permis d’accélérer la mise en place de soins et d’examens physiques à distance pour ces personnes. Plus de 600 employés de l’Institut et plus de 2200 employés des partenaires ont été formés aux nouvelles procédures, qui ont nécessité l’arrimage de diverses technologies. Le programme de télésanté a été géré dans une structure de collaboration multidisciplinaire, intersectorielle et multi-établissements qui a demandé une grande coordination entre les divers services de l’Institut et le système carcéral, le système judiciaire et les organismes communautaires.
Les problèmes de violence conjugale sont un enjeu de société et ils ont des impacts sur la vie professionnelle. En octobre 2021, la Loi sur la santé et la sécurité du travail était modifiée afin d’inclure la protection du travailleur lors de situations de violence physique ou psychologique, incluant la violence conjugale, familiale ou à caractère sexuel au travail.
Le lieu de travail est souvent le seul endroit où les victimes de violence conjugale peuvent échapper à leur partenaire. Par ailleurs, pouvoir garder son autonomie financière et donc son emploi, est essentiel pour les victimes.
En préparant sa politique, la Ville de Saint-Jean-sur-Richelieu constate que plusieurs études démontrent que la violence conjugale se poursuit en milieu de travail, passé le seuil de la maison. Cette politique devient alors bien plus qu’une obligation, et avoir le pouvoir de changer la vie de quelqu’un.
Des séances d’information sont mises en place pour tous les employés, des ambassadeurs sont formés dans les différents services, un plan de sécurité pour les victimes et leurs collègues est créé et une ligne de signalement anonyme accessible 24 heures par jour, incluant un soutien d’urgence allant jusqu’au paiement de certains frais afin de sortir la victime et sa famille d’une situation dangereuse, sont instaurés. Les personnes sont accompagnées de façon confidentielle et sécuritaire lors d’un signalement d’actes répréhensibles, de harcèlement, de violence conjugale ou de toutes situations pouvant être considérées comme inappropriées. La Ville souhaite avec ce programme que les mesures de sensibilisation bénéficient à tout le personnel et, pour les victimes vivant une telle situation, que d’évoluer dans un milieu de travail sensibilisé facilitera la dénonciation et, qui sait, sauvera peut-être une vie.
Le CISSS de la Montérégie-Est a mis en place en 2021 une approche de santé globale pour répondre aux défis liés aux absences, aux invalidités et aux départs au sein de l’organisation. Cette approche vise à promouvoir un climat de travail positif et favoriser la santé globale des employés.
L’approche repose sur cinq piliers d’équilibre : attention aux heures, période de déconnexion, respect pause-santé, télétravail et réduction des réunions ainsi que cinq pratiques : vigilance maladie, gestion des absences, prévention de la morosité, emphase considération et maintien de l’équilibre. L’originalité de l’approche vient également de l’alignement des quatre composantes de la santé soit la santé physique, psychologique, intellectuelle et organisationnelle.
Le développement du leadership en santé des gestionnaires a été encouragé et des ambassadeurs santé ont été formés pour promouvoir ces pratiques au sein de chaque installation. L’engagement de la haute direction a été essentiel et le PDG y est fortement investi lui-même. Dès l’embauche, les nouveaux gestionnaires sont formés à cette approche.
Cette démarche est d’abord et avant tout une approche de leadership en santé. Le but n’est pas de déployer des interventions isolées, mais bien que la méthode soit en constante évolution et se fasse ressentir à la grandeur du CISSS. De plus, la réalité complètement différente du personnel administratif versus clinique a été prise en compte. Des initiatives et services couvrant tous les quarts de travail ont été mis en place. Le respect des mesures, bien que variable, vise surtout à légitimer les gestionnaires à prendre des temps d’arrêt. Le défi est de déconstruire la culture du nombre d’heures de travail comme un déterminant de la performance individuelle et organisationnelle en plus de l’intensification de la charge de travail liée à la pénurie de personnel et à la pandémie. Le taux d’adhésion varie entre 80 % et 90 % après une démarche accompagnée et le taux de satisfaction était de 94 % en 2022.
Dans un hôpital, aucun quart de travail ne peut être laissé vacant, car les soins aux patients peuvent être compromis. Lorsque Sylvie Aumond, une infirmière clinicienne, devient chef de service de l’urgence et des soins intensifs à l’hôpital de Rouyn-Noranda en 2020, elle constate que tous les employés font des heures supplémentaires, parfois de façon obligatoire. Il y a neuf employés d’agence et certains quarts de travail manquent d’expertise. Elle doit elle-même faire des quarts de nuit en plus d’exercer son rôle de gestionnaire le jour.
Plutôt que de laisser la gestion des horaires à un service qui ne connaît pas les besoins et les contraintes du personnel, elle a remis cette responsabilité aux personnes concernées. Elle s’est enquise de leurs préférences et ils ont organisé les horaires autour des besoins de l’unité. Peu à peu, les employés se sont vus octroyer un horaire qui facilite la conciliation avec leur vie personnelle. Un moyen de communication a été déterminé pour gérer les demandes de dernière minute et éliminer les nombreux appels. En écoutant ses employés et leurs besoins, ceux-ci sont maintenant beaucoup plus volontaires lorsque des quarts de dernière minute sont affichés.
Les retombées du projet sont significatives. Le recours aux employés d’agence n’est plus nécessaire, le nombre d’heures supplémentaires a chuté de 25 % à 5 % et il n’y a plus de temps supplémentaire obligatoire. Quant au taux de roulement du personnel, il est passé de 9 % à 1,8 %. Le temps disponible pour la formation a considérablement augmenté, garantissant une meilleure expertise et des soins de qualité. Un sondage montre que 98 % des employés estiment que l’autogestion de leurs horaires améliore leur bien-être et la qualité des soins; personne ne voudrait revenir en arrière. Ce projet met l’accent sur les valeurs humaines et l’autonomie des équipes. Le CISSS de l’Abitibi-Témiscamingue a choisi d’exporter le projet dans toutes les unités 24/7 des hôpitaux de la région et a comme objectif d’implanter ce mode de gestion dans tous ses établissements d’ici 2025.
Pour renverser la tendance de quelques 80 ministères et organismes à vouloir se distinguer entre eux en valorisant leurs propres emplois, la conception d’une marque employeur forte et concertée est apparue comme une solution indispensable contre cette cannibalisation et pour la promotion d’une fonction publique moderne, dynamique et unifiée. La nouvelle marque employeur place au premier plan ce que la fonction publique offre d’unique à son personnel : la possibilité de s’épanouir en contribuant à des mandats porteurs et significatifs pour l’ensemble de la société québécoise.
Cette réalisation est ponctuée de choix audacieux. Sa force réside dans son objectif d’offrir aux ministères et organismes une marque adaptable qui permet à ces derniers d’exprimer leur caractère distinctif et leur valeur ajoutée, et ce, tout en bénéficiant du poids et de la visibilité du groupe. Pour y parvenir, la marque employeur offre une approche innovante, basée sur des systèmes flexibles.
Plutôt que d’imposer une marque employeur figée, l’équipe de conception a décidé d’y incorporer les bonnes pratiques existantes dans chaque organisation. En permettant à celles-ci de garder ses acquis, tout en profitant des bonnes pratiques mises en place chez les autres, l’équipe a su valoriser le travail réalisé auparavant. Avec cette nouvelle marque, le personnel de l’État peut maintenant s’approprier le discours afin d’exprimer aisément la valeur de son apport à la société et combattre les préjugés à son égard. Cela a une incidence majeure sur le sentiment de fierté et d’appartenance, ainsi que sur la rétention du personnel.
Les guichets d’accès à la première ligne (GAP) ont pour mission de permettre aux personnes sans médecin de famille d’obtenir un service de santé adapté à leurs besoins, incluant l’accès à un rendez-vous médical quand cela s’avère nécessaire.
Un premier GAP a vu le jour au Bas-St-Laurent en 2020. Il est né d’un besoin que les médecins voyaient des patients qui auraient pu consulter un autre professionnel de la santé, et ainsi libérer ces mêmes plages pour des patients devant vraiment être vus par un médecin.
Devant le succès rencontré par le modèle, deux projets pilotes ont été réalisés à l’automne 2021 en Montérégie et au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Ce fut le coup d’envoi pour un déploiement provincial. Des GAP sont maintenant présents et pleinement opérationnels dans toutes les régions du Québec et facilement accessibles par le numéro de téléphone 811 ou encore une plateforme web.
Lorsqu’un citoyen contacte le GAP, sa demande est analysée et il est orienté vers le service professionnel ou médical qui répond le mieux à son besoin, parfois même des services inconnus du patient. Le citoyen peut alors avoir accès à une consultation médicale, être orienté vers son pharmacien ou être dirigé vers un programme-service du CISSS ou du CIUSSS de son territoire.
Les GAP offrent une réponse quotidienne aux demandes des patients orphelins. Au cours de l’année 2022-2023, les guichets ont traité près de 660 000 demandes et ont octroyé 325 000 rendez-vous auprès d’un médecin de famille. Des patients ont été dirigés vers un autre professionnel dans environ 120 000 cas. De plus, 190 000 appels ont pu être réglés par le personnel du GAP, sans qu’aucune référence ne soit nécessaire. La pénurie de main-d’œuvre force à revoir les façons de travailler et la manière d’utiliser les ressources et les services. Dans ce contexte, le modèle des GAP favorise, par l’évaluation du besoin et l’orientation en pertinence, une utilisation plus judicieuse des ressources en santé. En orientant les patients vers les services les plus pertinents, tout le réseau y gagne en efficacité!
Dès le lendemain de l’invasion de l’Ukraine par la Russie le 24 février 2022, le ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration (MIFI) tenait sa première cellule de coordination ministérielle pour se préparer à recevoir adéquatement les Ukrainiens voulant se réfugier au Québec. Le Ministère a travaillé en étroite collaboration avec une vingtaine de partenaires gouvernementaux, municipaux et communautaires pour coordonner la mise en place d’un système agile et cohérent afin d’offrir un accueil digne et sécuritaire à ces personnes. Depuis le début de cette guerre, le Québec a accueilli plus de 11 000 personnes ressortissantes ukrainiennes.
La complexité de l’intervention résidait dans l’urgence de la situation, le nombre élevé de personnes à accueillir sur une courte période et le fait qu’elles arrivaient au Québec avec un statut temporaire de visiteur qui ne donnait accès à aucun service et programme gouvernementaux. Le MIFI a donc misé sur l’intelligence collective, la flexibilité et l’humanité pour mettre en œuvre une structure d’accueil cohérente et une offre complète de services gouvernementaux.
La démarche transversale et interministérielle se composait entre autres de cellules express de coordination quotidiennes. Une plateforme collaborative commune aux différents intervenants a même été mise en place afin de partager rapidement l’information. Un plan d’intervention gouvernemental a été élaboré pour clarifier les rôles et responsabilités, les actions à déployer, les chaînes d’intervention et de communication à déclencher, allant jusqu’à identifier deux niveaux de relève pour les principaux intervenants. Pour préserver les connaissances acquises, l’équipe du MIFI a conçu un guide de rédaction et un gabarit pour l’élaboration de futurs plans d’intervention d’urgence pour une prise en charge digne et sécuritaire de flux migratoires. Cette documentation de référence inclut plusieurs recommandations utiles à la conception et à l’identification de mesures particulières et services à mettre en place en contexte de crise.
Afin de permettre aux étudiantes et aux étudiants des programmes d’études en soins infirmiers, en soins préhospitaliers d’urgence ainsi qu’en technologie d’analyses biomédicales d’apprendre dans des situations les plus authentiques possibles, le cégep de Shawinigan a créé il y a dix ans le centre virtuel d’immersion clinique (CVIC). Ce laboratoire reproduit une salle d’urgence, calquée sur la réalité du milieu hospitalier, qui peut être adaptée selon les besoins pédagogiques.
Quatre simulations inter-programmes utilisant le CVIC ont été organisées entre 2014 et 2019. Mises sur pause en raison de la pandémie, une simulation majeure a été créée au printemps 2023. Si le terme « majeure » a été ajouté, c’est que la simulation est sans commune mesure aux précédentes. Le scénario : un écrasement d’avion, qui a percuté trois voitures habitées et deux poteaux électriques, pour terminer sa course sur la Maison des jeunes, faisant 32 victimes. La simulation a été réalisée avec la collaboration de la Sûreté du Québec, du Service des incendies de la Ville de Shawinigan, du Service d’intervention d’urgence civile du Québec, du personnel d’Hydro-Québec et la participation des étudiantes et étudiants la Majeure en soins préhospitaliers d’urgence avancés de l’Université de Montréal et du programme d’inhalothérapie du Collège Ellis.
Une équipe aérienne d’Airmedic est même venue chercher une victime pour la transporter à Québec. Le scénario catastrophique a également mis à contribution le talent des élèves de 4e secondaire du Séminaire Sainte-Marie dans le cadre de leur cours de maquillage de scène. Au total, 199 étudiantes et étudiants ont participé à cette simulation d’envergure comportant 53 scénarios différents, coordonnés et documentés par M. Luc Grenier, responsable du CVIC. Les grands objectifs étaient de permettre aux participants d’appliquer, de façon concrète, les compétences développées dans le cadre de leur parcours de formation. Fort de cette expérience, le cégep compte réaliser une autre simulation majeure l’an prochain.
La région de l’Outaouais fait face à une pénurie importante de technologues en imagerie médicale, ce qui entraîne des retards dans les listes d’attente et des ajustements dans les services offerts. Pour combler ce besoin urgent, amplifié par l’éventuelle construction d’un nouveau centre hospitalier, le Cégep de l’Outaouais et le Centre intégré de santé et de services sociaux de l’Outaouais (CISSSO) ont collaboré pour mettre en place un programme de formation en technologies de radiodiagnostic.
Une concertation régionale impliquant plusieurs partenaires a d’abord illustré les besoins et l’urgence de mettre en place un tel programme, qui était attendu depuis plus de dix ans. En juin 2022, le ministère de l’Enseignement supérieur accordait son autorisation ainsi que le financement. Les premiers étudiants ont débuté le programme en janvier 2023, bien avant que les infrastructures et les équipements du cégep ne soient accessibles, ce qui constitue un véritable exploit!
Tout cela a été rendu possible en revoyant l’organisation des grilles horaires de l’imagerie médicale de l’Hôpital de Hull pour accroitre la disponibilité de certaines salles d’imagerie. Cela permet de réaliser la partie pratique de certains cours en lien avec le radiodiagnostic, sans toutefois réduire les services offerts à la population. Sans cette collaboration, le programme n’aurait vu le jour qu’en 2025, le temps que les locaux et les équipements du cégep ne soient mis en place.
Grâce à ce modèle hybride, les étudiants ont la chance d’acquérir une expérience pratique dès leur première session en assistant les technologues sur le terrain. Cela contribue à lutter contre la pénurie de main-d’œuvre et rend plus accessibles aux citoyens les services médicaux essentiels.
L’implantation du programme de radiodiagnostic a également des retombées positives sur la rétention des étudiants de l’Outaouais, qui s’inscrivaient souvent dans des établissements d’enseignement supérieur en Ontario faute de programmes locaux.
Au quotidien, une multitude d’activités, de projets et d’actions sont mis en œuvre dans toute organisation. Souvent, des projets émergent sans que les unités concernées ou éventuellement appelées à y participer soient informées en amont, sans compter que la capacité de l’organisation n’est pas toujours prise en compte. Comment répertorier et recenser toutes ces initiatives, suivre leur évolution, s’assurer que les bonnes personnes interviennent au bon moment, voir à la complémentarité et aux points de jonction et évaluer les étapes de mise en œuvre dans une optique d’amélioration continue ?
C’est sur la base de ces interrogations et d’une volonté de mieux encadrer et mieux soutenir la vision stratégique de l’Université du Québec à Trois-Rivières qu’est née la démarche de gestion institutionnelle de projet (GIP). Son pari : si les projets sont bien priorisés et coordonnés, si l’on parvient à optimiser l’utilisation des ressources requises au bon moment, cette prise en charge aura pour conséquence d’aménager de l’espace pour favoriser l’émergence d’opportunités imprévues et bénéfiques.
Après une phase pilote pour évaluer la démarche, la GIP a officiellement été implantée lors de l’année financière 2021-2022. Elle a permis de déployer des outils et un processus centralisé et transversal de prise en charge des projets institutionnels permettant d’identifier et d’intégrer efficacement les secteurs mis à profit, de mieux planifier les investissements et d’impliquer les bonnes personnes au bon moment afin de bien répartir la charge des efforts requis et assurer la complétion des différents projets dans les temps et dans les budgets. À ce jour, plus de 1 000 initiatives issues d’une vingtaine de projets ont été intégrés à la GIP, comme la planification stratégique, la gestion des espaces, l’acquisition d’équipements, les demandes de subvention de recherche, la gestion des programmes d’études et des projets du service de la formation continue.
Le projet d’habitation à haute efficacité énergétique vise à améliorer l’habitation au Nunavik, dans une perspective de développement durable. Les 14 communautés ne sont pas reliées au réseau d’Hydro-Québec; elles sont desservies par des micro réseaux dans lesquels l’électricité est produite par des génératrices diésel extrêmement polluantes et coûteuses. La région souffre également d’une pénurie de logements et d’une difficulté à adapter l’habitation au contexte climatique et au mode de vie local. La Société d’habitation du Québec (SHQ) est directement interpelée par ces questions puisqu’elle a pour mission de favoriser l’accès à des conditions adéquates de logement.
Pour tenter de répondre au manque de connaissances, la SHQ a élaboré un projet de prototype d’habitation à Quaqtaq. Ce modèle a été conçu en s’inspirant de la norme Passive House et le design inclut des spécificités relatives au mode de vie inuit. Lors de la construction, près d’une centaine de capteurs de mesures diverses ont été installés afin d’effectuer une analyse détaillée de la consommation énergétique du bâtiment et de valider les choix effectués. Un appareillage semblable a ensuite été installé par le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs et l’aide d’Hydro-Québec dans cinq autres bâtiments jumelés typiques de la région afin de mieux comprendre la consommation d’énergie des habitations. Pour analyser la grande quantité de données recueillies et développer des solutions aux problèmes soulevés, la SHQ a mis en place un partenariat de recherche avec l’équipe du professeur Louis Gosselin de l’Université Laval. Une panoplie de solutions ont été développées pour améliorer l’efficacité énergétique des habitations nordiques. Elles faciliteront le déploiement de bâtiments à haute efficacité énergétique au Nunavik tout en respectant les préférences locales. Le projet de départ a également permis de mettre en place d’autres projets d’études, qui sont toujours en cours.
Le Québec s’est fixé une cible de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) de 37,5 % en 2030 par rapport au niveau de 1990. Compte tenu de la croissance économique projetée et de l’évolution tendancielle des technologies, le gouvernement devait se doter d’outils de prédiction de ses actions.
C’est dans ce contexte que le ministère des Finances du Québec et le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs se sont unis pour développer deux modèles de simulation innovants. Ces outils permettent de mesurer les effets des interventions du Québec sur l’économie, la consommation d’énergie et les émissions de GES, tout en tenant compte des interactions complexes entre ces domaines.
Le Modèle d’équilibre général environnement (MEGFQ-E) constitue un système élaboré d’équations intégrant les composantes de l’économie du Québec et tenant compte de leurs interrelations. Il permet d’illustrer les changements de comportement des agents économiques et de mesurer les effets de ces changements sur les émissions de GES.
Le Modèle Système énergétique du Québec, de l’environnement, du climat et de l’électricité (SEQUENCE) représente un outil d’optimisation énergétique très détaillé permettant d’évaluer les différents choix technologiques pouvant être effectués afin de réduire les émissions de GES.
Les résultats de ces modèles assurent au gouvernement de prendre des décisions qui tiennent compte d’assises scientifiques solides, permettant de faciliter l’ajustement des politiques. Ils permettent également de faciliter l’identification des contraintes et des obstacles liés à la décarbonation. Une équipe interministérielle et multidisciplinaire d’une quinzaine de personnes a été mise en place. Divers partenaires scientifiques ont contribué au projet dont ESMIA Consultants, HEC Montréal et l’Université de Sherbrooke. Le gouvernement fédéral, certaines provinces canadiennes et même certains pays comme la France, la Nouvelle-Zélande et les États-Unis s’intéressent maintenant à ces modèles.
Le projet de Victoriaville avait mûri quelques années; Victoriaville intégrait déjà des collaborateurs scientifiques dans nombreux projets en environnement et en développement durable depuis une dizaine d’années déjà. En 2020, l’UQTR s’était même officiellement unie à Victoriaville pour créer la toute première Chaire de recherche municipale pour les villes durables, dont le Pr Barnabé est le titulaire. Cette initiative novatrice avait positionné favorablement la Ville dans l’écosystème de recherche et d’innovation québécois. Par exemple, grâce aux conseils et à l’expertise du Pr Barnabé, Victoriaville a mis en place un projet pilote de système novateur d’assainissement des eaux usées industrielles par les microalgues. En intégrant le conseil scientifique au sein d’une municipalité, les collaborations scientifiques s’amplifient, la diffusion du savoir s’accroit et la culture de l’innovation se développe à un rythme accéléré. L’initiative de Victoriaville fait déjà écho dans d’autres villes comme Longueuil, Laval, Nicolet, Terrebonne et Trois-Rivières. Ce projet a le potentiel de faire naître, à l’échelle de la province, un réseau de conseillers scientifiques qui partageraient leur expertise, échangeraient sur des enjeux communs à plusieurs municipalités et catalyseraient de nouvelles collaborations inter-villes et interrégionales.
L’ancien site web de la Ville de Boucherville était désuet et suscitait une insatisfaction généralisée. Les problèmes s’y rattachant empêchaient la Ville d’atteindre ses objectifs reliés au service client et altéraient la perception des citoyens quant à la qualité et l’étendue des services municipaux.
La démarche de refonte du site web visait un public primaire (résidents propriétaires et familles) et reposait sur deux objectifs généraux à atteindre dans l’année suivant la mise en ligne : un niveau de satisfaction des résidents d’au moins 75 % quant à leur capacité à trouver l’information sur le site et la réduction d’au moins 10 % des appels au service à la clientèle.
Un travail minutieux de recherche et d’analyse a d’abord guidé la phase de conception. L’analyse des comportements, des données d’utilisation et des cartes de chaleur a fait ressortir les attentes, les tendances d’utilisation et les interactions des utilisateurs avec le site.
Le projet de refonte a été mis en place de manière collective, en impliquant le personnel de la Ville à chacune des étapes : recherche, analyse, réflexion, rédaction, développement des fonctionnalités, tests, etc. Cette approche inclusive prenant en compte les processus, les habitudes et les objectifs de chacun avait pour but de favoriser l’adoption de ce nouvel outil de travail.
Un comité de rédaction inter-directions s’est réuni chaque semaine durant un an et demi afin d’assurer une direction commune et d’échanger sur les objectifs, l’approche rédactionnelle, les enjeux et les meilleures pratiques. Sachant que 50 % des Québécois éprouvent de la difficulté à lire et que la capacité de lecture diminue en ligne et avec l’âge, l’usage de mots simples et courants, de phrases actives et courtes ainsi que de paragraphes concis a été privilégié pour la réécriture des contenus. Moins d’un an après sa mise en ligne, on peut dire que c’est mission accomplie : Boucherville.ca note une hausse des visites de 31 %, une réduction du nombre d’appels de 30 % et un taux de satisfaction des utilisateurs de 82 % !
La pénurie de personnel dans le domaine de la santé est un problème majeur. Dans ce contexte, les établissements de santé doivent revoir leur organisation du travail. La mise en place de directions logistiques offre une nouvelle perspective pour aborder cette crise. L’objectif principal est de décharger le personnel clinique des tâches logistiques afin d’améliorer l’expérience des patients et des employés, en s’assurant que les bonnes personnes soient au bon endroit pour effectuer les bonnes tâches.
Dans les établissements de santé au Québec, divers professionnels de la santé, tels que les préposés aux bénéficiaires, les infirmières et les infirmières auxiliaires, effectuent des tâches logistiques qui pourraient être déléguées à d’autres rôles. Ces tâches comprennent le réapprovisionnement en matériel, les transports divers et autres activités logistiques. Des analyses internes ont montré que jusqu’à 30 % du temps des préposés aux bénéficiaires est consacré à ces tâches. En confiant ces tâches à des professionnels de la logistique, on libère du temps clinique précieux.
Le projet novateur mené par le CISSS de Chaudière-Appalaches et le CHU de Québec – Université Laval est né des suites du programme FORCES d’Excellence en Santé Canada auquel ils ont participé. À l’automne 2021, les deux organisations s’unissent et arriment les résultats de leurs travaux respectifs pour procéder à la réorganisation du travail avec l’objectif de redonner du temps aux soignants au profit des patients.
Des magasiniers, des préposés au transport et des brancardiers font maintenant office d’agent logistique, libérant ainsi le personnel de soins. Chaque heure logistique investie représente 1,9 heure clinique qui est réinvestie auprès du patient. Les résultats positifs ont conduit à des discussions avec le ministère de la Santé et des Services sociaux et à des investissements substantiels pour déployer cette approche à plus grande échelle. Un projet de vitrine a été mis en place afin de répliquer ce modèle dans d’autres établissements de santé.
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L’Espace LAFLEUR (Lieu Animé et Facilitant pour les Locataires Engagés, Un pas vers la Réussite) a été créé au cours de la pandémie. Le projet vise à améliorer la qualité de vie d’une centaine de locataires vivant dans un milieu défavorisé et stigmatisé au sein de la municipalité de Sainte-Croix. Par l’animation d’une vie communautaire, l’Espace contribue au développement du potentiel de ce milieu et des personnes qui y vivent et à déconstruire les préjugés entourant les personnes vivant en HLM.
Le projet a vu le jour grâce à la concertation et à l’implication humaine et financière des partenaires, dont la Direction de santé publique du CISSS de Chaudière-Appalaches, le comité de soutien communautaire en logement social et communautaire, l’Oasis de Lotbinière, Entraide Sainte-Croix et le Carrefour des personnes aînées de Lotbinière. Une coordonnatrice soutient les comités dans leurs actions de développement des compétences axées sur des thématiques variées : persévérance scolaire, alimentation saine, finances, employabilité, relations avec les pairs et bon voisinage, citoyenneté, compétences parentales, loisirs, etc. Cette initiative inspirante permet de transformer les perceptions et de réduire les conséquences de la pauvreté sur les personnes locataires. La mixité sociale est d’ailleurs reconnue comme une stratégie de lutte efficace contre les inégalités sociales.
La participation des locataires aux nombreux ateliers et activités sociales est éloquente. Ils se sont aussi mobilisés pour faire changer la signalisation routière et fermer une ruelle afin d’assurer la sécurité des enfants. Ils ont également contribué à l’aménagement d’espaces de jardinage communautaire, d’installation de balançoires et d’un module de jeux. Une particularité du projet tient aussi au fait que les locataires impliqués sont majoritairement des hommes, une clientèle ayant habituellement moins recours aux services de santé et de services sociaux. Depuis la mise en place de l’initiative, le HLM affiche complet, alors que plusieurs logements demeuraient vacants en raison des perceptions négatives associées au secteur. Le projet a amené une belle solution à une problématique de longue date.
Considérée comme un pilier de la politique familiale du Québec, Line Bérubé a contribué au lancement d’importants plans d’action pour assurer le mieux-être des enfants et de leurs parents.
« Vous allez m’arrêter ça! » Nous sommes au milieu des années 2010. Line Bérubé occupe le poste de sous-ministre au ministère de la Famille. Un matin, elle apprend qu’une petite de 4 ans, handicapée, ne pourra plus fréquenter le service de garde qui l’accueille à cause d’un changement dans l’enveloppe budgétaire d’un programme qui permettait jusque-là qu’elle y soit intégrée. Sa réaction vient du cœur : « Je comprends qu’il faille jongler avec les budgets, mais ce genre de décision n’a pas de bon sens. » Grâce à son intervention, la fillette et ses parents, comme tous ceux et celles dans des situations semblables depuis, ont vu leurs droits acquis pris en considération.
La jeune retraitée relate l’anecdote avec l’humilité qui la caractérise. Mais ce type de victoire la rend fière. Combattre les iniquités qu’elle ne peut tolérer, participer à la création d’une société meilleure, voilà ce qui l’a animée durant ses 37 ans dans l’administration publique, dont 30 comme gestionnaire. Pour cette aînée de quatre filles, aider les autres est une seconde nature.
« Œuvrer au bien commun l’est aussi. Ma carrière m’a permis de combiner les deux. » Elle débute dans un centre local de services communautaires (CLSC) de sa région natale du Bas-Saint-Laurent tout en complétant sa maîtrise en service social. Rapidement, la jeune femme devient gestionnaire. Suivent une maîtrise en administration publique et un nombre croissant de responsabilités au sein de plusieurs CLSC. Dans ces établissements, elle côtoie des clientèles vulnérables. « J’y ai appris la vie, affirme-t-elle, touchée. Cette réalité terrain m’a toujours habitée par la suite. »
Le goût de changer les choses
Ces années lui donnent aussi le goût de changer les choses. D’où son choix d’une carrière dans la fonction publique. De 2002 à 2020, elle marque de son passage trois ministères, d’abord comme gestionnaire à la Santé et aux Services sociaux, puis comme sous-ministre à la Famille et aux Aînés ainsi qu’au Travail, à l’Emploi et à la Solidarité sociale. Elle conclura son parcours au Conseil exécutif, où elle agira comme secrétaire générale associée aux emplois supérieurs.
« Son engagement et sa contribution au service de l’intérêt public, notamment auprès des enfants, des familles, des aînés et des personnes vulnérables, sont exceptionnels. » Ainsi témoigne celui qui l’a remplacée dans ce dernier rôle, Benoît Grenier.
Parmi ses réussites, Line Bérubé compte les différents plans d’action qu’elle a pilotés. Certains visent à prévenir l’intimidation, d’autres à contrer la maltraitance envers les aînés, ou encore à favoriser l’inclusion économique et la participation sociale. Elle se rappelle son émotion au moment où le gouvernement les rendait publics. « J’avais le sentiment du devoir accompli, d’avoir fait le meilleur pour les gens. »
Line Bérubé s’adressant à une partie de l’équipe du ministère de la Famille et des Aînés lors du lancement de la campagne Entraide, qui a lieu chaque automne.
Avec l’équipe du ministère de la Famille et des Aînés, lors de la remise du prix Ensemble contre l’intimidation, en 2015.
Reconnue pour sa rigueur et son doigté, Line Bérubé s’est aussi vu confier des mandats délicats. Parmi eux, la réforme du financement des services de garde. L’exercice faisait suite au rapport très critique et médiatisé déposé en 2011 par le Vérificateur général sur l’attribution des places pour les enfants. En plus d’apaiser les tensions, la gestionnaire a su implanter des solutions concrètes aux lacunes soulevées, pour mieux répondre aux besoins des familles.
Gérer avec intelligence émotionnelle
C’est souvent entre deux foulées que cette amoureuse de la course à pied a trouvé le tour de dénouer les impasses. « Mais je n’ai pas fait ça seule! » En vrai leader, elle s’empresse de souligner la contribution de ses équipes et la satisfaction qu’elle a eue à les mobiliser dans le respect.
Plaisir partagé. « Je peux certifier que Line fait l’unanimité auprès de ses collègues par son écoute et son intelligence émotionnelle », assure Madeleine Paulin, qui a elle-même occupé plusieurs postes importants au gouvernement.
Aujourd’hui mentore auprès de la relève de la haute fonction publique québécoise, Line Bérubé partage généreusement son expérience. Parmi ses conseils, celui-ci : « Il ne faut pas redouter les passages difficiles. Ce sont ceux qui m’ont le plus appris. »
C’est encore vers cette relève que ses pensées se tournent au moment où elle reçoit le prix Hommage. « La pénurie de main-d’œuvre est à craindre, déplore-t-elle. C’est pourquoi il faut valoriser davantage les personnes qui travaillent dans le secteur public. Il s’en trouve beaucoup qui sont extraordinaires. » Dénuée de prétention, Line Bérubé n’userait jamais de cet adjectif pour elle-même. Malgré tout, elle représente un exemple éloquent et inspirant de l’engagement civique.
D’abord médecin de famille, puis gestionnaire hors pair du réseau de la santé, Pierre Gfeller a voué quatre décennies à améliorer les soins de santé et les services à la population.
« Excusez mon retard. La réunion avec la cellule de crise du ministère de la Santé et des Services sociaux s’est prolongée », lance Pierre Gfeller. Cette entrée en matière illustre bien la position privilégiée qu’occupe dans le réseau québécois le président-directeur général (PDG) du Centre universitaire de santé McGill (CUSM). Elle montre aussi la grande disponibilité de celui qui dirige l’un des trois plus gros hôpitaux de recherche au Canada.
Le médecin de famille a d’abord exercé sa profession pendant une vingtaine d’années dans les Hautes-Laurentides. Il y suivait un nombre considérable de patients. Un rêve d’enfance pour ce passionné, qui caressait ce projet dès l’âge tendre de 3 ans. Si l’on exclut, à l’adolescence, sa brève ambition de devenir archéologue!
Gestionnaire à temps plein depuis 1998, ce dirigeant doué a enchaîné les chantiers de réorganisation des soins au profit de la population. Il a piloté le projet de modernisation de l’unité de traumatologie de l’Hôpital du Sacré-Cœur de Montréal en 2012 et assuré la gestion du changement provoqué par une complexe fusion au Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux du Nord-de-l’Île-de-Montréal (CIUSSS) en 2015. Depuis 2018, il poursuit le redressement amorcé du CUSM, qui vivait alors une période difficile.
Heureusement, sa profession d’origine l’avait entraîné à contrôler l’anxiété inhérente à ce type de charge. « Tenter en salle d’urgence de sauver la vie d’un enfant frappé par un camion ou de réanimer une personne âgée sans pression, ça, c’est stressant », relativise cet humaniste invétéré.
Dr Gfeller accueillant des employés et des patients à l’entrée du site Glen du CUSM.
Dr Gfeller en compagnie des coordonnatrices des unités lors des Prix d’excellence annuels du Conseil du personnel non clinique du CUSM.
Le cœur à la bonne place
Passionné par l’organisation des soins de santé, Pierre Gfeller mise sur des valeurs phares pour veiller au bien-être de la population. Accorder la priorité aux patients et patientes. Expliquer les décisions de façon transparente. Mobiliser les équipes. Collaborer avec les partenaires. Valoriser les principes d’équité, de diversité et d’inclusion…
Au moment de son passage au CIUSSS, la réforme hospitalière impose de fusionner le personnel de cinq établissements. Ce fédérateur hors pair parvient à créer une synergie. « J’ai lancé un message aux 300 médecins de l’Hôpital du Sacré-Cœur, pour la plupart des professeurs d’université, se souvient-il. Pouvons-nous travailler ensemble pour offrir aux patients un accès à de meilleurs services? »
Le Dr Gfeller a obtenu en 2000 une maîtrise en administration des affaires à l’Université du Québec à Montréal. Seul médecin dans cette classe de 120 têtes, il a remporté une bourse d’excellence. « Comprendre les dynamiques de groupe, entre autres, m’a beaucoup apporté, souligne-t-il. Ça m’a appris à déterminer qui sont mes alliés, qui sont ceux qui peuvent se rallier à moi, et qui sont les opposants auxquels il vaut mieux ne pas consacrer trop de temps. » Son style de gestion a facilité la coopération dans plusieurs organisations. Il a aussi assaini les finances, notamment au CUSM. Celui-ci traînait un déficit depuis longtemps, mais qui depuis revenu à l’équilibre budgétaire.
Durant les premiers temps de la pandémie, ce leader a joué un rôle essentiel dans la lutte sanitaire. Sous sa gouverne, le CUSM a quasi confié la direction de l’établissement au Centre de coordination des mesures d’urgence et aux infectiologues y participant. L’initiative a facilité les échanges avec les partenaires et le développement d’outils pour affronter la crise. Ce qui n’a pas empêché le gestionnaire de faire du travail de terrain dans le feu de l’action. Un vendredi soir du printemps 2020, il a multiplié les appels pour procurer des masques aux 125 bénéficiaires d’un centre d’hébergement de soins de longue durée à Lachine !
Visite au CHSLD Nazaire-Piché pour soutenir le personnel pendant la crise sanitaire en avril 2020.
Visite aux soins intensifs – Dr Gfeller discute avec l’infirmière Malaika Horsford.
Un mentor attentionné pour la relève
« Pierre possède une capacité hors du commun à trouver du temps pour les choses qu’il juge importantes », témoigne Marie-Pascale Messier Harbec, médecin de famille sur la Basse-Côte-Nord. À la fin de son adolescence, la jeune femme s’interroge sur son avenir. Elle pose alors des questions au gestionnaire, l’oncle de son amoureux, sur la conciliation travail-famille pour les professionnels de la santé. Malgré son horaire chargé, ce dernier prend la peine de l’accompagner dans ses réflexions, puis plus tard à certaines étapes de son cheminement. « Pierre a mené une carrière incroyable sans négliger sa vie privée ou ses proches, explique-t-elle, admirative. De plus, il mentore plusieurs personnes, pas juste dans le domaine de la santé. »
Aujourd’hui grand-père de deux fillettes et d’un bambin, Pierre Gfeller sent l’appel de la retraite. Le 3 janvier débutera une nouvelle étape de sa vie, remplie de voyages et de recontres entre amis. Le prix Hommage représente une conclusion heureuse à sa brillante carrière. « Cela me fait d’autant plus plaisir que le réseau de la santé est critiqué de toute part, confie le PDG du CUSM. Or, beaucoup de gens, comme mes collègues et moi, travaillons fort pour améliorer les services. »
À Terrebonne, le corps policier emploie deux agentes de liaison en violence conjugale pour mieux accompagner et protéger les personnes agressées par leur partenaire.
Un appel entre au 911. Chez un couple de la banlieue nord de Montréal, une personne a malmené l’autre. La police se rend alors au domicile et arrête l’agresseur. Jusque-là, rien de très nouveau. Sauf qu’à Terrebonne, la victime se retrouve maintenant au centre des procédures. Une nouveauté qui contribue à briser le cycle de la violence conjugale en accompagnant les victimes avec sensibilité et bienveillance.
Cette approche inédite a vu le jour grâce à deux policières rodées au travail de terrain. Joëlle Laparé et Martine Milton ont d’abord investi de leur temps personnel pour bâtir ce projet. À la lumière de leurs 12 ans d’expérience comme patrouilleuses, mais aussi en s’appuyant sur des études, et des discussions avec des psychologues et des procureurs de la Couronne en violence conjugale, elles ont proposé des pistes de solution à leur direction. Le service de police de la municipalité a alors entamé des discussions avec le ministère de la Sécurité publique et le Secrétariat à la condition féminine. Tout cela a permis d’obtenir le financement pour la création de postes d’agentes de liaison en violence conjugale, une fonction jusque-là inexistante au sein des corps policiers.
Leur modèle a déjà séduit une dizaine de services de police au Québec, et devrait bientôt s’implanter dans 18 communautés autochtones. Une table provinciale des agents de liaison en violence conjugale est même en place depuis ce printemps, afin d’échanger sur les meilleures pratiques.
Accompagnement personnalisé des victimes
« De 7 à 10 jours après l’événement survenu au domicile, nos deux agentes rencontrent la victime et discutent avec elle, détaille Marc Brisson, directeur du Service de police de Terrebonne. Elles présentent les ressources disponibles, y compris une aide juridique s’il faut casser le bail de l’appartement après la séparation du couple. Elles reviennent aussi sur les conditions de libération de l’agresseur, comme le couvre-feu ou le suivi thérapeutique, et vérifient leur respect. »
Accompagnée à toutes les étapes, la personne (généralement une femme) peut se faire expliquer le fonctionnement du système judiciaire. Au besoin, elle peut même rencontrer le procureur chargé des dossiers de violence conjugale avant son témoignage, pour mieux anticiper ce qui se passera au tribunal.
Suivi amélioré des personnes violentes
L’agresseur n’est pas oublié dans tout ce processus. Les agentes de liaison vérifient qu’il respecte bien les conditions imposées par la cour, mais lui présentent aussi des organismes qui viennent en aide aux hommes violents. Elles contribuent aussi à prévenir les récidives, voire d’autres crimes, en échangeant des informations avec leurs collègues partout sur le territoire.
Implanté seulement depuis un an, ce modèle dépasse déjà toutes les attentes. Il a permis de repérer les agresseurs qui dérogent aux modalités de leur libération, ce qui renforce la confiance des victimes dans le système de justice. Cette vigilance a permis à trois reprises de prévenir un homicide.
Les agentes travaillent également à faire connaître le rôle de la police auprès du grand public. Elles nouent des partenariats avec des organismes communautaires et participent à des ateliers avec une association chargée d’accueillir les nouveaux arrivants. À Terrebonne, 1 personne sur 10 est née à l’étranger. « C’est important d’informer les gens de leurs droits, car les autorités policières n’ont pas toujours bonne presse dans certains pays », souligne Marc Brisson.
Les agentes de liaison en violence conjugale Martine Milton et Joëlle Laparé accompagnées de Marc Brisson, directeur du service de police.
Voir cette réalisation classée finaliste au prix Monde municipal rend le directeur très heureux. « Cela montre que les meilleures solutions viennent souvent de la base si on leur laisse de la place, confie Marc Brisson. Avec un financement adéquat, le personnel peut imaginer des projets qui ont des impacts directs pour les victimes. »
Les propriétaires de Québec contribuent à estimer la valeur de leur bâtiment en remplissant un questionnaire en ligne. Une innovation qui fait épargner un temps fou à toutes les parties.
Chaque année, comme le prescrit la loi, la Ville de Québec doit produire un résumé de l’inventaire de dizaines de milliers d’immeubles sur son territoire. Jusqu’à tout récemment, l’opération nécessitait temps et déplacements. Un évaluateur visitait chaque bâtiment, puis rédigeait un rapport. Dans un contexte de manque de main-d’œuvre, l’affaire prenait des allures de casse-tête. En effet, il était difficile pour la Ville de faire l’évaluation de tous les bâtiments dans les temps requis.
Les propriétaires et résidents, pour leur part, devaient obligatoirement se rendre disponibles pour la visite de l’inspecteur même si le moment ne convenait pas à leur horaire. Certaines personnes âgées ou handicapées parmi elles devaient, en plus, faire face au stress de trouver un accompagnateur qui saurait les sécuriser et répondre aux questions pour l’occasion.
« Depuis quelques années, nous cherchions à apporter une solution qui faciliterait la vie de tous », explique Éric Racine, directeur du Service d’évaluation de la Ville de Québec. « L’idée d’une autoévaluation par le citoyen était dans notre mire. Mais la mettre en place représentait un bon défi. Les impliquer dans l’estimation de leur propriété ne s’était jamais fait au Québec.»
D’une part, l’équipe responsable devait s’assurer que les changements proposés n’enfreignaient pas la Loi sur la fiscalité municipale ni les normes de l’Ordre des évaluateurs agréés du Québec, qui encadrent l’appréciation des immeubles. D’autre part, il fallait trouver le moyen de gérer et de traiter adéquatement les nombreux renseignements à recueillir.
Simple questionnaire, calculs complexes
L’ingéniosité de la solution retenue? Elle tient à la conception d’un algorithme. Ce dernier convertit les réponses des gens, recueillies par un questionnaire simple et convivial, en données actuarielles pertinentes pour estimer la valeur des immeubles.
L’équipe a élaboré ce questionnaire, qu’on peut remplir en 20 minutes dans le confort de sa résidence, grâce au concours d’un groupe témoin de propriétaires. S’en est suivi un rigoureux processus de validation. « Nous avons constaté que faire confiance aux citoyens, c’est gagnant. Les renseignements qu’ils rapportent sont collés à la réalité », résume le directeur.
En 2020, la version papier du produit, transmise par la poste, était lancée. L’initiative tombait à point! « Nous avons pu maintenir nos activités malgré la crise sanitaire. La nouvelle s’est répandue et plusieurs grandes villes nous ont sollicités pour obtenir le questionnaire. Nous l’avons partagé sans hésiter. »
André Bertrand, Éric Racine, Chantal Carpentier, Simon Douville, Line Gagnon, Philippe Richard-Duval, Louis St-Pierre et Martin Boucher, du Service d’évaluation de la Ville de Québec. Absents sur la photo : Chantal Bolduc et Sébastien Fraser.
Un portail Web pour les propriétaires
Depuis 2021, la version numérique se trouve sur un portail Web pour encore plus de simplicité. Finis, les casse-têtes. Grâce à son nouveau système, qui réduit de 60 % les coûts de traitement, la Ville enregistre des économies annuelles de 1 M$. S’ajoute un gain en productivité de 300 %. « Antérieurement, le délai entre la visite d’un technicien et l’évaluation du dossier était de 70 à 180 jours. Maintenant, il se maintient entre 6 à 26 jours », détaille Éric Racine.
Le public est tout aussi avantagé, sans compter les bénéfices écologiques associés à la diminution du papier et à l’élimination des déplacements en automobile.
La portée de cette réalisation a vite franchi les frontières de la capitale. En plus de s’étendre aux quatre coins du Québec, le modèle a influencé la mise à jour des pratiques d’évaluation foncière, dont la réglementation a été revue en juin 2021.
Éric Racine et son équipe sont très fiers de leur nomination au prix Monde municipal. « Ça permet de mettre en lumière des côtés parfois méconnus de notre travail, qui entraînent des réussites. La reconnaissance est très appréciée. »
Grâce à la débrouillardise d’un service des infrastructures imaginatif, la plupart des municipalités de Bellechasse savent tout désormais de l’état de leurs actifs.
De combien de poteaux d’incendie dispose Armagh? Quel est l’état des bâtiments municipaux situés sur le territoire de Buckland? Où sont localisées exactement les vannes d’aqueduc de Saint-Malachie? Jusqu’à tout récemment, les agglomérations de Bellechasse, en Chaudière-Appalaches, n’avaient pas en main un inventaire complet de leurs actifs.
« Il y avait un manque », résume Louis-Pierre Harvey. L’arpenteur-géomètre travaille au Service des infrastructures de la Municipalité régionale de comté (MRC) de Bellechasse, qui regroupe aussi des spécialistes en génie civil. « Le peu d’informations à la disposition des municipalités concernait surtout les réseaux de chaussées et de conduites d’égout et d’aqueduc situés dans leur périmètre urbain. »
Ce portrait parcellaire nuisait à la prise de décisions financières réfléchies par ces gouvernements locaux. Comment par exemple planifier le nécessaire entretien de ponceaux si on ignore tout de la condition propre de chacun? Cela revient à naviguer au doigt mouillé. À moins, bien sûr, de se doter d’une vue d’ensemble, comme l’a fait la MRC de Bellechasse dans les dernières années.
Un programme comme levier
En 2019, le Service des infrastructures a pris connaissance d’un programme de gestion des actifs offert par la Fédération canadienne des municipalités. Ce plan couvre 80 % des dépenses relatives à un tel exercice, jusqu’à concurrence de 50 000 $. Les 20 % restants, ou 12 500 $, proviennent des poches des administrations locales. Avec ce budget, aucune des municipalités n’aurait pu développer seule un tel outil.
« La plupart de nos municipalités ont moins de 3 000 habitants. Elles ne disposent pas des ressources à l’interne pour remplir les demandes de subventions, puis piloter la réalisation du projet une fois le financement obtenu. Nous avons donc eu l’idée de prendre en charge ces volets en offrant un service clé en main », raconte Louis-Pierre Harvey.
En tout, 18 des 20 localités de la MRC de Bellechasse ont levé la main. « Le financement mis en commun nous a permis de collecter des données d’inventaire et d’état sur les huit classes d’actifs jugées les plus essentielles », précise-t-il. Le projet a permis aux municipalités participantes de prendre une longueur d’avance comparativement à la majorité des municipalités de même envergure en matière de gestion d’actifs.
L’équipe ayant participé au projet : Raphaël Arsenault-Roy, Dominique Dufour, Didier St-Laurent, Samuel de Chantal Dumont, Normand Leblond, Louise Blanchet. Antoine Lachance et Louis-Pierre Harvey.
Une gestion plus responsable
Au terme de cet effort, en juin 2021, l’équipe a achevé son décompte. Elle a répertorié 1 300 ponceaux, 435 poteaux d’incendie, 960 vannes d’aqueduc, 60 bâtiments municipaux. En prime, 312 km de chaussées et près de 33 km de conduites d’égout et d’aqueduc. Elle a ensuite centralisé ces données sur une plateforme géomatique. Leur mise à jour permet de vérifier comment les infrastructures évoluent dans l’espace et dans le temps.
Plusieurs des administrations concernées bénéficient en outre d’un tableau de bord intégré à la plateforme. Grâce à cet outil, elles peuvent mener des analyses poussées et ainsi maximiser les investissements de fonds publics sur leurs actifs. « Remplacer une canalisation en même temps qu’on procède à des travaux de resurfaçage coûte moins cher que de le faire lorsque celle-ci brise », illustre l’arpenteur-géomètre. L’outil permet aux municipalités d’alimenter elles-mêmes la plateforme et mettre à jour les données pour assurer une continuité, même si le personnel actuel venait à changer.
Cette initiative originale se qualifie sans peine pour la finale du prix Monde municipal. « C’est une belle surprise qui confirme la pertinence de services comme les nôtres au sein des MRC », conclut avec fierté Louis-Pierre Harvey.
En Estrie, les personnes âgées reçoivent un accueil sur mesure dans la première urgence gériatrique au pays. Une expérience moins éprouvante grâce à des soins adaptés.
À première vue, l’urgence de l’Hôtel-Dieu de Sherbrooke ressemble aux autres services hospitaliers du Québec. Une chose la distingue cependant. En 2020, l’American College of Emergency Physicians l’accréditait comme urgence gériatrique de niveau « argent » — une première au Québec et au Canada. Ce sceau récompense l’excellence dans les soins donnés aux personnes âgées. Là-bas, médecins, infirmières et préposés s’allient pour mieux prendre en charge cette clientèle qui représente 20 à 40 % des bénéficiaires.
Dès leur arrivée à l’hôpital, la plupart des patients et patientes de 65 ans ou plus rencontrent une infirmière clinicienne spécialisée en gériatrie. Cette professionnelle évalue leurs besoins de façon globale, au-delà de la raison médicale qui motive la consultation à l’urgence. À quoi ressemble leur environnement? Leur réseau social? Leur état psychologique?
« Tous ces éléments peuvent faire une différence entre une pneumonie qui guérit bien et une infection qui entraîne d’autres problèmes », souligne Audrey-Anne Brousseau, la médecin à l’origine de l’urgence gériatrique. Le projet rassemble le Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de l’Estrie (CIUSSS) et le Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke.
Soins adaptés au vieillissement
À l’hôpital, les gens du troisième âge doivent obtenir des soins de base pour ne pas décliner. Manger, bouger, s’orienter dans l’espace et le temps… L’urgence gériatrique répond à leurs besoins en leur procurant du matériel comme des chaussettes antidérapantes et des repères dans le temps.
« Près de 80 % du personnel à l’urgence et l’ensemble des médecins ont reçu une formation pour détecter et prendre en charge l’agitation et le délirium », ajoute la spécialiste. Environ 10 % des individus qui entrent à l’hôpital éprouvent un état temporaire de confusion causé par certaines infections ou par le stress du séjour. Ce syndrome doit être traité pour prévenir des chutes, voire des décès.
Mirhet Karahasanovic, physiothérapeute, Dre Audrey-Anne Brousseau, Dr Frédéric Arguin et Véronic Poulin, infirmière clinicienne en gériatrie.
Le soutien se poursuit au-delà du seuil de l’hôpital. Un physiothérapeute et une travailleuse sociale épaulent l’infirmière dans cette mission. Une personne se déplaçant en marchette risque, par exemple, d’avoir du mal à se mouvoir si elle se casse le poignet. L’équipe peut l’aider à préserver son autonomie en lui suggérant des mouvements de rééducation ou des équipements adaptés. De même, elle peut organiser avec les services sociaux une aide pour les repas et le ménage afin que le retour à domicile se déroule en toute sécurité.
Prise en charge plus efficace
« À l’urgence, le personnel voit les patients très vite pour des épisodes aigus, témoigne la médecin. La mise en place d’une équipe interdisciplinaire permet de mieux répartir certaines responsabilités. »
La collaboration entre spécialistes de différents secteurs améliore la prise en charge, tout comme le suivi avec le médecin de famille et le CIUSSS. Elle évite aussi un retour rapide à l’hôpital après le traitement. Avant la pandémie, ces efforts ont fait baisser de 5 % les admissions à l’urgence gériatrique, sans allonger la durée des séjours. Les services hospitaliers de première ligne de l’Estrie devraient bientôt adopter le modèle, déjà implanté à Cowansville.
Avec son équipe, l’urgentologue voit avec fierté sa réalisation en nomination au prix Santé et services sociaux. « C’est un signe de reconnaissance qui nous aide à avancer face aux embûches », conclut Audrey-Anne Brousseau.
Le premier centre de commandement implanté dans le réseau de la santé au Québec concrétise un rêve de la population : recevoir des soins plus rapidement et facilement.
Naviguer dans le système de santé au Québec peut représenter un véritable défi. Il suffit de jeter un coup d’œil aux titres des journaux pour s’en convaincre. Engorgement des urgences, allongement de l’attente pour une consultation en psychiatrie et manque de lits dans les hôpitaux font régulièrement la manchette. Avec, pour résultat, des soins et des services de moins en moins accessibles.
Dans un monde idéal, le cheminement des gens dans le réseau serait ponctué de moins de détours, de goulots d’étranglement et de culs-de-sac. Leurs trajectoires seraient beaucoup plus fluides qu’à l’heure actuelle. D’où le projet de centre de commandement du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux du Centre-Ouest-de-l’Île-de-Montréal (CIUSSS).
Gestion centralisée
« Différents tableaux de bord couvrent les murs du centre. Un seul coup d’œil nous informe de tout ce qui se passe dans notre CIUSSS », explique Joanne Côté, directrice qualité, transformation, évaluation, performance et éthique pour l’organisme. « Nous connaissons le nombre de lits occupés dans nos installations, la durée de l’attente à l’urgence, les durées moyennes de séjour. »
Le C4 — pour continuum de soins, communication, collaboration et créativité — rassemble les données disséminées dans l’organisation. Cela permet de suivre en temps réel le parcours de chaque personne hospitalisée dans le but de l’optimiser. Un patient a terminé son traitement médical? Direction vers un centre de réadaptation ou d’hébergement de soins de longue durée, ce qui libère un lit pour une autre personne.
L’équipe a mis six mois de travail acharné à concrétiser cette cellule de décision d’un genre nouveau. « Au départ, les directeurs, directeurs adjoints et gestionnaires n’étaient pas nécessairement tous convaincus par le projet. Il a fallu en persuader plusieurs de la valeur ajoutée d’un tel outil », raconte Joanne Côté, qui témoigne avoir « bâti un avion en plein vol ».
Trajectoires plus fluides
Depuis son implantation en avril 2021, le C4 a permis de briser les silos au CIUSSS. La gestion hiérarchique d’antan s’est transformée en un travail d’équipe dont bénéficie la clientèle. Le délai d’admission de l’urgence à l’unité de soins a chuté de près de 10 heures. La durée moyenne de séjour en santé mentale s’est raccourcie de plus de 4 jours. À l’Hôpital général juif, le principal complexe hospitalier lié au Centre, moins de personnes occupent un lit une fois leur traitement terminé, car elles obtiennent plus vite une place dans un établissement de soins à long terme.
L’équipe du centre de commandement.Caucus sur la vaccination.
Le projet s’avère si concluant que des patients et patientes à domicile voient depuis peu leur convalescence supervisée à partir du centre de commandement. Même leurs signes vitaux sont suivis à distance! « Ce soutien accru à notre unité d’hospitalisation virtuelle s’est traduit par une économie de 700 jours de présence à l’hôpital », se réjouit la directrice.
Ce succès n’est pas passé inaperçu au ministère de la Santé et des Services sociaux. En témoigne le plan déposé le printemps dernier par le ministre Christian Dubé. « Le gouvernement souhaite favoriser la mise en place de centres de commandement dans les hôpitaux. L’approche sera inspirée de l’expérience du CIUSSS du Centre-Ouest-de-l’Île-de-Montréal. »
Cette citation de même que la nomination au prix Santé et services sociaux touchent au plus haut point Joanne Côté. « Ce sont de belles reconnaissances pour tous les efforts déployés par notre équipe afin de rendre les soins et services plus disponibles aux patients. »
Dépister la COVID-19 à partir d’une bouteille d’eau achetée au dépanneur, oui, c’est possible! Voici comment une invention québécoise a contribué à contrer la pandémie.
Automne 2020. Le Québec encaisse la deuxième vague de COVID-19. Toute personne peut passer un test PCR pour détecter le virus, mais la méthode implique des délais. Sans parler de l’inconfort, car on doit insérer un écouvillon profondément par une narine pour recueillir l’échantillon. Quant aux trousses d’analyse rapide à domicile, elles ne se trouvent pas encore sur le marché.
« Augmenter l’accessibilité au dépistage est devenu un enjeu majeur. Surtout quand nous avons vu apparaître le risque de pénurie du matériel utilisé », se rappelle Jeannot Dumaresq, microbiologiste infectiologue rattaché au Centre intégré de santé et de services sociaux de Chaudière‐Appalaches (CISSS).
Le spécialiste en est alors convaincu : il faut mettre au point une nouvelle méthode. « Pour favoriser son adhésion, la technique doit être moins invasive que l’écouvillonnage nasopharyngé, qui rebute plusieurs personnes. » La collecte d’échantillons de salive par gargarisme paraît intéressante. Le hic, c’est que ce procédé exige d’habitude l’usage d’une solution saline stérilisée, qui pourrait aussi être frappée de rareté.
L’eau, un réel bienfait pour la santé!
Et si l’eau de source embouteillée pouvait convenir? Jamais tentée auparavant, l’affaire semble trop belle pour être vraie. Pourtant, les premiers tests effectués par Jeannot Dumaresq s’avèrent concluants. Le taux de fiabilité des résultats se compare à celui des échantillons obtenus par écouvillon. Mieux encore, l’eau est compatible avec toutes les trousses diagnostiques utilisées dans les laboratoires du Québec.
Dès lors, une quinzaine de personnes s’attellent à un projet pilote qui vise à mettre au point la technique. Ses avantages sont nombreux. Non invasive, facile d’emploi, peu coûteuse, elle ne requiert aucun matériel médical spécialisé. Elle peut être administrée sans compétence particulière, contrairement au procédé par écouvillon qui exige du personnel du réseau de la santé. Enfin, la stabilité des échantillons simplifie la conservation et le transport.
L’équipe qui a participé au développement du projet.
En un mois seulement, le projet franchit toutes les étapes jusqu’à l’aval du ministère de la Santé et des Services sociaux, début novembre 2020. La méthode est alors implantée par le CISSS de Chaudière-Appalaches. Les centres de dépistage sont formés et encadrés à cet effet. Les kits de gargarisme font leur entrée dans les maisons d’hébergement, les milieux de travail et les simples domiciles.
Un test peu coûteux et vite adopté
Les résultats ne tardent pas : le nombre de tests effectués en une journée croît de façon significative, alors que les délais de dépistage diminuent. Bref, la nouveauté aide à contrôler la propagation de la COVID-19. « Quand nous avons débuté, des gens venaient d’aussi loin que Trois-Rivières pour se faire tester! » De plus, l’initiative engendre des économies de 2 $ par prélèvement, sans compter celles liées aux ressources humaines.
La méthode développée par le Dr Dumaresq et son équipe s’est vite répandue au Québec. Aujourd’hui, malgré la fermeture des centres officiels de dépistage, elle est encore largement utilisée, en particulier dans les milieux de travail. Elle ouvre en outre des pistes de recherche, entre autres pour la détection d’autres virus respiratoires.
Que représente pour l’équipe le fait d’être finaliste au prix Santé et services sociaux? « Nous sommes vraiment heureux de cette nomination. La fierté des personnes qui ont participé de près au projet se répercute dans tout notre l’établissement. Elle crée un effet très rassembleur », conclut Jeannot Dumaresq.
Un outil fédérateur simplifie les demandes de permis pour réaliser des travaux qui empiètent sur les rues de Montréal. Un gain pour la population comme pour le personnel municipal.
La valse des cônes orange dans la métropole a de quoi donner le tournis. La Ville de Montréal autorise chaque année des milliers de chantiers dans ses rues. Jusqu’à tout récemment, cette frénésie de rénovation sur l’île occasionnait bien des maux de tête, sous la forme d’entraves multiples. « La gestion était difficile, en l’absence d’une vue globale des demandes de permis », résume Yassine Bentaleb, chef de division aux solutions d’affaires au Service des technologies de l’information.
Le nœud du problème : les « permis d’occupation temporaire du domaine public pour travaux » s’avéraient complexes à obtenir. Les citoyens et entrepreneurs devaient se plier aux différentes manières de faire des 19 arrondissements de Montréal pour décrocher le Saint-Graal!
Qui plus est, il était impossible de savoir si leur utilisation de l’espace souhaité entrait en conflit avec d’autres chantiers, cette information étant diluée. « Il nous fallait à la fois harmoniser les processus de demandes de permis et améliorer la gestion des interventions sur la voie publique », indique Yassine Bentaleb.
Cartographier les chantiers
La solution imaginée consiste en une application numérique : AGIR-permis. Basé sur des technologies libres (open-source), le nouveau système propose une vue cartographique qui permet de visualiser la localisation des entraves passées, actuelles et futures.
Lorsqu’une personne dépose une demande, elle obtient un portrait complet de sa requête avec le coût estimé qui en résulte. Et ce, en une semaine ou moins. De son côté, le personnel municipal bénéficie d’un tableau de bord à la fine pointe du progrès et mis à jour en temps réel.
Neuf mois d’efforts concertés, en pleine pandémie de COVID-19 de surcroît, ont été nécessaires pour mener à bien ce projet. En effet, les permis sont la chasse gardée des arrondissements et non de la ville centre. « Nous avons mis en place des comités de travail avec les différentes parties prenantes. Nous avons aussi formé une table décisionnelle avec les arrondissements où les propositions de changements devaient être entérinées », raconte le chef de division. Pour assurer une expérience optimale, même le cadre légal a dû être modifié!
Des permis délivrés plus vite
L’entrée en fonction d’AGIR-permis, en mars 2021, a déclenché une petite révolution. La Ville de Montréal a enregistré cette année-là près de 75 000 demandes. Malgré tout, le temps de traitement de ces autorisations a significativement diminué — elles sont désormais délivrées en majorité le jour même de leur requête. Le ratio des projets qui nécessitent une modification de permis, une tâche fastidieuse, a réduit de 48 % à 20 %. La Ville reçoit aussi un volume moindre d’appels à sa ligne de service à la population, le 311. Dorénavant, le temps de traitement des demandes par les agents est maintenant davantage consacré à des tâches à forte valeur ajoutée.
Cette performance attire l’attention de municipalités situées à proximité de Montréal. Des discussions se poursuivent afin de déterminer la faisabilité de l’implantation du système dans ces milieux.
D’ici là, le noyau dur d’une quinzaine de personnes qui a concrétisé AGIR-permis attend avec impatience le gala du 24 novembre prochain, lors duquel leur projet sera mis en valeur. « La coopération entre les divers acteurs impliqués dans ce dossier a été exemplaire, confie Yassine Bentaleb. Quel travail d’équipe! »
Vacciner des milliers de personnes en 10 minutes chacune, sans paperasse, sans contacts superflus, sans risques évitables? Une équipe de Montréal a relevé ce pari.
Début 2021, la première campagne d’immunisation contre la COVID-19 démarrait au Québec. Assurer son bon déroulement comportait des défis, en particulier dans les sites de vaccination massive. Le premier à ouvrir à Montréal, au Palais des congrès, relevait de la responsabilité du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal.
« L’ampleur de la tâche nous a amenés à repenser le processus standard de vaccination », explique Sergio Fernandes, directeur des ressources informationnelles de l’établissement. « Notre but était de rendre l’expérience la plus fluide, efficace et agréable possible, pour le personnel comme pour la population. »
Pour y parvenir, l’organisation a élaboré un système complémentaire et intégré à celui de Clic Santé : le Dossier vaccinal électronique. « Notre équipe s’est mise à la tâche pour adapter une technologie existante en partenariat avec TELUS Santé », relate le gestionnaire. Une douzaine de spécialistes en soins cliniques, médecine et informatique y collaboraient étroitement.
Une partie de l’équipe du projet du Dossier vaccinal électronique.
Degré de difficulté supplémentaire, le projet devait se concrétiser dans des délais très serrés. Les étapes se sont succédé en un temps record. Logistique, intégration, configuration, formations, tests… Trois semaines après le coup de départ, soit le 4 février, le Dossier vaccinal électronique était fonctionnel pour l’opération de santé publique qui débutait au Palais des congrès.
Mélanie Turcot, Nathan Lavigueur, Marie-Eve Brunelle et Sergio Fernandez.
Vaccinés en moins de 10 minutes
La procédure développée est simple. En arrivant, on présente sa carte d’assurance maladie à une borne, ce qui confirme le rendez-vous. Le système électronique rassemble les données nécessaires, que les intervenants ou intervenantes n’ont plus à saisir; elles sont ainsi standardisées et accessibles en temps réel dans différents systèmes. Cela aide également au suivi des doses à injecter ainsi qu’au recensement des gens en service sur le site.
« Le tout est automatisé et hautement sécurisé. Pas de questionnaire à remplir, pas de signature manuelle, pas d’impression de papier. On compte moins de 10 minutes pour un parcours de vaccination, puis 15 minutes de repos », précise Sergio Fernandes.
L’initiative procure une foule d’avantages. Elle offre un processus sans contact et sécuritaire, allège les tâches du personnel et améliore la traçabilité des vaccins. Par ailleurs, elle dresse un portrait complet de l’immunisation de chaque individu, de la prise de rendez-vous initiale jusqu’aux injections de rappel. « Le temps gagné nous permet d’humaniser l’expérience, par exemple en nous concentrant sur les personnes qui ont davantage de besoins. »
Un succès viral!
Le Dossier vaccinal électronique s’est vite étendu à d’autres régions. Le centre-ouest de Montréal, Laval, Lanaudière et les Laurentides l’ont adopté. Ensemble, leurs autorités sanitaires ont administré plus de 2,5 millions de doses à la population du Québec. Effet secondaire bénéfique, l’absence de papier durant cette opération a représenté des économies de plus de 50 000 $ par mois.
Convaincu des bienfaits de sa réalisation, le CIUSSS ne compte pas en rester là. Il mène une série de projets qui s’appuient sur cette méthode pour, par exemple, réviser des processus médicaux. Il guide en outre d’autres établissements qui désirent tirer profit de cette solution innovante, développée à vitesse grand V, mais avec rigueur.
C’est ainsi que les responsables du Dossier vaccinal électronique ont décroché une nomination au prix Initiatives numériques. « Nous sommes emballés, confie Sergio Fernandes. Cette place en finale souligne justement les efforts d’une équipe qui a travaillé d’arrache-pied. Notre course contre la montre a mené au succès! »
En regroupant ses services en ligne, Bibliothèque et Archives nationales du Québec facilite l’accès à 30 millions de fichiers numérisés. Et fait rayonner la culture d’ici!
Le 3 février, le roi de l’haltère, Victor Delamarre, présentera à Québec le tour qui l’a rendu célèbre : hisser une voiture dans une échelle. Et les salons de Pauline et Louise Bernard, sur l’avenue Oxenden à Montréal, regorgeront de fougères et de fleurs d’hiver pour le thé dansant du 5 février. Pour y aller, il faudra cependant remonter le temps, car tout cela se déroule… en 1923.
Voici un échantillon des nouvelles authentiques auxquelles donne accès le nouveau service numérique de Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ). En ligne, le public peut feuilleter en version originale La Presse, Le Soleil et bien d’autres journaux québécois, de la fin du 19e siècle jusqu’à aujourd’hui. Il peut repérer l’ancienne avenue Oxenden dans les plans d’époque. Et même vérifier l’identité des dames Bernard dans les registres de l’état civil!
« Dès le début du projet, nous avons placé l’utilisateur au centre du processus », précise Jean-François Gauvin, directeur de l’expérience et de la transformation numérique chez BAnQ. « Le public a été impliqué dans sa mise en œuvre afin qu’on réponde bien à ses besoins. La plateforme joint d’ailleurs des gens qui, habituellement, ne fréquentent pas les bibliothèques. »
Une seule adresse numérique
Depuis 2020, la Bibliothèque nationale, les Archives nationales et la Grande Bibliothèque partagent donc une même plateforme virtuelle. Un chantier de 2,5 M$ financé par le Plan culturel numérique du Québec du ministère de la Culture et des Communications.
Pascale Montmartin, cheffe de service des collections numériques, et Jean-François Gauvin, directeur de l’expérience et de la transformation numérique.
Les contenus numériques, jusque-là éparpillés dans une trentaine d’interfaces différentes, se trouvent maintenant en quelques clics. Ils sont aussi mieux référencés. Nombre d’internautes arrivent à la bibliothèque numérique par hasard, en introduisant un sujet dans un moteur de recherche. Ils tombent sur un document reproduit en pleine page qu’ils peuvent consulter sur une visionneuse efficace. Un système simple, qui invite souvent à poursuivre sa quête d’information.
La plateforme regroupe à ce jour plus de 30 millions de fichiers, dont 1,7 million de textes entièrement recherchables. Chaque mois apporte environ 400 000 nouveautés. Enregistrements vidéo, films, photos anciennes, registres judiciaires… Sans oublier les archives notariées qui aident les généalogistes à retrouver la trace de leurs ancêtres. Ces témoins de la culture québécoise sont plus faciles à découvrir grâce à leur partage sur des sites comme Canadiana et le Réseau francophone numérique. Ils pourraient l’être encore plus : BanQ envisage d’implanter des techniques d’intelligence artificielle, développées par l’Université du Québec à Rimouski, permettant de rendre lisibles les nombreux manuscrits numérisés.
Le public est au rendez-vous. BAnQ numérique a reçu plus de 7 millions de visites en 2021, contre 4,6 millions en 2020. Une croissance de 52 %! Le système allège en outre la tâche du personnel qui met les contenus en ligne et maintient le site.
Tout pour une société apprenante
L’accès au savoir ne s’arrête pas aux contenus du patrimoine québécois. BAnQ met à la disposition des internautes près de 230 services externes. Le public a ainsi la possibilité de lire des milliers de journaux à travers le monde, d’emprunter des romans récents ou de suivre des formations en ligne.
« La bibliothèque numérique contribue à ce que le Québec devienne une société apprenante, témoigne le directeur. Nombre d’outils d’autoformation sont disponibles, en langues, en bureautique, ou même en réparation mécanique. »
Voir ce projet en finale du prix Initiatives numériques s’avère valorisant pour l’équipe. « C’est l’aboutissement d’un immense travail de numérisation commencée il y a une vingtaine d’années, remarque Jean-François Gauvin. Indexés dans plusieurs moteurs de recherche, des millions de documents sont maintenant facilement accessibles. On assure ainsi leur pérennité. »
Face à la crise des opioïdes, des États de la Nouvelle-Angleterre mettent à profit l’expérience québécoise pour implanter des services de réduction des méfaits
« On sauve des vies! » Solène Lemay, coordonnatrice des affaires internationales au ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), est convaincue que le Québec contribue à secourir les usagers et usagères de drogues au-delà de ses frontières. Avec des partenaires, le Ministère accompagne des élus de Nouvelle-Angleterre dans la découverte des soins offerts ici, notamment les sites d’injection supervisée. La diffusion de cette approche moins répressive envers les personnes souffrant de dépendance est en voie de changer les politiques de ces États.
« Plusieurs élus se montraient très sceptiques lors de leur premier voyage à Montréal, en 2019, raconte la professionnelle. Ils pensaient que nous faisions la promotion de ces substances. Sur place, ils ont découvert que le personnel aide des gens souvent aux prises avec des maladies et des problèmes sociaux, comme la prostitution. Et qu’il n’y a pas d’utilisateurs de drogues concentrés autour des sites, ce qui pourrait causer des soucis de sécurité. »
Lors de leur visite, les représentants américains ont pu discuter avec des membres du MSSS, du ministère de la Sécurité publique, de la Ville de Montréal, de son service de police et de plusieurs organismes communautaires. Le ministère des Relations internationales et de la Francophonie coordonnait la rencontre. Les échanges ont fait ressortir une façon différente de s’attaquer à la crise des opioïdes : la réduction des méfaits. Une vision ancrée dans la stratégie québécoise de prévention des surdoses, renouvelée en 2022-2025.
Entretien de la délégation de Cambridge avec la mairesse de Montréal.Distribution de matériel à Boston.
Le Québec fait bouger la loi
Résultats? En juillet 2021, le Rhode Island a adopté une loi autorisant un projet pilote de site d’injection supervisé. C’est la première fois qu’un État américain prend ce genre de mesure, même si les États-Unis affrontent une hausse sans précédent du nombre de victimes des drogues. La Ville de Boston, dont l’ancien maire a participé à la visite de Montréal, songe aussi à cette approche, tout comme Somerville, en banlieue de la capitale du Massachusetts. De plus, en décembre 2021, le gouvernement fédéral américain a publié une loi modèle pour appuyer l’implantation de services similaires dans tout le pays.
« La situation devient vraiment intenable aux États-Unis, témoigne la coordonnatrice. On retrouve des gens qui se piquent dans la rue autour de plusieurs hôpitaux, un phénomène accentué par la pandémie. Dans ce contexte, les outils mis en place par le Québec aident les autorités américaines à trouver des solutions adaptées à leur réalité. »
Un rôle-conseil essentiel
Ce projet novateur démontre aussi la diversité du mandat du MSSS et de ses champs d’action. Le Ministère joue un rôle-conseil essentiel auprès des administrations de la Nouvelle-Angleterre et du ministère américain de la Justice. Il partage les bons coups de la province en matière d’acceptabilité sociale, de sécurité et de réglementation des services d’injection supervisée. De grandes nouveautés aux États-Unis, où aider une personne qui consomme peut encore engendrer des poursuites judiciaires.
L’expertise du Québec dans la lutte contre les méfaits causés par les dépendances mérite son titre de finaliste du prix Rayonnement international. « On a tellement travaillé pour mettre en place un système bienveillant pour les gens qui ont des problèmes de drogue, s’exclame Solène Lemay. L’ouverture d’élus américains de très haut niveau montre que nos efforts ont un impact. L’aide que nous apportons aux États-Unis permet aussi de renforcer notre collaboration dans d’autres domaines, notamment commerciaux. Il s’agit d’un projet vraiment exceptionnel! »
Coup d’éclat : Lobbyisme Québec s’est allié à une grande organisation internationale pour renforcer l’encadrement des activités qui visent à influencer les pouvoirs publics.
Il y a 20 ans, le Québec adoptait la Loi sur la transparence et l’éthique en matière de lobbyisme. Or, les pratiques et le contexte ont changé depuis 2002, ne serait-ce qu’avec l’apparition des réseaux sociaux. D’où le besoin, selon plusieurs spécialistes, de réviser les règles juridiques.
« C’est dans cette optique que s’inscrit notre projet », explique le commissaire au lobbyisme du Québec, Jean-François Routhier. En 2019, son organisme avait déposé à l’Assemblée nationale un rapport sur la réforme de l’encadrement du lobbyisme. « Nous souhaitions poursuivre le travail afin de renforcer la culture de transparence et d’intégrité dans le domaine. C’est essentiel pour bien servir les citoyens, en droit de savoir qui cherche à influencer les décideurs publics. »
Justement, au cours de 2020, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) met à jour les pratiques recommandées en la matière. Chez Lobbyisme Québec, l’adjointe exécutive à la direction, Isabelle Bélanger, lance alors cette idée : pourquoi ne pas proposer à ces as du sujet d’évaluer le projet de réforme?
Une évaluation internationale inédite
« À ma connaissance, ce genre de proposition ne s’était jamais vue », explique le commissaire. Ce sont avant tout les pays membres (au nombre de 38, incluant le Canada) qui traitent avec l’OCDE.
Après une première rencontre, l’OCDE accepte la demande avec enthousiasme. Pour réaliser son analyse, elle entame une vaste enquête sur l’état des lieux. Elle effectue une série d’entretiens avec 72 personnes pour un total de 31 heures de conversation. Elle tient aussi 5 ateliers menant à 12 heures de réflexion. Des élus et élues participent à l’exercice aux côtés de membres représentant divers organismes, groupes de recherche ou médias.
« Durant un an, une douzaine de personnes de notre bureau y ont travaillé activement, relate Jean-François Routhier. Échanges constants, discussions… La démarche de l’OCDE était tout à fait indépendante, mais nous l’avons accompagnée par notre connaissance du terrain, notamment pour convoquer les gens à sonder. »
Jean-François Routhier, commissaire au lobbyisme, Isabelle Bélanger, adjointe exécutive à la direction et Émilie Giguère, secrétaire générale et directrice des affaires institutionnelles et des communications.
L’OCDE rapporte l’expérience québécoise
En mars dernier, l’OCDE tenait un webinaire afin de présenter son rapport et ses constats. L’événement, réunissant plusieurs spécialistes, a attiré près de 200 participantes et participants à l’échelle de la planète. Cette tribune constituait une chance inestimable de faire rayonner l’expérience et l’expertise québécoise.
Qu’a permis cette collaboration unique? « D’abord, de cibler des pistes d’amélioration très concrètes de nos pratiques, explique le commissaire au lobbyisme. Ensuite, d’apprendre que notre projet de réforme est largement soutenu par les recommandations de l’OCDE. La législation québécoise compte d’ailleurs parmi les plus complètes en vigueur dans les pays membres. C’est rassurant pour un gouvernement. Pour les citoyens également. »
Par ailleurs, grâce à cette entente, le Québec se positionne comme pionnier en matière d’encadrement du lobbyisme sur le plan international. En effet, l’OCDE souhaite s’inspirer de cette expérience afin d’accroître la transparence des activités destinées à influencer les pouvoirs publics du monde. Le succès de cette première collaboration ouvre la porte à d’autres et favorise les échanges avec divers pays.
« Que notre petite équipe ait rendu cela possible, nous en sommes encore impressionnés », témoigne Jean-François Routhier. La nomination au prix Rayonnement international suscite la même réaction. « C’est une belle occasion de rappeler que l’encadrement du lobbyisme au Québec est enviable. Cela projette une image sociale très positive de chez nous. »
Un centre de services scolaire de Montréal a fondé le premier Bureau de statistiques et d’imputabilité du réseau de l’éducation. Qui en bénéficie en priorité? Les élèves.
Combien de profs manque-t-il dans cette école? Combien d’élèves risquent d’échouer leur cinquième secondaire? Combien de bâtiments sont occupés au maximum? Les chiffres foisonnent en éducation, mais prennent une éternité à analyser. Ce qui casse la tête de nombreuses directions d’école au Québec.
Le Centre de services scolaire Marguerite-Bourgeoys a réglé son problème en fondant le Bureau de statistiques et d’imputabilité, pionnier dans la province. L’équipe recueille des données cohérentes et fiables, puis en tire des outils pratiques pour les quelque 100 établissements qu’elle sert. Déchargé de ce fardeau, le personnel peut ainsi se concentrer sur sa mission pédagogique.
« C’est important de traduire les chiffres en données utiles à la prise de décision », précise Nancy Meilleur, conceptrice et coordonnatrice du Bureau. « Notre but n’est pas d’engloutir l’organisation sous une tonne de statistiques, mais de fournir un éclairage qui aide à gouverner. »
Rapports clé en main
L’équipe appuie ainsi des directions d’école, des services éducatifs ou des cadres en ressources humaines et financières. Elle s’assure de bien cerner leurs besoins. Puis, elle extrait des statistiques de documents ministériels ou internes, propose des indicateurs de gestion mesurables et produit un rapport clair. « On outille les gens pour qu’ils comprennent les chiffres. Clé en main! »
Un exemple : le tableau de bord des postes à pourvoir. Fini, la compilation à la main… Avec le service des ressources humaines, le Bureau a créé un système d’entrée de données branché à un bilan facile à lire. Le résumé des emplois vacants est accessible en temps réel.
Nancy Meilleur, coordonnatrice du Bureau de statistiques et d’imputabilité et son équipe d’analystes statistiques : Saida Renou, Steve Calonge et Huidong Cao (absente de la photo : Marie-Pier Cléroux Perrault)
Ces travaux profitent au personnel, mais aussi aux jeunes. Ainsi, le tableau des finissants et finissantes de cinquième secondaire résume les matières exigées pour le diplôme. Un code de couleur et un indice de risque accompagnent toute note insuffisante. « En une page, les directions voient leurs élèves vulnérables. Elles peuvent alors concevoir des mesures d’appui avec les enseignants. »
Des données pour le bien commun
Présenté comme un soutien aux équipes plutôt qu’une mesure de performance, le Bureau a vite rallié des adeptes. Son défi est technique : beaucoup d’outils, tel le système de paie, servent mal la collecte d’informations. Ses cinq spécialistes doivent aussi longuement échanger avec les partenaires sur le terrain pour comprendre comment les chiffres sont saisis. « Nous sommes experts en statistiques, eux en contenu. » Cette alliance engendre une réelle intelligence du domaine, et une culture des données au service du bien commun.
Des établissements scolaires ou collégiaux, tout comme le ministère de l’Éducation, s’intéressent à ce modèle, exposé dans La Presse. Le Centre partage volontiers son expérience. Nancy Meilleur recommande de ne pas faire de compromis sur la rigueur. Ce système nécessite un rodage de trois ans pour générer ses premières vraies retombées.
« Le Bureau n’est pas une recette, mais une philosophie », prévient-elle. Il s’inscrit dans une vision qui promeut la réussite étudiante par divers moyens. Cette approche, décrite dans des référentiels, avait d’ailleurs remporté le prix Éducation en 2021. Marguerite-Bourgeoys figure aujourd’hui parmi les trois centres de services scolaires où le taux de diplomation est le plus élevé au Québec.
En novembre, l’équipe des statistiques en lice pour le prix Éducation assistera en groupe à la cérémonie de remise des prix. « On sait combien le Bureau est apprécié à l’interne, résume Nancy Meilleur. Mais le fait que notre candidature soit finaliste est un honneur émouvant. »
Le Cégep de Shawinigan a installé une clinique-école en soins infirmiers dans un établissement de soins ambulatoires. Une formule de stages unique au Québec.
Il est 8 h à la clinique-école Santé Énergie du Cégep de Shawinigan. Une étudiante de deuxième année en soins infirmiers reçoit sa première patiente. L’octogénaire, opérée de la hanche il y a quelques jours, doit faire changer son pansement. Une fois le traitement effectué, la stagiaire vérifie si l’aînée bénéficie de l’aide nécessaire chez elle. Elle s’assure aussi d’un suivi en physiothérapie, tout en donnant quelques conseils de rééducation.
Depuis février 2022, la relève en soins infirmiers qui étudie à ce cégep dispose de six salles d’examen et d’un espace pédagogique situés dans une clinique ambulatoire. Le lieu relève du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec. C’est le CIUSSS qui a eu l’idée de cette collaboration, une première au Québec, en inaugurant de nouveaux locaux à Grand-Mère.
« S’impliquer dans une clinique ambulatoire donne l’occasion de toucher à des soins très variés, fait valoir Luc Grenier, coordonnateur de la clinique-école. Pansements avec succion pour drainer la plaie, antibiothérapie intraveineuse, médication intramusculaire… Sans oublier le travail avec des services professionnels externes, comme des ergothérapeutes ou des nutritionnistes. »
Plus de personnes traitées
Chaque jour, une douzaine d’étudiantes et d’étudiants effectuent des traitements sous la supervision du corps enseignant et des infirmières spécialisées. Dès leur deuxième session, ils jouent un rôle actif dans la clinique-école, où ils réalisent plusieurs stages. Des étudiants de première année aident les finissants à défaire un pansement, par exemple, ou à immobiliser un membre. L’établissement peut ainsi soigner 50 personnes supplémentaires toutes les semaines.
Élodie Pintal observe l’enseignante Karine Beaudoin donner des soins à la patiente Lise Trépanier.Rosalie Lafrenière et Amanda Lambert, étudiantes à l’œuvre à la clinique-école.
Pour l’instant, le personnel infirmier en devenir se charge des soins courants, surtout des suivis après une opération. Un autre volet s’ajoutera dès le 1er janvier 2023, soit la clinique de proximité. Sous le regard de l’enseignante ou de l’enseignant, la relève traitera des gens aux prises avec un problème urgent, comme une toux persistante ou des douleurs localisées.
Raffiner le jugement clinique
Cette plongée dans la réalité des soins ambulatoires offre une expérience autre que celle vécue habituellement par les stagiaires. « À l’hôpital, nos étudiants ne voient pas autant de cas différents qu’à la clinique-école, souligne Luc Grenier. Assurer un suivi du quotidien de leur patient, parfois en perte d’autonomie, les aide aussi à développer leur jugement clinique. Cela leur fait prendre conscience de la responsabilité qui incombe au personnel infirmier. »
Le contact avec une main-d’œuvre expérimentée forme les novices tout en les inspirant. « En travaillant directement avec des infirmières praticiennes spécialisées en première ligne, nos étudiants peuvent imaginer un jour aller à l’université pour se spécialiser », poursuit le coordonnateur.
Que ce modèle pédagogique novateur figure parmi les finalistes au prix Éducation étonne peu. En 2015, l’équipe de Luc Grenier avait remporté ce même prix en implantant un centre virtuel d’immersion clinique, adopté depuis par une trentaine de collèges. « Déjà, des établissements d’enseignement, comme ceux de Rimouski, Trois-Rivières et Matane, ont montré leur intérêt pour ouvrir une clinique-école, lance fièrement ce pionnier. Au Cégep de Shawinigan, en formant nos élèves, nous avons à cœur l’amélioration des soins de santé partout au Québec! »
La formation Rebon numérique permet à des personnes aux profils diversifiés de pourvoir des postes en technologie de l’information. Étudiez et pressez la touche Entrée vers une carrière prometteuse!
Chaque année, un nombre important de postes en technologies de l’information (TI) demeurent vacants au Québec. Avec la pandémie de COVID-19, l’écart s’est encore creusé. Comment le combler?
Une équipe du Cégep de Sainte-Foy a implanté une solution inventive. « C’est parti d’un rêve, ce projet », lance Nicole Richard, directrice du secteur Formation continue et service aux entreprises. L’idée? Faire coïncider les besoins urgents du marché avec ceux de gens qui avaient éprouvé certaines difficultés dans leur cheminement scolaire et professionnel. Et ainsi, donner espoir à tout le monde.
Plusieurs programmes éducatifs existent dans le domaine numérique, mais ils rejoignent une clientèle qui correspond au profil traditionnel, relate Nicole Richard. « Pourquoi ne pas tenter d’approcher celles et ceux qui semblent plus éloignés de ce choix de carrière et leur donner les moyens d’envisager cette possibilité? » Pensons aux personnes immigrantes ou en difficulté d’apprentissage, par exemple.
On redémarre le système!
En 2020, l’équipe développe une offre pédagogique promue par la Fédération des cégeps et inspirée des dernières connaissances sur les parcours favorisant l’intégration professionnelle. Elle constitue un réseau d’entreprises prêtes à accueillir des stagiaires. D’autre part, elle contacte les milieux communautaires en lien avec des gens qui désirent se qualifier à l’emploi. Elle conclut aussi une entente avec le Cégep de Chicoutimi afin qu’il agisse comme partenaire d’expérimentation. « La réponse a été plus que positive. Tous ont cru en notre projet. »
Ce qui distingue Rebon numérique? C’est une formation courte, axée sur la pratique. Deux parcours sont proposés : Initiation (quatre semaines) et Métiers (sept mois). Mentorat, classe inversée, autoapprentissage, apprentissage par les pairs, font partie des outils éducatifs. De plus, le programme est conçu pour favoriser la persévérance. « Nous veillons tant au savoir-faire qu’au savoir-être, précise Nicole Richard. Les étudiantes et étudiants sont guidés non seulement par des experts du numérique, mais aussi par des spécialistes qui les épaulent sur le plan psychosocial. Les liens qui se tissent sont très personnalisés. »
De gauche à droite : Manon Chapdelaine du Cégep de Chicoutimi, Nathalie Larose et Monique Provencher du Cégep de Sainte-Foy, Johane Duhaime du Mouvement Desjardins, Nicole Richard du Cégep de Sainte-Foy, Bernard Tremblay de la Fédération des cégeps, André Gobeil du Cégep de Chicoutimi, Joëlle Boutin, députée de Jean-Talon. Absente : Audrey Murray de la Commission des partenaires du marché du travail.
Des technologues dernier modèle
Une première cohorte débute à Sainte-Foy en août 2021 et à Chicoutimi en novembre suivant. En date du 31 mai 2022, Rebon numérique comptait en tout 110 participants. Ceux du parcours Initiation ont poursuivi à 84 % vers le parcours Métiers. Le taux de rétention dans ce dernier atteint 86 %. Parmi les finissants, 70 % occupent un emploi en TI, dont 60 % dans leur milieu de stage.
Le rêve s’est réalisé au-delà des espérances. « Le tiers des participants sont des femmes, habituellement sous-représentées dans ce type de programme », se réjouit Nicole Richard. Gage de réussite, d’autres cégeps emboitent le pas. Celui de Shawinigan est en voie de déployer le modèle tandis qu’une dizaine d’établissements ont entrepris des démarches. « Notre souhait serait d’élargir l’offre à toutes les régions du Québec. » Plus encore, le concept Rebon pourrait s’appliquer à divers secteurs en pénurie de main-d’œuvre. Pourquoi pas un Rebon santé ou petite-enfance?
Nicole Richard n’oubliera pas l’expérience de sitôt. « La beauté de ce projet est de voir les étincelles et la fierté dans les yeux des étudiantes et des étudiants lorsqu’ils terminent leur parcours, s’émeut-elle. C’est touchant de savoir que ce qui favorise leur réussite est récompensé par une nomination au prix Éducation. »
Une recherche donnant la parole à 300 personnes de partout au Québec montre la complexité de l’itinérance. Et ouvre la voie à de meilleures mesures de prévention.
Jocelyn Gadbois, conseiller en itinérance au ministère de la Santé et des Services sociaux, a vécu un moment de grâce en assistant avec des collègues à une présentation de Sue-Ann MacDonald. Cette professeure en travail social de l’Université de Montréal leur dévoilait les résultats de l’étude exhaustive visant l’approfondissement des connaissances sur les personnes sans domicile fixe qui constitue un des volets importants du Deuxième portrait de l’itinérance au Québec, produit par le Ministère.
« Tout le monde écoutait les portraits de vie présentés en toute simplicité par la coordonnatrice de la recherche, témoigne-t-il. À la fin, il y a eu un grand moment de silence. Les participants avaient mis des visages sur les personnes concernées par l’action des pouvoirs publics. »
Sue-Ann McDonald, aussi membre du Centre de recherche de Montréal sur les inégalités sociales, les discriminations et les pratiques alternatives de citoyenneté (CREMIS), a parcouru le Québec pour découvrir les différentes trajectoires des individus dépourvus de chez-soi. Une itinérance souvent cachée en région, où des gens campent l’été et passent d’un sofa à l’autre l’hiver venu. Une itinérance au visage autochtone dans certains quartiers de Montréal. Une itinérance parfois liée à l’augmentation du prix des logements ou à des failles administratives…
L’équipe de recherche: Sue-Ann MacDonald, Stéphanie Houde, Philippe-Benoit Côté, Annie Fontaine et Élisabeth Greissler.
La prise de conscience de la responsabilité des différents acteurs du milieu des services sociaux a joué un rôle déterminant dans le Plan d’action interministériel en itinérance 2021-2026. Le portrait de l’itinérance dessiné par l’équipe de recherche a donc permis de mobiliser l’ensemble des acteurs impliqués dans la lutte contre ce phénomène social. L’un des engagements porte sur le dialogue intersectoriel nécessaire pour empêcher que des gens n’aboutissent sur le trottoir.
L’équipe de recherche, qui regroupe quatre professeurs et une professionnelle, a rencontré 300 personnes sans toit et des organismes communautaires dans toutes les régions du Québec. Au passage, elle a mis le doigt sur certaines des causes qui précipitent des individus vers la rue.
Sortis du système, entrés dans la rue?
Plusieurs récits de vie témoignent entre autres des effets désastreux de sorties mal planifiées d’établissements publics. Pour les adultes qui émergent des centres jeunesse à leur majorité, l’installation peut s’avérer ardue. Même chose pour les détenus libérés de prison une fois leur sentence purgée. « Quelqu’un avec un casier judiciaire a beaucoup de difficulté à trouver un emploi ou un logement. Il faut implanter les meilleures pratiques d’accompagnement pour permettre à ces personnes de réintégrer la société », raconte Jocelyn Gadbois.
Agir en amont de l’itinérance
Déjà, certaines mesures ont été implantées, soutenues notamment par le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale. Les établissements carcéraux et centres jeunesse sont incités à présenter à leur clientèle les programmes d’aide financière de dernier recours. Le but : éviter qu’une personne ne se retrouve à la rue peu de temps après avoir gagné ou regagné son autonomie. Ailleurs, il peut s’agir de planifier une consultation médicale en santé mentale, dont le suivi sera assuré par un agent de liaison.
Que ce rapport sur les populations sans abri mérite une nomination au prix Collaboration scientifique comble Jocelyn Gadbois. « Cela montre l’importance de mener des recherches qualitatives pour décrire la complexité du vécu des gens, témoigne-t-il. Cette reconnaissance prouve aussi que le gouvernement, qui dispose d’une politique de l’itinérance depuis 2014, s’est doté de bons outils. Il peut ainsi prendre les meilleures décisions possibles face à cet enjeu. »
Co-Vie propose des services de réadaptation aux personnes atteintes de COVID longue. Ce projet précurseur est né d’une collaboration innovante entre le milieu de la recherche et le réseau des services publics en santé.
Selon des données conservatrices, 10 % des gens ayant contracté la COVID-19 souffriraient de sa forme longue. Au Québec, cela représenterait à ce jour plus de 100 000 personnes aux prises avec une variété de symptômes invalidants, déroutants pour l’appareil médical.
« Nous avons rapidement constaté que ces personnes avaient des besoins auxquels nos pratiques habituelles ne répondent pas. Elles se sentaient frustrées et abandonnées, d’où l’urgence de développer des services adaptés pour leur venir en aide », relate Sophie Poirier. Elle est directrice adjointe des services multidisciplinaires et de l’enseignement universitaire au Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) de la Montérégie-Ouest.
Parallèlement, Simon Décary, professeur à la Faculté de médecine et des sciences de la santé de l’Université de Sherbrooke, entamait une recherche au Centre. Le sujet? Les soins de réadaptation pour les patients atteints de la COVID longue. « C’est autour de nos intérêts communs que Co-Vie s’est coconstruit », précise la coordonnatrice du projet.
Associer recherches et soins
En janvier 2021, les partenaires entament leur collaboration. Chaque semaine, ils échangent sur l’avancement de la recherche et sur le développement de l’offre de services. Les données récoltées auprès de patients volontaires, d’abord des employés du CISSS en absence prolongée due à la COVID-19, alimentent le projet. Cette méthode inédite permet d’implanter rapidement des interventions pertinentes.
Dans les mois suivants, l’équipe du CISSS établit avec des cliniques privées en physiothérapie et en ergothérapie des partenariats qui incluent des formations. Elle outille également sa communauté de pratique. « Simon agissait comme vigie scientifique, tandis qu’on relayait les connaissances les plus récentes dans nos réseaux professionnels. »
La gamme de soins ainsi bâtie couvre un champ étendu d’expertises, sans négliger les aspects psychosocial et nutritionnel de la maladie. À cela s’ajoute la documentation et des vidéos publiées sur le site Web dédié au projet. Dès son lancement, en juin 2021, la clinique connaît un succès considérable. « La réaction a été fulgurante! Des gens de toutes les régions nous interpellaient. Nous étions les premiers au pays à offrir ce genre de service, nous ne suffisions pas à la demande. »
Un modèle pour traiter la COVID longue
Heureusement, Co-Vie a inspiré de multiples initiatives. Des CISSS et CIUSSS d’autres régions développent des ressources à leur tour. L’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux a produit des recommandations à l’intention des spécialistes du domaine. En outre, le ministère de la Santé et des Services sociaux a annoncé la création d’une quinzaine de cliniques spécialisées en COVID longue et en maladie de Lyme, laquelle présente plusieurs similarités.
Dans tous ces cas, l’équipe Co-Vie a agi à titre de consultante. Elle est considérée comme une référence, ici et ailleurs. « Simon, qui entretient des liens avec l’Organisation mondiale de la santé, nous confirme que celle-ci s’inspire de nos travaux pour jeter les bases des meilleures pratiques internationales », indique la coordonnatrice.
Même s’il reste du chemin à faire pour comprendre la COVID longue, le projet Co-Vie redonne espoir aux malades et améliore leur qualité de vie. Pour l’équipe, se retrouver parmi les finalistes du prix Collaboration scientifique est un bel encouragement. « Créer une offre de services rapidement, en contexte pandémique, dans un domaine où tout était à inventer a demandé une grosse somme d’énergie, confie Sophie Poirier. Une telle reconnaissance, ça fait du bien! »
La contribution d’un centre de recherche à un collectif de fonctionnaires municipaux spécialisés en immigration aide des villes québécoises à intégrer tous les groupes à leur population.
Depuis 2015, le Québec dispose d’une force inédite pour faciliter l’inclusion des personnes issues de l’immigration et contribuer à la cohésion sociale en contexte pluriethnique. Le Réseau des municipalités en immigration et en relations interculturelles (REMIRI) réunit des professionnelles et professionnels d’une vingtaine de municipalités à l’affût des meilleures pratiques. Un regroupement de gens motivés à promouvoir le vivre-ensemble.
« Le Réseau reflète une volonté de ces responsables de partager leur expertise pour inclure les diverses communautés culturelles dans leur ville », témoigne Bob White, directeur du Laboratoire de recherches en relations interculturelles (LABRRI). Ce groupe de recherche rattaché à l’Université de Montréal contribue régulièrement aux travaux du collectif. Rapidement, le REMIRI s’est rapproché du monde de la recherche pour prendre du recul sur les politiques menées ici et pour découvrir les bons coups accomplis ailleurs.
« Nous sommes, au Québec, les champions de la concertation entre municipalités, organismes communautaires et milieu universitaire, poursuit le professeur en anthropologie sociale. Ces dernières années, le réseau nous a suggéré plusieurs études que nous avons ensuite réalisées. »
Vivre ensemble : les meilleures pratiques
L’une d’elles, lancée à Sherbrooke, compare et analyse des politiques municipales en matière d’intégration de partout dans le monde. Le LABRRI a constitué une base de données sur les expériences vécues ailleurs. Comment lutter contre les discours haineux? Quel rôle l’art peut-il jouer pour lier des gens d’origines diverses? De nombreuses questions que se posent les villes trouvent réponse grâce aux collaborations avec ce groupe de recherche.
Cette alliance entre chercheurs et professionnels en relations interculturelles contribue à la mise au point d’outils et d’analyses sur le vivre-ensemble dans les collectivités. Elle facilite aussi la résolution de problèmes concrets. Par exemple : réduire les risques d’incendie liés à l’utilisation de bougies dans des garde-robes, transformées en autels religieux. Au fil des discussions impliquant une quinzaine de villes, les membres du réseau ont pu bénéficier d’approches de communication déjà testées avec succès, notamment à Vaudreuil-Dorion.
Le LABRRI s’apprête d’ailleurs à publier aux Presses de l’Université du Québec un livre sur les politiques interculturelles implantées dans la province. Il y examinera des cas issus de tout le territoire, pas uniquement des grandes agglomérations.
Un réseau qui fait école
Le REMIRI s’est joint au programme de Cités interculturelles du Conseil de l’Europe en décembre 2021, une première dans le monde francophone et dans les Amériques. Le collectif représente d’ailleurs le Canada dans une recherche associant notamment les villes de Melbourne et de Barcelone.
Le REMIRI permet aussi une meilleure communication avec l’appareil administratif gouvernemental. En discutant entre collègues, les responsables des dossiers interculturels ont amélioré les demandes de financement déposées par les municipalités. En retour, le personnel ministériel y a réagi de façon plus uniforme et cohérente. Par ailleurs, le ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration participe aux réunions depuis 2020.
La nomination de cette communauté de pratique comme finaliste au prix Collaboration scientifique a surpris Bob White. « Avec des membres du réseau situés à Sherbrooke et à Gatineau, on a sauté en l’air, se réjouit le chercheur. Cette reconnaissance témoigne de la portée de notre partenariat, mais aussi, de l’importance du rôle que jouent les fonctionnaires pour rendre les villes plus inclusives. »
Grâce à une plateforme innovante du ministère de la Cybersécurité et du Numérique, la population peut désormais signaler les lacunes dans la protection des applications et des sites Web gouvernementaux.
Août 2021 : un informaticien découvre une faille de sécurité dans l’application Vaxicode que le gouvernement vient tout juste de lancer. Cet outil technologique permet de télécharger les preuves vaccinales et de présenter un code QR obligatoire pour accéder à certains lieux publics en cette période d’éclosion de COVID-19. En quelques heures, l’homme arrive à fabriquer de faux certificats de vaccination pour des personnes fictives. Il tente de joindre les responsables du système pour les aider à colmater la brèche, mais sans succès. Il sonne alors l’alerte dans les médias. Un acte risqué, car pirater un site, même dans un but éthique, demeure un acte illégal passible de lourdes sanctions…
Voilà exactement le genre d’histoire que le Centre gouvernemental de cyberdéfense du ministère de la Cybersécurité et du Numérique préfère ne pas voir survenir. D’où son nouvel outil visant à encadrer l’exercice de la vigilance citoyenne.
Cybersécurité : l’affaire de tous
« Cela faisait déjà plusieurs mois que nous préparions une plateforme sécurisée de signalement des vulnérabilités », rappelle Francis Provencher, directeur de la prévention, de la détection et de la gestion des incidents au Centre. « Cet événement déclencheur a accéléré sa mise en place. Les experts en sécurité ou les citoyens qui découvrent des points faibles peuvent les révéler de façon anonyme, en bénéficiant d’une forme d’immunité. Il leur faut cependant respecter les règles de conduite spécifiées sur le portail. »
Pour ce faire, la personne doit d’abord se rendre sur la plateforme. Elle y a accès à un formulaire en ligne pour rapporter tout risque de cyberattaque ou d’atteinte à la confidentialité détecté sur les systèmes informatiques du gouvernement. Cela concerne aussi bien des serveurs de fichiers que des applications, des sites Web, des services numériques offerts au public ou des plateformes collaboratives.
Cette contribution citoyenne est bénévole. Elle peut venir d’un peu partout dans le monde, puisque la plateforme possède une version anglaise. Pour des jeunes qui démarrent dans la profession, c’est l’occasion d’étoffer leur portfolio et de se faire connaître des spécialistes de la cybersécurité. On peut même postuler pour un poste au Ministère. Le gouvernement demande en échange de ne pas consulter les données exposées par la faille repérée et de garder cette dernière confidentielle.
Une initiative novatrice du Québec
Depuis sa mise en place, il y a un an, la plateforme a déjà reçu 210 signalements. Après vérification par le personnel du Centre, 70 points faibles ont pu être corrigés. Inspiré des meilleures pratiques des entreprises privées, cet outil contribue donc à la sécurité des services numériques et au renforcement de leur résilience. Il permet aussi au Québec d’afficher sa position de chef de file en matière de cybersécurité, car aucune autre instance gouvernementale au Canada ne possède un tel dispositif. L’État fédéral a d’ailleurs signalé son intérêt pour l’expérience québécoise.
La nomination au prix Fonction publique de cette réalisation, qui a mobilisé une vingtaine de personnes au Centre gouvernemental de cyberdéfense, réjouit Francis Provencher. « Des employés de différents horizons et ministères ont participé à l’élaboration de la plateforme pour répondre à des enjeux éthiques, légaux, de communication et de sécurité informatique, explique-t-il. C’est une belle marque de confiance pour l’équipe. La preuve que cela vaut la peine de mettre en place des concepts innovants. »
En facilitant la collaboration de divers organismes, un programme de financement fédéral aide les Premières Nations à concrétiser les initiatives économiques qui leur tiennent à cœur.
« Il y a un train qui passe, il faut le prendre! » Voilà comment Persica Lavoie-Dubé, gestionnaire en développement économique, décrit la force d’un programme que pilote le Bureau régional du Québec de Services aux Autochtones Canada. Son nom : l’Initiative sur les partenariats stratégiques (IPS).
Cet outil de liaison entre une vingtaine de ministères fédéraux donne un appui aux communautés des Premières Nations et inuites pour déployer leurs ailes dans des domaines comme les mines, les forêts ou le tourisme. Des thèmes identifiés comme porteurs par des instances autochtones. Informé du projet d’un promoteur, un agent démarche ensuite les divers paliers gouvernementaux, les entreprises privées et les organismes locaux pour repérer des partenaires potentiels. Cette approche de guichet unique, axée sur la cogestion et la gouvernance inclusive, existe depuis 2010, mais son effet multiplicateur s’accentue. De 2018 à 2022, 147 projets ont ainsi vu le jour au Québec, dotés d’investissements de presque 30 M$.
Les petites communautés ont parfois besoin d’accompagnement, témoigne Persica Lavoie-Dubé. « Avant, les autochtones devaient payer des bureaux d’avocats à grands frais pour conclure des ententes avec les compagnies souhaitant s’installer sur leur territoire. Aujourd’hui, ils disposent de plans de négociation déjà mis au point. Ça leur permet d’associer une entreprise à la construction d’un aréna, de fournir des services de transport locaux, ou encore d’obtenir des formations pour leur population. »
Une économie ancrée dans le territoire
L’initiative touche plusieurs domaines. Depuis 2018, l’IPS Forêt en valeur, développée avec le Centre de foresterie des Laurentides de Ressources naturelles Canada, favorise ainsi la bioéconomie forestière, qu’il s’agisse de produire de la biomasse ou de transformer le bois. Une quinzaine de groupes ont pu lancer des projets dans ce domaine.
Axée sur les besoins locaux, la mesure met véritablement l’expertise des ministères fédéraux au service des autochtones. Ainsi, grâce à l’IPS Trésor du Nord, une minière comme Tata Steel s’engage à accueillir des jeunes autochtones sur les sites d’extraction, puis à les intégrer dans les équipes de travail. Une opportunité très intéressante dans certaines collectivités isolées qui disposent de peu d’emplois.
Initiatve Forêt en valeur – Construction Tshiuetin – Utilisation du bois dans le secteur de la construction. Crédit photo : Mathieu Dupuis Initiative Trésor du Nord – Minière Tata Steel.
Autre exemple? Le développement d’une offre touristique. Une communauté innue sur la Basse-Côte-Nord rêve d’un navire pour emmener les visiteurs à la découverte d’un site de campement traditionnel. L’IPS Tourisme autochtone l’aide à trouver des partenaires financiers pour concrétiser ce projet, ou encore pour bâtir un circuit culturel avec des soirées de chant et de l’artisanat local. Les services fédéraux offrent un soutien à l’élaboration de plans d’affaires et à l’obtention des autorisations nécessaires. En quelques années, 250 activités touristiques ont ainsi fleuri à travers les Premières Nations du Québec.
Toujours à l’affût des occasions d’affaires, les membres du réseau ont récemment lancé l’IPS Initiative verte. Cet outil permettra aux Premières Nations ou aux Inuits de prendre leur place dans l’économie des énergies renouvelables, domaine en pleine expansion.
Que cette initiative se classe parmi les finalistes au prix Fonction publique réjouit Persica Lavoie-Dubé, qui mesure le chemin parcouru. « Au début, peu de partenaires financiers acceptaient de travailler avec les communautés autochtones, se souvient la gestionnaire. C’est donc très gratifiant de voir les IPS ainsi reconnues, car elles participent véritablement à l’essor des collectivités. Cela remplit le cœur. »
Simplifer les procédures de renouvellement du permis de conduire pour les 75 ans et plus peut-il se traduire en gains pour la société? Deux organisations se sont unies pour le démontrer.
Jusqu’à tout récemment, les automobilistes à l’aube de leur 75e anniversaire de naissance recevaient un avis de la Société d’assurance automobile du Québec (SAAQ) les obligeant à se soumettre à des examens médical et visuel. La méthode, établie depuis au moins 30 ans, était-elle efficace? En réalité, elle engendrait stress, frais et perte de temps pour les aînés ainsi qu’une pression sur le réseau de la santé, déjà fortement sollicité. Sur les 55 000 personnes testées annuellement, moins de 1 % voyaient leur permis révoqué.
« Les limites induites par la pandémie nous ont incités de revoir cette formule, en partenariat avec le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) », explique Jean-Philippe McKenzie, vice-président à l’accès sécuritaire au réseau routier de la SAAQ. « L’ancien processus faisait écho à une idée reçue associant les conducteurs âgés à plus de danger. Or, des études démontrent qu’il n’en est rien; ces conducteurs sont sous-représentés dans les collisions de la route. »
Vérifier la santé plutôt que l’âge
En réalité, l’état de santé plutôt que l’âge doit déterminer le besoin de suivi. « En renversant une pratique discriminatoire, nous avons remplacé la présomption de risque généralisé par la confiance envers l’usager et sa responsabilisation. »
À partir de 2020, la SAAQ et le MSSS ont joint leurs efforts pour opérer cette réforme. Les travaux étaient menés par une vingtaine de personnes auxquelles se sont ajoutées quelques dizaines de collègues au fil du temps.
Rachel Tremblay, cheffe de division à la Direction de l’accompagnement en comportement et en santé des clients, en ligne avec les clients.L’équipe de suivi et analyse des résultats : Rachel Tremblay, Nicoleta Timis, Sandra Bérubé, Renée Jobin, Caroline Couturier, Sonia Gagnon et Éric Martin.
En 2021, le groupe a d’abord envoyé un formulaire d’autodéclaration de l’état de santé à un groupe de 1 000 conducteurs et conductrices atteignant les 75 ans. Seules les personnes présentant une condition médicale pouvant être incompatible avec la conduite sécuritaire d’un véhicule routier ont été soumises à des examens. « Les rétroactions nous ont permis de peaufiner l’outil, indique Jean-Philippe McKenzie. L’équipe a aussi constaté que les répondants transmettent des données très fiables. Il y a corrélation entre la proportion des conditions de santé qu’ils déclarent et les taux populationnels officiels. »
Le comité de gestion du projet : Geneviève Caron, Nicoleta Timis, Caroline Fraser, Shifra Desjardins-Arsenault et Glen Watson.
La méthode est dorénavant instaurée à la grandeur du Québec. Le Réseau FADOQ et diverses associations de gens à la retraite, entre autres partenaires, ont contribué à la faire connaître auprès de leurs membres. Par sa simplicité, la formule séduit notamment le public, qui aura la possibilité de remplir le questionnaire en ligne en 2023.
Allégement pour le système de santé
De fait, le projet fait passer de 55 000 à 9 000 annuellement le nombre d’individus de 75 ans devant rencontrer du personnel professionnel à des fins d’évaluation. Cette baisse se traduirait par 46 000 heures libérées dans le système de santé, donc par un meilleur accès aux soins pour la population québécoise.
À ce jour, plusieurs organisations se sont montrées intéressées par cette approche qui considère les usagers comme des partenaires. « Notre projet les inspire parce qu’il démontre que placer le client au cœur de nos actions, en lui faisant confiance, peut s’avérer très porteur. De même, il est un bel exemple des résultats obtenus lorsqu’on défait les silos pour œuvrer en équipe gouvernementale élargie. »
La nomination au prix Fonction publique constitue une preuve du chemin parcouru. « C’est une récompense encourageante, car pour mener ce projet, il a fallu remettre en question une pratique très bien ancrée, souligne Jean-Philippe McKenzie. Cela vaut la peine de sortir des sentiers battus! »
Contrer la pénurie de personnel infirmier dans les centres d’hébergement en instaurant un externat qui valorise ce travail? En Estrie, une équipe a relevé le défi.
Novembre 2020. À son assemblée générale annuelle, l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec nomme des priorités. Parmi elles, pallier le manque de main-d’œuvre et accroître la pratique en centre d’hébergement et de soins de longue durée. Deux enjeux qui redoublent d’importance en contexte pandémique.
Présents à l’événement, des membres du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de l’Estrie — Centre hospitalier de l’Université de Sherbrooke (CHUS) veulent agir. « Nous étions d’autant plus concernés que les personnes aînées comptent pour 75 % de notre clientèle », indique Élise Lacombe, conseillère-cadre clinicienne à la direction des soins infirmiers du CIUSSS de l’Estrie — CHUS. Sans attendre, elle et une douzaine de collègues se mettent à la tâche, avec l’appui de leur direction. Leur but : recruter et retenir la relève infirmière dans les centres d’hébergement de soins de longue durée.
« L’exercice infirmier en CHSLD gagne à être connu, s’enthousiasme la responsable du projet. Il est riche et stimulant, notamment grâce aux liens qui se tissent avec les résidents et leur famille. Aussi, parce qu’on y développe une expertise clinique très approfondie. »
Dix semaines pour découvrir les CHSLD
Ainsi naît l’idée d’un externat obligatoire en CHSLD. « À l’issue de leur première année au baccalauréat en sciences infirmières, les candidates et candidats effectuent un stage dans le milieu de leur choix. Jusqu’ici, le tiers seulement optaient pour un centre d’hébergement. » L’équipe fait le pari qu’une immersion incluse dans le cursus inspirera des carrières pas envisagées autrement.
Cela dit, obliger n’est pas contraindre. L’expérience repose plutôt sur la plus-value qu’elle apporte. Les stagiaires profitent d’un tutorat individuel et de l’assurance que leur travail ne servira pas à pallier l’absence de membres du personnel. Leurs tâches sont par ailleurs exclusivement centrées sur le développement de leur expertise professionnelle spécifique, différente de celle des auxiliaires, par exemple. Ces éléments novateurs bonifient la formule des habituels séjours d’apprentissage.
En un temps record, le comité établit les ponts requis entre l’Université de Sherbrooke et les CHSLD partenaires. Le programme repose sur une documentation complète, une vidéo promotionnelle, une formation rigoureuse des tuteurs et tutrices ainsi qu’une coordination exemplaire des personnes impliquées. Dès mai 2021, une cohorte de 60 externes s’y engage pour 10 semaines.
Une partie de l’équipe lors de la remise des Prix d’excellence du réseau de la santé et des services sociaux, en mai 2022 : Nathalie Sheehan, Kathleen Savard, Audrey Perron, Élise Lacombe, Karine Guignard, Candice Fecteau-Harbour, Anik Belleville, Noémie Nicol-Claver, Sylvie Forest et Stéphan Tremblay, PDG du CIUSSS de l’Estrie-CHUS.
Habileté clinique et ouverture d’esprit
« Nous étions convaincus de la valeur de notre projet. Et les retombées vont au-delà de nos espérances », se réjouit la responsable. Les résultats révèlent que 83 % des externes disent avoir apprécié leur expérience d’externat et que l’ensemble a eu la perception d’avoir amélioré significativement ses habiletés cliniques et ses capacités à exercer du leadership. De plus, 79 % de ces personnes ont continué l’externat en CHSLD pendant leurs études pour répondre aux besoins de la crise sanitaire et 56 % considèrent désormais la possibilité d’y faire carrière.
Le projet a été reconduit en mai dernier. Assuré de pérennité, il suscite l’intérêt d’autres CIUSSS et organisations du Québec. Il résonne même à l’international. « Tous les pays dont la population vieillit peuvent gagner de cette approche. »
L’initiative s’attire aussi les honneurs. Elle a été primée à l’édition 2022 des Prix d’excellence du réseau de la santé et des services sociaux. Ses responsables avouent leur fierté de se trouver en lice aux Prix d’excellence de l’administration publique dans la catégorie Gestion des ressources humaines. « C’est une récompense prestigieuse. Nous y voyons une reconnaissance du travail essentiel et de l’expertise unique de tout le personnel infirmier en CHSLD », conclut Élise Lacombe.
La Ville de Montréal a un plan pour aider les groupes sous-représentés à accéder aux postes de pouvoir. Une stratégie en gestion des talents qui profite à toute la société!
En juin 2020, la Ville de Montréal recevait un rapport sur le racisme et la discrimination dans ses services. Les constats ne portaient pas aux célébrations. Environ 32,9 % de la population de la métropole appartient à une minorité visible ou ethnique. Or, ces gens ne forment que 22,9 % du personnel municipal promu en 2017, et seulement 2 % des cadres de direction. Comment changer le cours de l’histoire?
Pour bien remplir sa mission, une administration doit refléter la communauté qu’elle représente. Montréal a donc ajouté à ses actions pour la diversité une initiative plus hardie : la Stratégie de gestion de talents inclusive. Cette mesure dotée d’un budget de 100 000 $ par année vise à accélérer la progression de carrière des individus à haut potentiel en réservant des places aux groupes discriminés. Elle appuie en particulier les personnes racisées, immigrantes, autochtones ou handicapées et les femmes. Des visages plutôt rares dans les lieux de pouvoir.
« Notre objectif est de changer le portrait des décideurs à la Ville, résume Alexandra Frève, la conseillère principale en gestion des talents et cheffe responsable du projet. Pour cela, nous tentons de jumeler les aspirations des gens aux possibilités offertes par l’organisation.»
Gestionnaires sans frontières
En mars 2021, la municipalité a identifié 46 professionnels et professionnelles ambitionnant de devenir gestionnaires. La cohorte comptait 65 % de membres de minorités et 54 % de femmes. Chacun et chacune a suivi pendant 18 mois un plan de développement personnalisé. Ateliers, parcours interactifs, causeries avec des modèles… Un coach ou un mentor prodiguait des conseils, tandis qu’un forum virtuel stimulait les échanges entre collègues. Un réseau qui encourage le partage d’expertise et l’essor professionnel.
Au terme de l’expérience, 33 % des participants et participantes ont obtenu une promotion. Les autres ont retiré divers bénéfices de la démarche. « C’est ma fierté que la stratégie ait réussi à mobiliser si longtemps les participants et les gestionnaires partenaires », confie la responsable, qui a perdu seulement deux joueurs au fil du processus.
Entre autres bienfaits, l’initiative permet au personnel de signaler son intérêt à progresser dans l’organisation. Les cadres découvrent ainsi des ambitions passées inaperçues jusque-là. Cette meilleure communication déjoue en douceur les préjugés nuisibles à l’éclosion des talents. « Le programme donne de la crédibilité aux employés et aide les gestionnaires à s’entourer de profils différents. »
Une meilleure gestion des talents
En accélérant le progrès social, cette approche d’équité fondée sur la vision Montréal 2030 participe aussi à former la relève de la municipalité. D’ici 2025, le quart de ses quelque 5000 salariés et salariées devrait partir à la retraite.
Hasmik Manukyan et Alexandra Frève, les deux responsables du projet.
Les deux responsables ainsi que des participantes au projet.
Au début de 2023, Alexandra Frève et sa collègue Hasmik Manukyan lanceront une seconde cohorte. Environ 30 gestionnaires entameront un parcours favorisant l’accès à la haute direction. « La clé du succès, c’est l’accompagnement personnalisé », révèle la conseillère, qui recommande d’offrir un suivi attentionné, quitte à réduire le groupe.
L’équipe accueille avec fierté sa place en finale du prix Gestion des ressources humaines. « Une reconnaissance méritée pour la cohorte comme pour les nombreuses personnes qui l’ont appuyée », estime Alexandra Frève. Mais l’œuvre se poursuit, car la marche vers l’équité est loin d’être terminée.
Articles, vidéos et comités-conseils : dans cette organisation, tous les moyens sont bons pour valoriser la diversité du personnel et créer une culture réellement inclusive.
En place depuis octobre 2021, ces interventions font partie de la Stratégie en matière d’équité, de diversité et d’inclusion. Pour soutenir ce projet, la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) a créé un poste de conseillère et ouvert un espace informatif dans l’intranet. La mesure cherche à valoriser cinq formes de différence : ethnoculturelle, autochtone, générationnelle, d’orientation sexuelle ou de genre, ou liée à un handicap. Experte en droit du travail, l’organisation figure parmi les premières dans la fonction publique à s’être dotée d’un plan aussi exhaustif contre la discrimination.
À titre d’exemple, une série « Portraits de la diversité » présente des figures inspirantes, dont une gestionnaire d’origine haïtienne, une employée sourde et un homme qui, à 76 ans, adore toujours son travail. Diffuser le récit de collègues qui peuvent sembler un peu différents de la majorité aide à combattre les préjugés à leur endroit, tout en appuyant les gens qui partagent une réalité similaire.
« Le premier portrait de la série a été lu par 1 300 personnes, soit un quart des effectifs de notre organisation », se réjouit Laurence Desrosiers, conseillère en équité, diversité et inclusion pour l’organisme. L’organisation a aussi conçu une vidéo, où deux personnes en situation de handicap témoignent de leur expérience. Disponible pour l’ensemble de la fonction publique, la formation suggère des manières d’agir afin de constituer un milieu bienveillant envers tout le monde.
Une équité qu’on peut mesurer
En mai dernier, un comité regroupant environ 50 membres des minorités visibles et ethniques a vu le jour pour participer aux réflexions de la direction. Refléter la diversité de la société actuelle s’impose en effet pour devenir un employeur de choix.
« Plusieurs personnes ont attiré notre attention sur l’importance de sensibiliser les collègues et de former les gestionnaires à la différence, souligne Laurence Desrosiers. Inconsciemment, on a souvent tendance à sélectionner quelqu’un qui nous ressemble lors des entretiens d’embauche, par exemple.»
Janie Longuépée, étudiante en équité, diversité et inclusion, Christian Barrette, vice-président à l’administration et aux communications, Laurence Desrosiers, conseillère en équité, diversité et inclusion et Marie-Andrée Gauthier, directrice de la gestion des talents.
Annie Fortier, adjointe exécutive, Audrey Lessard, directrice générale des ressources humaines, Sylvie Rodrigue, conseillère en prévention et gestion des conflits et répondante en harcèlement au travail et Caroline Garneau, directrice du Service du développement de l’organisation et de l’analytique.
Bientôt, l’analyse statistique permettra de scruter la trajectoire de la main-d’œuvre à l’aide d’indicateurs comme les taux de recrutement et de départ. Le but : comprendre si chacun peut progresser selon son plein potentiel, sans égard à son origine, son orientation sexuelle, sa condition physique ou son âge. L’opération implique de vaincre des réticences, car certains hésitent à déclarer leur différence par peur de se faire étiqueter. La conseillère prend donc le temps d’expliquer l’importance de ces informations afin d’instaurer une culture vraiment inclusive.
Divers moyens de sensibilisation
Pour combattre l’iniquité, la Commission multiplie les occasions de sensibilisation : conférences sur des sujets comme la neurodiversité, formation sur les réalités autochtones, outils d’accompagnement pour les personnes en transition de genre et leur entourage professionnel, etc.
Fière des pas accomplis, Laurence Desrosiers considère la nomination au prix Gestion des ressources humaines comme une motivation supplémentaire à poursuivre les efforts. « La reconnaissance qui nous est offerte permet d’étendre notre discussion au-delà des frontières de notre organisation pour contribuer à un mouvement plus grand, souligne-t-elle. Nous pourrions inspirer d’autres milieux de travail à faire évoluer leurs pratiques! »
Faire tomber les barrières hiérarchiques pour que tout le monde chemine ensemble, voilà la méthode gagnante de Maxime Boissonneault pour dynamiser les municipalités.
Quand Maxime Boissonneault a été nommé directeur général d’une municipalité pour la première fois, la trésorière de l’endroit avait alors le double de son âge… en années d’expérience! C’était en mai 2015, à Saint-Stanislas-de-Kostka, son patelin d’origine. Il devenait à 23 ans le plus jeune détenteur du titre au Québec. Depuis, le trentenaire a gouverné deux autres villes : Dunham, de juin 2021 à août 2022, et maintenant Rigaud.
Son nom circule beaucoup dans le milieu municipal, où il cumule les succès et les éloges. Prendre sous son aile des structures mal en point, en tirer le meilleur pour ficeler des améliorations qui perdurent, obtenir l’adhésion enthousiaste du personnel en place, voilà ses forces. Inventif, il a le don d’ouvrir avec finesse les carcans parfois lourds de la bureaucratie pour les convertir en tremplins. Toujours dans le respect des valeurs organisationnelles et de l’éthique.
Inverser la pyramide des pouvoirs
« Mon but, c’est de revisiter la hiérarchie du monde municipal afin d’installer une plus grande collaboration entre les employés, décrit-il. Dans ma gestion participative, chaque membre possède beaucoup d’autonomie, comme un entrepreneur. En inversant la pyramide des pouvoirs, j’amène les équipes à se dépasser pour accomplir de grandes choses. »
Les employés de la Ville de Rigaud lors d’une activité en septembre 2022.Avec son équipe administrative de Dunham en 2021.
Des exemples? Sous son règne, Saint-Stanislas-de-Kostka a été désignée comme modèle d’excellence par l’Union des municipalités du Québec en 2019. Dunham, quant à elle, est devenue en 2021 la première ville québécoise à se voir décerner le sceau Concilivi, qui reconnaît la conciliation famille-travail.
Maxime Boissonneault a également reçu plusieurs honneurs, dont les mérites Positionnement stratégique 2017 et Gestion municipale 2019 remis par l’Association des directeurs municipaux du Québec. En septembre 2021, il obtenait la certification BonBoss avec une note exceptionnelle de 97 %. L’on peut comprendre pourquoi à la lecture de l’article de La Presse sur sa vision de la gestion, publié en août dernier.
« J’ai une fascination pour l’humain, confie celui qui carbure à la communication. Voir des gens heureux m’apporte une grande satisfaction. » Cela vaut tant pour les membres de son effectif que pour les citoyens de sa localité, envers qui il est fortement engagé.
Son secret tient aussi à son niveau élevé de connaissances des procédures qui encadrent le fonctionnement des villes et villages ainsi que de l’administration en général. Cet amateur de formation continue a aussi œuvré durant près d’un an comme conseiller en audit à la vice-présidence à la vérification de la Commission municipale du Québec. « J’y ai beaucoup appris sur les lois, la déontologie, des notions qui me servent tous les jours. »
Une gestion inspirée de la pédagogie
Cette carrière n’était pourtant pas tracée d’avance pour Maxime Boissonneault. Au départ, il se voyait… directeur d’école! D’où son baccalauréat en enseignement préscolaire et primaire. Il ne regrette rien. « Mon domaine compte beaucoup de similitudes avec l’éducation, estime-t-il. Accompagner les personnes, les aider au développement de leurs compétences, les amener à sortir de leur zone de confort… Cela pose des défis, quel que soit le milieu. »
Le directeur général a acquis toute une expérience depuis ses débuts. S’il arrive encore que des gens le taquinent sur sa précocité, il prend les blagues de bon cœur. « Pour ajouter à ma crédibilité, mon front commence à se dégarnir! », lance-t-il en riant.
Malgré ses réussites, être finaliste au prix Relève d’excellence le stupéfie. « Je ne m’y attendais pas », avoue Maxime Boissonneault, sans cacher sa joie. Une reconnaissance qui l’aide à confirmer que dans le monde municipal, il est vraiment à sa place. Et qu’il est là pour de bon.
Partisan d’une nouvelle révolution tranquille, Philippe Boulanger met à profit la force et la diversité de son équipe pour porter la voix des jeunes au gouvernement.
En 2010, un mentor met en garde Philippe Boulanger, qui démarre alors sa carrière. À ses yeux, la fonction publique s’apparente à l’armée, avec ses généraux et ses soldats; il faut toujours dire oui au supérieur, même quand on n’est pas d’accord. « Autant dire que je n’ai pas suivi son conseil, lance le trentenaire avec un sourire. J’ai plutôt développé le style de gestion contraire! »
N’en déplaise aux disciples de l’approche militaire, le directeur des partenariats et des opérations au Secrétariat à la jeunesse trace son chemin par le consensus. Adepte d’un environnement à la hiérarchie souple, il encourage l’équité dans son équipe. Par exemple, il invite professionnels et techniciens à travailler ensemble sur des dossiers pour qu’ils prennent conscience de leurs rôles complémentaires. Il favorise aussi la mise en place de petits groupes d’employés et employées pour analyser les demandes de subvention faites par les organismes. Une façon de rendre cette tâche plus dynamique et enrichissante.
Philippe Boulanger et son équipe.
Entendre pour mieux comprendre
Ce gestionnaire avisé tire aussi parti des préoccupations des membres de son équipe afin de mieux répondre aux besoins des associations qui sollicitent le Secrétariat. Des discussions internes l’ont ainsi convaincu de s’adapter aux réalités des organismes autochtones éloignés des grands centres urbains.
« J’ai pris conscience de la nécessité de mettre en place un accompagnement personnalisé des projets dans ces milieux. Notre programme de leadership des jeunes autochtones correspond aux besoins de ces communautés, où les moins de 35 ans représentent la moitié de la population. » Par ailleurs, des échanges avec un autre employé l’ont sensibilisé à la diversité de genre et à l’impératif d’en tenir compte dans le Plan d’action jeunesse 2021-2024.
Nicolas Cherqui, Philippe Boulanger, Annie Grand-Mourcel-Brosseau et Pascale Vachon lors de l’étude des crédits au printemps 2022.
Calme et réfléchi, ce géographe de formation prend au sérieux sa mission de défendre le bien commun. Quitte à bousculer l’ordre établi lorsqu’une situation lui semble problématique… Il a ainsi remis en question une formule d’octroi de subventions susceptible de défavoriser les organismes desservant des clientèles plus vulnérables. Avec aplomb, Philippe Boulanger a exposé au Secrétariat du Conseil du trésor les critères à adopter pour corriger cette lacune. Bien lui en a pris, puisque le gardien des deniers publics cite désormais ce formulaire en exemple aux autres ministères.
Des partenaires plus satisfaits
Cet engagement sans faille rejaillit sur l’ensemble du Secrétariat à la jeunesse. Le taux de satisfaction des partenaires financiers de l’organisme ne cesse d’augmenter depuis la nomination de Philippe Boulanger à sa tête, en 2016. Il atteint 94 % aujourd’hui.
Ce bilan positif conforte le directeur des partenariats et des opérations dans ses choix de gestion. Il tire un grand sentiment d’accomplissement (et pas mal d’adrénaline!) de sa contribution aux politiques publiques. À proximité hiérarchique du premier ministre, qui supervise personnellement le dossier jeunesse, il met tout en œuvre pour porter haut et fort la voix de la relève. « Dans la position que j’ai la chance d’occuper, je vois directement les résultats de nos demandes, note-t-il. »
En effectuant sa maîtrise en sciences de l’eau, Philippe Boulanger n’avait pas imaginé que sa carrière l’amènerait à assumer un poste de cadre dans la fonction publique. Avec le recul, il savoure la possibilité de se dépasser professionnellement, tout en gérant son rythme de travail. Une condition essentielle pour ce père de famille qui tient à mener une vie saine et équilibrée.
Sa nomination comme finaliste au prix Relève d’excellence a surpris cet homme d’action. « Je suis le gestionnaire que je suis grâce à l’équipe que j’ai, fait valoir Philippe Boulanger. Je suis un peu gêné de me retrouver sous le feu des projecteurs. Mais conscient aussi qu’il faut aussi accepter la reconnaissance quand on vous en donne! »
Adepte de la gestion à échelle humaine, Mathieu Chamberland met en valeur le savoir-faire de son équipe pour faciliter l’accès de la population aux soins de santé.
Une voiture-jouet trône sur le bureau de Mathieu Chamberland au ministère de la Santé et des Services sociaux. Un petit objet auquel incombe une grande tâche. « Même si j’adore mon poste à tête de la Direction générale adjointe des systèmes d’information, il faut aussi que je réserve du temps pour mes enfants de 9 ans et de 5 ans », confie le jeune cadre. En fin de journée, l’auto miniature lui rappelle qu’il a une vie hors du bureau.
Sa propension à garder le cap sur l’humain explique en bonne partie sa progression fulgurante. Ce gestionnaire d’exception dirige une entité gouvernementale qui entretient et fait évoluer plus d’une centaine de systèmes d’information dans le réseau de la santé et des services sociaux. Passé en quelques années de professionnel à cadre supérieur, il se consacre entièrement aux 170 personnes qui travaillent avec lui. Des gens qu’il aime à côtoyer directement, n’hésitant jamais à franchir les paliers hiérarchiques qui les séparent.
Son équipe de gestion: Éric Girard, David Dufresne, Xavier Hamel, Mathieu Chamberland,Corinne Dubé. Geneviève Renaud, Bruno Lepage. Absent sur la photo: François MailléRencontre hybride du comité des ressources informationnelles qui regroupe l’ensemble des directeurs TI du réseau de la santé et des services sociaux (environ 50 personnes)
Pour ce passionné de relations humaines, tisser des liens avec son personnel est plus qu’un vœu pieux. Au fil de discussions informelles, il prête l’oreille à leurs problèmes, dénoue avec tact les conflits de bureau, oriente même des gens vers un autre service si leur tâche ne leur convient plus. Il organise volontiers des activités sociales pour renforcer l’esprit d’équipe.
L’informatique au service de l’humain
Motivé, son personnel contribue à imaginer des solutions techniques innovantes. Les premiers bénéficiaires en sont les citoyens qui, grâce au numérique et à l’intelligence artificielle, profitent d’un accès simplifié aux soins de santé. Par exemple, le directeur a travaillé avec les équipes du Ministère sur une plateforme qui permettra aux médecins d’envoyer aux dermatologues des photos de la peau d’un patient. Le système promet de réduire le délai d’attente pour consulter ces spécialistes.
Voilà le type de réalisation qui fait vibrer Mathieu Chamberland. Depuis l’obtention de son diplôme technique en informatique de gestion, en 2004, il a toujours considéré les technologies de l’information comme un outil au service des gens.
« Ce vaste terrain de jeu révolutionne notre façon de travailler, confie le bachelier en génie logiciel. C’est vrai que le réseau de la santé accuse un retard technologique dans quelques secteurs. Toutefois, il faut se rappeler les bons coups, comme l’application VaxiCode ou la plateforme de prise de rendez-vous Clic Santé. »
Chute du taux de roulement
Les bons coups, ce sont aussi les résultats exceptionnels obtenus par ce motivateur hors pair. En ces temps de main-d’œuvre volatile, sa Direction a considérablement réduit le roulement de son personnel. Le taux se limite à 2 % depuis son entrée en poste, en février 2022, contre 15 à 25 % dans le passé!
Cette statistique prouve que prendre soin des humains a des effets tangibles sur la gestion. Elle réjouit le finaliste, lui qui considère le leadership comme un muscle à développer chaque jour. Il s’y entraîne d’ailleurs avec assiduité par des formations à l’École nationale d’administration publique et par des échanges réguliers avec ses deux mentors.
Sa nomination au prix Relève d’excellence l’a ému. « Je me suis senti choyé que mon équipe dépose ma candidature à ces prix, confie-t-il. Et très fier que ma contribution soit reconnue plus largement par la fonction publique. » Mathieu Chamberland espère poursuivre longtemps sa route de gestionnaire bienveillant. Mais à une vitesse humaine, comme le lui rappelle chaque jour sa voiture-jouet.
Depuis 2020, plus du cinquième des terres sauvages du Nord-du-Québec sont protégées. Une avancée qui doit beaucoup à l’esprit fédérateur de la biologiste Mélanie Chabot.
Enfant, Mélanie Chabot partait souvent en vélo avec des amis découvrir les couleuvres et les grenouilles du parc national du Mont-Saint-Bruno, près de Montréal. Sa petite gang avait même déniché une grotte où se réunir. « C’est l’endroit où je me sens le plus chez moi sur la planète », confie la biologiste.
Paradoxalement, ce coin de verdure de 9 km2 a fait jaillir la flamme qui la pousserait un jour à protéger plus de 39 000 km 2 de nature vierge, soit approximativement la superficie de la Belgique. Rien de moins! C’est la taille des réserves de biodiversité que la jeune femme a contribué à implanter sur le territoire d’Eeyou Istchee Baie-James, dans le Nord-du-Québec. Un exploit salué par son employeur, le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques.
Quand la chargée de projets est arrivée en poste, en 2018, le temps pressait. Ses collègues responsables de désigner des zones à préserver dans les autres régions du Québec avaient déjà entamé leurs travaux… sept ans plus tôt. La titulaire d’une maîtrise en biologie – écologie internationale a dû foncer pour atteindre l’objectif du gouvernement. Québec souhaitait en effet classer 20 % du territoire dont elle était chargée. À l’automne 2020, la cible était dépassée par 3 %!
Désormais, vingt-trois nouvelles aires protégées couvrent en partie cette courtepointe de taïgas, de toundras forestières et d’immenses rivières sauvages. Les caribous peuvent arpenter plus paisiblement l’étendue située sous le Nunavik. En plusieurs endroits, il n’est plus possible d’exploiter des mines, forer des puits de pétrole ou couper du bois à des fins commerciales.
« Ce classement, c’est vraiment un travail d’équipe », pondère Mélanie Chabot, un brin gênée de se retrouver sous les projecteurs. « Les représentants du gouvernement de la nation crie ont uni leurs forces aux nôtres. Et les experts du Ministère ont analysé les dossiers avec beaucoup de soin. » En plus de déterminer les écosystèmes les plus pertinents à protéger, il fallait réfléchir à l’impact économique d’empêcher certaines activités dans ce milieu fragile. Cela représentait un défi de concertation. En effet, plusieurs organisations régionales et provinciales se partagent la gestion de cette contrée riche en enjeux politiques et économiques. Excellente communicatrice, la chargée de projets a su dégager des consensus et rallier les parties autour d’un objectif commun.
Cette amoureuse des grands espaces a d’abord arpenté le Nunavik pendant quatre ans pour développer le réseau des parcs nationaux. En 2014, elle participe à l’évaluation environnementale des projets nordiques et miniers au Ministère. Elle se trouvait alors en contact direct avec plusieurs instances du gouvernement de la nation crie. Un poste clé pour nouer des liens avec cette société autochtone, très attachée à son milieu de vie.
« C’est vraiment au cœur de leur culture, affirme-t-elle. Des maîtres de trappe des communautés cries ont identifié des territoires exceptionnels à protéger, qui permettent de poursuivre la chasse et la pêche. »
La professionnelle demeure très investie dans cette cause. Elle siégeait au Comité consultatif pour l’environnement de la Baie-James et au Comité environnement de la Grande Alliance, le collectif qui planifie le développement de la région. Elle vient tout juste d’entrer en poste comme adjointe exécutive auprès du bureau du sous-ministre au MELCC. Une façon pour cette ancienne compétitrice en karaté de continuer à faire bouger les choses.
Mélanie Chabot n’avait pas prévu tout cela quand, à 16 ans, elle a découvert sa vocation en travaillant au parc national du Gros-Morne, à Terre-Neuve. Sa nomination au prix Relève d’excellence représente une belle surprise. « Je partage cet honneur avec mes collaborateurs », précise-t-elle, émue par les lettres d’appui à sa candidature. Mais rien ne changera jamais son idéal. « Je ressens un grand sentiment de bien-être dans la nature. J’ai envie de pouvoir le transmettre à ma fille et aux futures générations. »
Ingrid Beauregard a un don pour améliorer l’efficacité des processus. Un talent qu’elle met à profit afin de soutenir les enquêtes criminelles menées par la Sûreté du Québec.
« Maman est patronne pour la police. Elle et son équipe travaillent à attraper les criminels. » C’est ainsi qu’Ingrid Beauregard décrit le métier qui la passionne à ses fillettes de 4 et 7 ans.
Dans la version pour les grands, on dira de cette femme d’exception qu’elle dirige la Division des données biométriques à la Sûreté du Québec (SQ). Qu’elle chapeaute une quarantaine d’experts et expertes de l’identification par empreintes, traces chimiques, portraits-robots, reconstitution faciale à partir d’un crâne, et plus encore. Qu’à 35 ans, elle occupe ce poste depuis plus de deux ans déjà. Et qu’elle est la seule civile engagée à ce niveau dans les enquêtes criminelles du corps policier national, qui relève du ministère de la Sécurité publique.
Une partie de l’équipe de gestion : Capitaine Mario Roberge, responsable du Service de la Criminalistique, Ingrid Beauregard et Sergente Marie-Christine Valcourt, responsable du module de l’imagerie et des pièces à conviction.
Une partie de l’équipe de gestion : Capitaine Mario Roberge, responsable du Service de la Criminalistique, Ingrid Beauregard et Sergente Marie-Christine Valcourt, responsable du module de l’imagerie et des pièces à conviction.
Une partie de l’équipe de gestion et de recherche et développement : Christian Côté, analyste d’affaires du système biométrique, Marie-Kim Cartier-Lépine, spécialiste en empreintes, Ingrid Beauregard et Rodolfo Mojica, cadre-adjoint en coordination des activités biométriques.
C’est en 2009 que la bachelière en administration se joint à l’organisation à titre d’agente de bureau. Le domaine policier l’attire. « Je suis une justicière dans l’âme et une éternelle ambitieuse », se décrit-elle. Rapidement promue chef d’équipe, puis conseillère, elle grimpe les échelons en accéléré. Son leadership impressionne ses dirigeants. Tout comme cette force qui la caractérise : voir où agir pour bonifier les façons de faire. L’amélioration en continu n’a pas de secret pour celle qui a optimisé et restructuré toutes les activités de sa division. « Rien n’est pris dans le béton », se plaît-elle à répéter!
Alors que les réformes peuvent provoquer des conflits, Ingrid Beauregard possède le doigté pour apprivoiser les sources de résistance. « Les craintes sont normales en période transitoire. La clé est d’impliquer les gens dans les décisions. Et de reconnaître les ambassadeurs de changement qui entraîneront les autres. »
Cette cadre énergique s’assure avant tout d’une bonne ambiance de travail. « Je suis proche de mes gens. Dans l’équipe que je gouverne, il y a une sergente et un sergent, mais aussi des spécialistes en chimie, physique, médecine légale, analyse statistique et autres. Sans leur appui, je ne peux rien faire. » Ce qui l’allume au quotidien? Prendre des décisions pour aider son personnel à se développer sur les plans professionnel et humain. Elle a d’ailleurs revu la description des corps d’emploi pour favoriser les possibilités d’avancement.
Mais sa plus grande satisfaction naît de l’aboutissement des enquêtes. « La résolution des crimes, c’est prioritaire. Toute notre mission repose là-dessus. »
Ingrid Beauregard représente la SQ auprès d’organisations provinciales, nationales et internationales. Ses échanges avec diverses agences du domaine (GRC, FBI, International Association for Indentification…) lui ont permis de bâtir un réseau de contacts qui nourrit son expertise. Grâce à une récente collaboration avec l’École des sciences criminelles de l’Université de Lausanne, elle travaille à instaurer une méthode novatrice de soutien à l’identification par empreintes digitales. Une première au Canada. Les spécialistes pourront désormais reconnaître un suspect à partir d’une photo de sa main! En parallèle, elle a implanté un nouveau système biométrique de 4,5 millions $, qui décuplera l’efficacité des enquêtes.
Toutes ces réalisations n’empêchent pas la gestionnaire de continuer à se perfectionner. Et de s’impliquer dans son milieu professionnel. Vice-présidente de l’Association québécoise de criminalistique, elle représente en outre la SQ sur un comité permettant l’amélioration de la prise d’empreintes digitales partout en province.
Modeste malgré son impressionnante feuille de route, Ingrid Beauregard s’étonne de figurer parmi les finalistes du prix Relève d’excellence. « C’est très gratifiant. Je le prends comme une récolte de mes efforts des deux dernières années. » Un dévouement exceptionnel, aux dires de ses supérieurs, qui vantent sa grande disponibilité. « Mon travail n’est pas toujours facile, admet-elle. Mais je suis disciplinée, alors je trouve du temps pour l’essentiel : décrocher avec ma petite famille! »
Avec rigueur et bonne humeur, Annie Morin fournit aux équipes de recherche du CHU de Sherbrooke les meilleures conditions possibles pour mener à bien leurs projets.
Gérer les accès aux salles de cultures cellulaires. S’assurer qu’étudiants, professeurs et professionnels puissent entrer dans les laboratoires. Veiller à la distribution des bouteilles de désinfectant. Voilà quelques-unes des tâches qui sont brusquement apparues sur la liste d’Annie Morin en mars 2020. Quelques semaines plus tôt, elle avait pris le poste d’adjointe au directeur scientifique du Centre de recherche du Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke (CHUS). Sans s’imaginer, bien sûr, qu’elle devrait composer avec la plus grande crise sociosanitaire moderne!
« Avec le recul, je considère cette période comme une belle expérience. Un baptême du feu », illustre cette gestionnaire dotée de nerfs d’acier et d’un sourire à toute épreuve. Son leadership a aidé l’établissement de santé à surmonter cette phase d’incertitude par la mise en place de consignes de sécurité. En même temps, elle parvenait à piloter un programme de 200 000 dollars financé par la Fondation du CHUS pour réaliser quatre projets de recherche portant sur la COVID-19.
Curieuse de nature, cette docteure en sciences cliniques formée à l’Université de Sherbrooke manie aussi bien les concepts de recherche fondamentale que les principes de gestion collaborative. Elle devient assistante professionnelle de recherche en 2010. L’année suivante, la voilà agente de liaison pour le Consortium de recherche en oncologie clinique du Québec. Jusqu’à ce qu’une professeure lui fasse une proposition.
« Elle avait besoin d’étudiants au doctorat pour faire une recherche sur les femmes atteintes de vestibulodynie, une condition qui cause des douleurs durant les relations sexuelles. J’ai décidé de me lancer dans ce sujet », raconte Annie Morin, qui a pris un congé sans solde pour pousser sa formation. Comme elle avait déjà suivi ses cours de base, elle a terminé son essai clinique et sa thèse dans un délai record de deux ans. « L’échéancier a été serré, mais j’ai réussi ce petit tour de force avec l’appui de mes directeurs »
Cinq ans plus tard, cette professionnelle rigoureuse puise souvent dans son expérience pour comprendre les difficultés auxquelles se heurtent les chercheurs et chercheuses. Elle sait quel genre de problèmes on rencontre parfois pour recruter des volontaires. Ou encore, pour présenter leurs résultats à l’étranger et publier. « La recherche se compose de nombreuses étapes administratives, rappelle-t-elle. J’en connais plusieurs pour les avoir affrontées. » Ce qui l’aide aujourd’hui à suggérer des conseils aux spécialistes qu’elle côtoie.
Annie Morin entourée du Dr André Carpentier, directeur scientifique du Centre de recherche, et de Mme Stéphanie McMahon, directrice de la coordination de la mission universitaire au CISSS de l’Estrie – Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke.
Annie Morin a reçu le prix« Contagieux par sa bonne humeur » en 2018.
Face aux défis quotidiens, l’adjointe scientifique applique une méthode simple. Elle prend un pas de recul, examine ses priorités et passe à l’action. En acceptant de temps en temps que certaines choses, sur lesquelles elle n’a pas de pouvoir, lui échappent.
Son « système D » est peut-être né sur les rives du lac Saint-François, non loin de Thetford Mines. Là-bas, ses grands-parents tenaient une auberge-dépanneur qui donnait aussi dans la location de bateaux et l’organisation de spectacles. « Il fallait souvent se retourner sur un 10 cents, se souvient-elle, un sourire dans la voix. Par la suite, j’ai été serveuse dans un restaurant pendant 15 ans. Tout au long de mes études, je travaillais sept jours sur sept. » Chef d’équipe attentive, elle a affiné ses aptitudes au dialogue et à la mobilisation entre deux commandes de poulet. Le Conseil multidisciplinaire du CIUSSS de l’Estrie – CHUS lui a d’ailleurs attribué le prix « Contagieux par sa bonne humeur » en 2018!
Signe qu’elle carbure à la chaleur humaine, Annie Morin n’oublie pas de saluer les deux autres personnes en nomination dans la catégorie Relève d’excellence. « Je suis vraiment fière que nous soyons trois femmes finalistes, dans des domaines très différents, souligne-t-elle. Je suis aussi très touchée d’avoir l’aval du PDG de mon établissement. Cela me conforte dans mes nouvelles fonctions, même si parfois j’ai des doutes. »
Le système de justice québécois devait passer à une version 2.0. Deux expertes en gestion et en technologie ont uni leurs forces pour piloter cette transition majeure.
En mars 2020 se tient la première audience virtuelle de l’histoire du droit au Québec. Depuis son domicile, Clément Samson, juge à la Cour supérieure, instruit une cause de garde d’enfant. Les personnes impliquées se réunissent dans une salle en ligne créée par le ministère de la Justice.
« Depuis longtemps, on cherchait à moderniser nos pratiques. La pandémie a agi comme levier », explique Marjorie Forgues, sous-ministre associée des services de justice, des registres et de la transformation.
Avec sa collègue Mylène Martel, sous-ministre associée des services à l’organisation, l’avocate a implanté des solutions pour aider la justice à suivre son cours en période d’urgence – et au-delà. Une mission à laquelle contribue leur administration et la magistrature. « Par la mobilisation et l’imagination, on a pris ensemble le virage numérique », résume Me Forgues.
Mme Mylène Martel et Me Marjorie Forgues.
Les employés du Sous-ministériat des services de justice, des registres et de la transformation.
Les employés du Sous-ministériat des services à l’organisation.
Lorsque Québec ferme temporairement les palais de justice, le système s’enraye. Les salles d’audience sont closes aux juges, avocats, notaires, huissiers, témoins et prévenus. Comment entendre les causes? Les affaires touchant la protection de la jeunesse et les remises en liberté ne peuvent s’éterniser.
Pour recourir à de nouvelles technologies, il faut toutefois convaincre les responsables de 93 palais de justice et points de service au Québec. « Un défi colossal! On a surmonté beaucoup de craintes et de barrières pour changer », relate Mme Martel.
L’équipe lance donc le chantier sans attendre le plan parfait. Aussitôt, elle implante les audiences en mode virtuel ou semi-virtuel. Elle y forme plus de 1 300 personnes. Mais la formule devient victime de son succès : la plateforme gouvernementale WebRTC peine à maintenir tant de connexions simultanées. L’image se fige souvent, au désarroi des juges. En août 2020, la Cour du Québec, la Cour d’appel et la Cour supérieure passent donc à Teams. Expérience concluante!
Les audiences virtuelles se répandent dans toute la province. Accessibles par ordinateur, tablette et téléphone, elles permettent aux gens appelés en cour d’épargner de l’argent et du temps de déplacement. Un demi-million de personnes ont profité de ces séances transmises sur tribunaux.qc.ca. « C’est une avancée incroyable pour le citoyen, dont ne peut pas encore chiffrer les bénéfices », estime Mylène Martel.
À cela s’ajoute en juin le Greffe numérique judiciaire du Québec. L’outil permet de déposer électroniquement certains documents et de payer des frais associés. Grâce à une nouvelle solution d’affaires, les juges peuvent aussi signer numériquement des décisions et les transmettre sans délai en toute sécurité.
Le coût pour ouvrir les salles d’audience virtuelles? Seulement 1,4 million $, soit 0,1 % du budget du ministère de la Justice.
Ce succès pave la voie au programme Lexius. Objectif : implanter un processus judiciaire numérique complet d’ici 2025. « Le citoyen pourra consulter son dossier en ligne. Ça rendra la justice encore plus accessible, efficace et performante », décrit Me Forgues.
En lice dans la catégorie Initiatives numériques, l’équipe voit sa sélection comme un signe de confiance en l’avenir. « C’est extraordinaire ce qu’on a accompli, tant du côté humain que technologique », conclut Mylène Martel.
À Laval, un nouveau système informatique dirige les requêtes citoyennes aux endroits appropriés. Un dialogue amélioré qui accroît le taux de satisfaction de la population.
À qui dois-je signaler un nid de poule? Comment puis-je remplacer mon bac de recyclage? Où consulter l’offre en loisirs? La Ville de Laval reçoit plus de 200 000 requêtes en tout genre par année. Jusqu’à récemment, elle trouvait complexe d’y répondre. « Dédoublement des demandes, chaînes de courriels, ping-pong entre nos 23 bureaux de service : c’était les 12 travaux d’Astérix », illustre Annie Thibodeau, chef en intégration de programme.
Il était temps de révolutionner ce système, vieux de 50 ans! En 2016, une équipe d’une quinzaine de personnes, dont Mme Thibodeau, s’y est engagée. Elle a commencé par consulter le personnel de la Ville et la population.
« À la lumière des besoins exprimés, nous avons rêvé grand. Nous avons agi pour offrir un service exemplaire aux gens : des réponses rapides, justes et personnalisées, avec un suivi en temps réel. »
La Ville a opéré ce virage en se dotant d’un système informatique multiplateforme. Cet outil de gestion de la relation client lui permet de veiller sur chaque demande depuis son dépôt jusqu’à sa résolution. Ce qui fait sa force? Il comporte une variété de points de contact.
Le public peut passer par la ligne 311, le site mondossier.laval.ca, le comptoir d’accueil ou une application mobile. Les demandes sont ensuite centralisées dans un guichet unique. Un algorithme hautement performant les oriente au bon endroit, où elles sont traitées en collaboration avec tous les services de la municipalité. Plus encore, le site permet de se renseigner en temps réel sur le statut de son affaire. Il peut même envoyer des messages.
La création de ce système novateur, implanté en mars 2020, a exigé trois ans et demi d’efforts rigoureux. Environ 700 membres du personnel de la Ville ont travaillé à sa mise en œuvre. Aujourd’hui, environ 90 % des demandes sont aiguillées au bon endroit du premier coup, et les tests d’utilisation suscitent des commentaires très positifs. Seulement 1,3 % des requêtes débouchent sur une plainte, contre 5 % auparavant.
Une partie de l’équipe du projet. Première rangée, de gauche à droite : Daniel Amyot, Caroline Gascon, Suzanne Juneau, Véronique Meunier, Manuel Alfonso, Annie Thibodeau et Danny Pagé. Deuxième rangée: François Paquet, Guy J. Huneault, David Normand, Christine Lacroix, Maryse Marier, Vincent Fournier, Daniel Boucher, Jean-Christophe Pichot et Frank Louchard.
David Normand, responsable de l’amélioration des processus et Jean-François Lachappelle, alors responsable des relations avec les citoyens, en atelier de travail sur l’aiguillage des requêtes citoyennes.
La transparence dans le traitement des dossiers contribue à renforcer le lien de confiance qui unit les 442 648 citoyens et citoyennes de Laval à leur administration municipale. Les effectifs et gestionnaires de la Ville bénéficient aussi de cette avancée qui facilite le suivi des échanges avec la population. Détail inusité : un portail permet aux personnes élues de consulter les requêtes des gens qui ont consenti à rendre publique leur démarche, voire d’y ajouter une note!
Cette métamorphose attire l’attention d’autres collectivités. Entre autres, Laval a signé une entente de partage d’expertise avec la Ville de Lévis en avril 2021.
Le projet Requêtes citoyennes a remporté plusieurs distinctions, dont Excellence 2020 – Défi municipal, du Réseau de l’informatique municipale du Québec. La nomination au prix Initiatives numériques ajoute à ces honneurs. « Nous sommes emballés d’être finalistes, confie Annie Thibodeau. Cela montre bien la force de collaboration de notre équipe, à la base de ce projet dont nous sommes très fiers. »
Les personnes qui bénéficient de prestations liées aux lésions professionnelles en milieu de travail peuvent désormais gérer leur dossier sur une plateforme virtuelle. Une avancée qui sert les gens… et épargne les arbres!
La Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) a effectué tout un virage numérique. Chaque année, son effectif traitait plus de 130 000 réclamations sur papier par un système d’information datant de plusieurs décennies. En quelques mois, il a troqué la manipulation de 6 millions de pages contre l’accompagnement virtuel de la clientèle. Et sa plateforme sécurisée de services en ligne, à l’avant-garde de la technologie, gagne rapidement des adeptes.
« Au début, certains se montraient plutôt sceptiques, relate Yves Vézina, vice-président à la transformation numérique. On se demandait si les travailleurs et travailleuses qui font appel à nous allaient vraiment transiger en ligne. »
Pas question en effet d’ajouter du stress inutile à celles et à ceux qui font appel à l’organisme souvent pour des questions de santé. Les prestataires se composent essentiellement de personnes qui ont subi des lésions professionnelles, ainsi que de femmes enceintes ou qui allaitent.
Dès le début du projet, l’équipe de conception a donc consulté le public utilisateur pour élaborer Mon Espace CNESST. Des rencontres ont eu lieu avec les associations patronales et syndicales. Des sondages, des groupes de discussion, des tests ont été effectués. Un millier de personnes ont ainsi contribué à faire évoluer la plateforme, qui s’adresse aux 4 millions d’individus en emploi au Québec et aux entreprises.
Une partie de l’équipe de réalisation de Mon Espace CNESST avec, en avant-plan, les gestionnaires de la vice-présidence à la transformation numérique : M. Yves Vézina, vice-président à la transformation numérique, M. Éric Boulianne, directeur général des solutions numériques et Mme Hélène Corriveau, directrice du service des produits Travailleur.
Exit, les formulaires rédigés dans les années 1980. « Nous avons créé un parcours qui oriente les usagers par un système de questions-réponses, précise Yves Vézina. Le public a accès à des explications sur les termes spécifiques utilisés par la CNESST. Il peut aussi faire appel à un agent à n’importe quel moment de la transaction. » Cette assistance individualisée contribue à rendre le centre de services le plus convivial possible.
La plateforme numérique a vite convaincu les prestataires. En 2020, 44 % des réclamations ont été soumises en ligne, soit 9 % de plus que la cible initiale. Elle a également changé la vie de quelques centaines de membres du personnel de l’organisation. Une partie des tâches sans valeur ajoutée, comme le remboursement des frais de déplacement, s’effectue maintenant de façon automatisée, ainsi que la création de dossiers. Autant de temps dégagé pour mieux accompagner la clientèle à son retour au travail. Ou pour baisser de 25 % les délais de prise en charge d’une demande d’indemnisation.
Ce changement de technologie a mobilisé d’importantes ressources informatiques. Il fallait un système fiable pour faire transiter chaque année près de 2,3 milliards $ en prestations. Dispositif d’authentification double, messagerie sécurisée bidirectionnelle, notifications électroniques : Mon Espace CNESST présente des fonctionnalités innovantes au gouvernement du Québec, comme la Co navigation. Bientôt, il compte introduire des services touchant les normes du travail et l’équité salariale. À terme, il pourrait permettre à l’organisation d’épargner 4 millions de dollars par an.
« C’est une grande fierté pour notre équipe d’avoir créé un projet aussi mobilisant, finaliste au prix Initiatives numériques, confie Yves Vézina. Le personnel déborde d’idées pour offrir d’autres services en ligne. Les gens sont allumés! »
Une organisation montréalaise s’est livrée à un exercice de rédaction pour inspirer son personnel. Résultat : trois guides qui résument les meilleures pratiques en éducation.
La dernière mode en pédagogie, Dominic Bertrand s’en moque! Le directeur général du Centre de services scolaire Marguerite-Bourgeoys, à Montréal, recourt uniquement aux méthodes validées par la recherche. « Il y a beaucoup de mythes en éducation, déplore-t-il. Pourtant, les pratiques gagnantes sont connues depuis 30 ans. »
Depuis 2015, le spécialiste en administration scolaire teste cette approche raisonnée dans son organisation. Son réseau de 102 écoles instruit 72 000 élèves. Parmi ces jeunes, les deux tiers parlent français comme langue seconde, et le tiers vivent en milieu défavorisé. Néanmoins, ils réussissent en pros. Près de 89 % terminent leurs études secondaires – un bond de 10 % en cinq ans. Les garçons ont 10 % plus de chances de diplômer là-bas qu’ailleurs au Québec. Les enfants en difficulté, 16 %.
La recette Bertrand, décrite en entrevue à Radio-Canada? « On est aussi sérieux en éducation que d’autres le sont en médecine. On applique des pratiques pédagogiques probantes et des stratégies de gestion efficaces pour favoriser la réussite. »
Pour concerter les 11 500 membres du personnel, une vision claire s’impose. D’où ces trois guides qui vulgarisent la bonne marche d’un centre de services scolaire, d’une école et d’une classe. En 20 pages, les priorités sont déclinées en actions assorties de manifestations concrètes, avec bibliographie scientifique. Et non, ce ne sont pas des manuels du parfait employé soufflés par le patron. « Ces documents ont été construits par et pour notre personnel. » Même que le syndicat des enseignants y a contribué!
Le Centre a d’abord produit le référentiel sur la gestion d’un établissement. Les 102 directions d’école y résument leur conception de l’éducation. Elles prônent notamment la gouverne axée sur les résultats et l’approche collaborative, mais aussi le leadership pédagogique. Elles disposent d’ailleurs d’un sondage pour vérifier comment leur personnel les évalue à cet égard.
Le deuxième référentiel examine la gestion des services. Secrétariat général, ressources humaines, informatique… Comment ces départements peuvent-ils soutenir les écoles? Partisan de l’administration allégée (lean), Dominic Bertrand pourchasse la paperasse. « La bureaucratie éloigne les directions de leur mission première, l’éducation. »
Son référentiel préféré touche l’enseignement efficace. Cosigné par une quinzaine de profs, il synthétise les meilleures pratiques du domaine. En s’appuyant sur la science, le Centre a implanté des méthodes choc. Et ça marche! La « réponse à l’intervention » facilite l’accompagnement des clientèles difficiles, libérant les orthopédagogues pour les cas lourds. Et le « soutien aux comportements positifs » a aidé une école secondaire à réduire les évictions de classe motivées par la turbulence. En un an, les sanctions ont chuté de 1 600 à 100. « Ensemble, ces petits gestes décuplent la réussite des élèves », estime celui qui prône la création d’un Institut national d’excellence en éducation.
La nomination au prix Éducation ravit l’équipe. « C’est un beau cadeau pour ces gens qui ont tant travaillé à relever le taux de diplomation », sourit Dominic Bertrand. Marguerite Bourgeoys, qui a fondé la première école de Montréal en 1658, applaudirait sûrement!
Vous songez à vous joindre au conseil d’administration d’un centre de services scolaire? Une formation en ligne vous préparera à la gouvernance en milieu éducatif.
Le 15 juin 2020, les commissions scolaires francophones devenaient des centres de services scolaires. La Loi sur l’instruction publique accompagnait cette transformation d’une exigence : implanter une formation obligatoire pour habiliter dans leurs fonctions l’ensemble des membres des nouveaux conseils d’administration. Ce qui représentait 900 personnes dispersées dans 60 établissements à travers le Québec.
« Le ministère de l’Éducation a confié la réalisation de ce projet à l’École nationale d’administration publique (ENAP) dès 2019. Notre mandat était de créer le contenu et de le transmettre à temps pour la rentrée 2020 », explique la directrice adjointe des services aux organisations, Manon Dufour.
Un court délai. Qui s’est resserré avec les contraintes liées à la pandémie, en mars 2020. Pas question, cependant, de déplacer les échéanciers. Le calendrier pédagogique n’attend pas!
Plusieurs défis se présentaient à l’équipe. D’abord, comment s’assurer de couvrir les thématiques essentielles en partageant les valeurs du réseau scolaire? Enjeux éthiques, légaux, budgétaires, administratifs, éducatifs… La matière s’avérait vaste. Degré de difficulté supplémentaire : les 900 personnes à former provenaient d’horizons très divers. « Certaines n’avaient pas de notions de gouvernance, d’autres pas de connaissances du milieu. Notre contenu devait tenir compte de ces profils individuels tout en demeurant de haut niveau. »
Les responsables du projet ont donc consulté en profondeur des représentants et représentantes d’écoles ou de ministères, des spécialistes et des parents. « La pertinence du résultat est le fruit d’une grande synergie entre tous ces partenaires. Un véritable travail collaboratif. Une méthode justement enseignée dans notre formation! »
Mais comment motiver les gens à compléter chez soi ce cours de perfectionnement en ligne? En proposant une plateforme attrayante et conviviale. Ainsi, pendant 10 semaines, les participants et participantes suivent un trajet de métro qui les mène d’une station à l’autre. Chacune s’attarde à une thématique. Le contenu se complexifie graduellement. Il est livré dans une variété d’approches pédagogiques comprenant capsules, vidéos, fiches, etc.
La formation repose sur le concept de l’intelligence collective. « Elle véhicule l’idée que des gens de milieux différents peuvent apporter leur contribution à une cause par leur vision, leur bagage, leurs compétences. Au bout du compte, chaque membre sent qu’il a un rôle à jouer. »
Ajoutons que les 60 personnes qui président leur conseil d’administration ont bénéficié d’un accompagnement particulier. Entre autres, un webinaire a permis de discuter d’enjeux entre pairs. Les outils développés pour la formation demeurent disponibles en ligne au besoin.
Que retient le public cible de son expérience? Il l’évalue de façon très positive. Au point que certains centres de services scolaires souhaitent élargir la portée du parcours réalisé par l’ENAP. Des établissements universitaires, ministères et organisations veulent aussi en apprendre davantage sur l’expertise en travail collaboratif au cœur de cette initiative.
« Notre équipe a œuvré tellement fort pour accomplir cette mission, relate Manon Dufour. Évidemment, c’est l’intérêt des élèves qui nous motive au premier chef. La nomination au prix Éducation vient toutefois renforcer ce moteur. Nous attendons la finale avec des papillons dans l’estomac! »
À Montréal, un centre de services scolaire a contré la pénurie de personnel enseignant en ouvrant trois avenues audacieuses pour attirer et former une relève qualifiée.
Petit problème mathématique. Le Centre de services scolaire Marguerite-Bourgeoys recrute chaque année plus de 300 profs dans la métropole. À titre d’exemple, l’Université du Québec à Montréal en forme environ 200. Sachant cela, comment s’assurer que les jeunes puissent compter sur un nombre suffisant d’adultes pour les instruire? Réponse : en faisant preuve d’innovation.
« Nous misons beaucoup sur la qualité de l’enseignement à Marguerite-Bourgeoys, explique son directeur, Dominic Bertrand. Nos élèves se classent parmi les meilleurs au Québec, avec un taux de diplomation qui frôle les 89 %, et ce, même si 75 % d’entre eux sont issus de l’immigration Nous avons donc créé de nouvelles voies d’accès à la profession, en passant des ententes avec des partenaires. »
Ces ententes ont permis notamment de former du personnel au sein même de l’école. Avec l’Université TELUQ, le Centre a lancé en 2020 un diplôme d’études supérieures spécialisées en éducation préscolaire et enseignement primaire. Une soixantaine de titulaires d’un baccalauréat (en histoire, mathématiques, anglais, etc.) ont renforcé l’effectif tout en suivant des cours à distance. Ces professeurs et professeures novices bénéficient d’un soutien personnalisé de leurs collègues et de spécialistes en pédagogie. Leur programme marie la théorie à la pratique pour les familiariser rapidement avec la gestion d’un groupe ou les apprentissages à transmettre. Un cursus parfaitement arrimé à la réalité des écoles.
Ces ententes ont permis notamment de former du personnel au sein même de l’école. Avec l’Université TELUQ, le Centre a lancé en 2020 un diplôme d’études supérieures spécialisées en éducation préscolaire et enseignement primaire. Une soixantaine de titulaires d’un baccalauréat (en histoire, mathématiques, anglais, etc.) ont renforcé l’effectif tout en suivant des cours à distance. Ces professeurs et professeures novices bénéficient d’un soutien personnalisé de leurs collègues et de spécialistes en pédagogie. Leur programme marie la théorie à la pratique pour les familiariser rapidement avec la gestion d’un groupe ou les apprentissages à transmettre. Un cursus parfaitement arrimé à la réalité des écoles.
« Les cours de la TELUQ proposent des stratégies pédagogiques porteuses, fondées sur les dernières découvertes de la recherche. Le nouveau personnel enseignant dispose donc d’outils directement utilisables en classe », indique le cadre. Et c’est l’employeur qui assume les frais de scolarité!
Les efforts de recrutement ne s’arrêtent pas là. La direction a conclu une autre entente avec l’Université TELUQ. Cette formule permet à des enseignantes et enseignants d’origine étrangère de suivre en ligne les cours d’appoint nécessaires pour exercer leur profession au Québec. En France, pas moins de 65 personnes, déjà embauchées, ont ainsi entamé leur formation bien avant de mettre le pied ici. Le Centre a même participé à une mission économique à Paris pour attirer la relève, première démarche du genre.
Troisième réalisation : le certificat en accompagnement à l’enseignement primaire, conçu avec l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue. Le personnel employé dans les écoles, par exemple en service de garde, peut suivre à distance cette série de 10 cours. S’outiller pour intervenir en classe leur donne accès à des mandats de suppléance. L’expertise développée par le Service des ressources éducatives du Centre se déploie au-delà de cette organisation, pour soutenir et inspirer toute la communauté éducative québécoise.
Grâce à ces partenariats avec la communauté éducative, le Centre de services scolaire Marguerite-Bourgeoys peut servir une clientèle en pleine explosion. Avant la pandémie, de 1 500 à 1 800 élèves, provenant souvent de l’étranger, s’ajoutaient chaque été aux quelque 71 000 déjà inscrits. Un peu comme si 15 nouvelles écoles ouvraient sur un court laps de temps dans ce secteur nord de l’île de Montréal.
L’équipe accueille donc avec une immense fierté sa nomination en finale du prix Éducation. « Cela constitue une reconnaissance inestimable envers l’engagement et l’expertise de notre personnel, qui a tant à cœur la réussite des élèves », conclut Dominic Bertrand.
Un appareil mis au point dans un laboratoire de Québec révolutionne les soins aux malades en manque d’oxygène. Il peut même réduire la durée de leur séjour à l’hôpital.
De quand date la technologie utilisée dans les hôpitaux du monde entier pour donner de l’oxygène aux personnes après une anesthésie générale? Ou qui souffrent d’une insuffisance respiratoire chronique? Réponse : 1910. Incroyable, mais le débitmètre à bille n’a pas connu la moindre modernisation depuis plus d’un siècle. Pourtant, l’apport en oxygène joue un rôle clé dans la convalescence. De nombreuses études médicales soulignent d’ailleurs l’importance d’employer le dosage le plus exact possible.
L’archaïsme du système a surpris François Lellouche, médecin et chercheur à l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec – Université Laval (IUCPQ). Dès 2009, il s’est attaqué au problème avec quelques étudiants réunis dans un petit laboratoire. Après plusieurs années de travail acharné, l’équipe a produit un dispositif innovant, FreeO2. Le développement de la technologie s’est poursuivi avec OxyNov. Une entreprise cofondée avec Erwan L’Her, chef du service de médecine intensive et de réanimation au Centre hospitalier régional universitaire de Brest, en France.
« L’oxygène se trouve au cœur de la pratique des soignants, rappelle François Lellouche. Pour les convaincre de changer de système, dans leur milieu relativement conservateur, il faut des données probantes. »
Dr François Lellouche, médecin et chercheur.
Dr François Maltais, pneumologue.
M. Jacques Milot, premier usager de l’appareil et participant à la recherche.
L’équipe a donc mené une quinzaine d’études au Québec, en France, aux États-Unis et en Tunisie. Les conclusions ont incité le personnel médical de l’IUCPQ à tester cette nouvelle technologie. L’appareil a d’abord servi dans des cas de pneumonie ou de maladie pulmonaire obstructive chronique, puis à partir de janvier 2021, il a été utilisé de façon systématique chez les patients atteints de la COVID-19 ne nécessitant pas de soins intensifs. Plus tard, son usage sera élargi au service des urgences.
Résultat? Les patients et patientes ont reçu exactement la dose d’oxygène requise, ce qui facilitait leur rétablissement. La durée de leur hospitalisation a été réduite de 30 à 50 %!
À la différence du débitmètre classique, réglé à la main, le FreeO2 ajuste constamment le flux d’oxygène aux besoins de la personne soignée. L’appareil dispose en effet de données de saturation captées en continu par une pince installée au bout du doigt. L’écran affiche le niveau optimal recherché ainsi que le taux mesuré. On évite ainsi de fournir trop d’oxygène, ce qui peut entraîner des complications, parfois mortelles, ou pas assez, un problème qui échappe souvent à la vigilance du personnel. Le sevrage en est également facilité, puisqu’il se déroule peu à peu.
« Certains patients ne veulent plus s’en passer, s’exclame le scientifique. Savoir en tout temps que leur utilisation d’oxygène correspond aux normes recommandées les rassure. »
Pierre-Alexandre Bouchard, professionnel de recherche, Marie-Ève Payeur et Jessica Blouin, conseillères en soins, Andrée-Anne Devost, physiothérapeute et Maxime Chabot, technicien en génie biomédical.
À l’IUCPQ, le FreeO2 fait désormais partie de la routine. Le professionnel de recherche Pierre-Alexandre Bouchard, qui coordonne le projet, a formé à ce jour plus de 350 personnes, médecins, infirmières, inhalothérapeutes et physiothérapeutes au maniement du nouvel appareil. La technologie, déjà autorisée en Europe et au Canada, pourrait s’implanter bientôt aux États-Unis. Un jour, elle pourrait même être employée à domicile.
La nomination de l’équipe parmi les finalistes du prix Santé et services sociaux ne pouvait donc mieux tomber. « La reconnaissance nous fait plaisir, souligne François Lallouche. On espère qu’elle va nous aider à faire connaître encore davantage cette réalisation. »
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Un centre intégré de santé et de services sociaux a fait le ménage dans ses dédales administratifs. Depuis, la patientèle accède aux services 30 % plus rapidement. Et tout le monde y gagne!
Quand on a besoin d’aide, on ne devrait pas avoir à suivre un parcours compliqué pour en trouver. Surtout lorsqu’il s’agit de soins de proximité. Soutien à domicile, inquiétudes médicales, violence conjugale, troubles psychologiques, difficultés adolescentes… Dans ces cas, les services de première ligne sont vitaux, mais souvent laborieux à obtenir.
« Nos usagers en avaient assez de répéter la même histoire à chaque intervenant avant d’aboutir à la bonne ressource », relate Caroline Delisle, adjointe à la directrice générale adjointe au Centre intégré de santé et de services sociaux de Laval. « Nous qui travaillons pour leur bien-être, nous nous sommes dit qu’il fallait faire quelque chose. »
Le CISSS s’est alors posé une question. À quoi ressemblerait une expérience parfaite entre ses murs? Réponse : chaque demande serait dirigée à l’endroit approprié du premier coup. Sans dédale, sans doublon, sans délai.
L’organisation s’est aussitôt attelée à cet ambitieux défi. Durant 30 mois, de janvier 2017 à décembre 2019, une équipe consacrée au projet a géré de nombreux chantiers. D’abord, elle a réuni les accès aux services de proximité. « Les demandes provenaient de 41 portes différentes : accueil, directions, guichets, programmes, groupes d’entraide, etc. Chacune avait ses façons de faire et ses formulaires. Nous les avons rassemblées en deux points d’entrée coordonnés. »
Les objectifs du projet.
Le résultat du processus allégé.
Ensuite, le collectif a développé des outils d’évaluation des requêtes. Sur la base d’algorithmes et de données harmonisées, un questionnaire cerne les besoins de l’usager ou de l’usagère afin de l’aiguiller vers le bon endroit. La personne qui sollicite un service n’a donc plus à consulter de spécialiste pour être orientée. « C’est l’ingrédient essentiel de notre métamorphose, et ce qui fait qu’elle est unique. C’est aussi ce qui a demandé la plus grande transformation dans nos manières de voir et d’agir. Mais le jeu en valait la chandelle. »
Pour instaurer ce projet novateur, l’équipe a dû former plus de 600 membres du personnel dans les programmes visés. Eux-mêmes ont dû adapter leurs pratiques sans tarder afin de le concrétiser. Ces gens s’occupent d’une multitude de personnes : jeunes, âgées, atteintes d’un handicap ou d’une déficience intellectuelle, etc.
Quant aux résultats, ils s’avèrent probants. Le délai moyen de prise en charge s’est réduit de 30 %. Le nombre d’évaluations avant le premier service médical ou psychosocial a diminué de 75 %. Et 80 % des dossiers sont acheminés au bon endroit du premier coup!
Sans compter une récolte de commentaires positifs. Dans un sondage, la patientèle a déclaré un taux de satisfaction très élevé. La nouvelle approche a fait l’objet de plusieurs présentations. Reconnue comme prometteuse par le ministère de la Santé et des Services sociaux, elle pourrait bien essaimer dans d’autres organisations du domaine.
Au CISSS de Laval, les responsables n’ont pas l’intention de s’assoir sur leurs lauriers. Pour maintenir ces bons résultats, ils comptent intégrer au processus d’autres programmes qui s’ajouteront à l’offre actuelle. Impossible désormais de faire autrement. « Une meilleure coordination, ça mobilise nos équipes, conclut Caroline Delisle. Et la nomination au prix Santé et services sociaux vient mettre des étoiles dans leurs yeux! »
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Au Québec, plus du tiers des élèves de secondaire rapportent vivre de l’anxiété. Un nouveau programme de prévention les aide à gérer leur stress avec efficacité.
Un filet de sécurité sociale. Voilà comment Richard Deschamps, PDG du Centre intégré de santé et de services sociaux de la Montérégie-Centre, décrit le programme de prévention des troubles anxieux Hors-piste. En 2018, une enquête a sondé l’équilibre psychologique de 8 690 élèves dans 14 écoles secondaires au Québec. Pas moins de 38 % reconnaissaient que l’anxiété a un impact sur leur quotidien. De 5 à 10 % nécessitaient même une intervention rapide!
« Je me rappelle un jeune au Saguenay qui avait des idéations suicidaires très fortes, se souvient le dirigeant. Il a immédiatement reçu les services appropriés au CISSS de l’endroit. On peut sauver des vies avec ce programme. »
La gestion du stress et de l’anxiété est le sujet de l’heure dans les écoles, surtout depuis la pandémie. Cependant, les troubles anxieux sont en hausse depuis au moins 10 ans, et une grande partie des enfants et adolescents en souffrant n’ont jamais reçu de soins professionnels. Aussi, dès 2017, le Centre RBC d’expertise universitaire en santé mentale de l’Université de Sherbrooke élaborait Hors-piste avec le professeur en psychoéducation Robert Pauzé. Fin 2019, le ministère de la Santé et des Services sociaux confiait au CISSS de la Montérégie-Centre le rôle de déployer l’initiative à travers le Québec.
Josée Rivard, directrice du Programme jeunesse et Richard Deschamps, président-directeur général du CISSS.
Josée Blanchette, agente de planification, programmation et recherche, Chantal Angrignon, conseillère cadre, Catherine Rousseau, technicienne en administration et Marilou Hamelin, agente de planification, programmation et recherche. Absent sur la photo : Maxime Charest-Caron, agent de planification, programmation et recherche.
Le mal-être se présente sous diverses formes. « Le stress des élèves ne se limite pas aux examens », indique le gestionnaire, un ancien travailleur social en milieu scolaire. « Certains premiers et premières de classe partent sur une dérape la fin de semaine. Leur soupape explose. C’est ça, l’anxiété de performance. »
Pour aider les jeunes à s’aider eux-mêmes, Hors-piste propose une série d’ateliers. Les ados y apprennent à mieux se connaître. Ils et elles identifient les symptômes de stress et d’anxiété, puis développent des techniques pour les gérer par la pleine conscience. Les saines habitudes de vie sont aussi au menu. Ce programme général de prévention se double d’un cursus particulier offert aux plus vulnérables.
Hors-piste ne propose pas une voie unique. C’est un catalogue de formations fondées sur les données probantes issues de la recherche à travers le monde. Chaque école, dotée de son propre personnel d’intervention, l’adapte à la réalité vécue par ses élèves. « Dans certains milieux, on met l’accent sur l’anxiété de performance; dans d’autres, sur le stress lié aux conditions socioéconomiques, note Richard Deschamps. L’essentiel, c’est d’outiller les jeunes pour qu’ils puissent gérer ça. » Le CISSS forme les gens qui animent les ateliers, issus de l’établissement scolaire ou d’un organisme communautaire local.
Selon le bilan d’implantation, le programme réduit les symptômes de troubles anxieux, comme la peur du jugement d’autrui et le perfectionnisme. Il rehausse en outre l’estime de soi. Hors-piste a déjà aidé près de 10 000 élèves au Québec. L’an prochain, il sera introduit dans environ 50 écoles de 12 régions. Traduit en anglais et adapté à la réalité des Premières Nations, il a un bel avenir devant lui.
« La reconnaissance de l’Institut d’administration publique du Québec a un rôle très mobilisateur pour notre équipe, mais aussi pour nos chercheurs associés, se réjouit Richard Deschamps. Cela nous donne une étiquette d’excellence susceptible de faciliter l’adoption du programme dans encore plus d’écoles. »
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Un programme de justice réparatrice offre des solutions de remplacement aux peines criminelles. Objectifs : accélérer le règlement des litiges et favoriser le dialogue entre victimes et contrevenants.
Un taux de réussite de 93 %, un projet-pilote terminé avec un an d’avance, des partenaires enthousiastes… Le Programme de mesures de rechange général implanté par le ministère de la Justice du Québec dépasse les attentes. Au départ, ce projet de justice réparatrice visait à réduire le long délai requis pour prononcer une sentence traditionnelle. Il aspirait aussi à moderniser le système judiciaire. En chemin, ces moyens alternatifs de dédommagement ont toutefois engendré des bénéfices imprévus.
Audrey Turmel, directrice des programmes d’adaptabilité et de justice réparatrice au Ministère, cite un cas révélateur. « À plusieurs reprises, une épicerie avait surpris une personne âgée en train de voler du fromage, raconte-t-elle. On a constaté que cette personne était malade et très isolée. Aujourd’hui, elle fait du bénévolat dans une banque alimentaire, ce qui lui donne accès à de la nourriture, mais lui permet aussi d’avoir une vie sociale. »
Le comité du Programme, rangée du haut : Me Audrey Turmel et Me Mélanie Vallée du MJQ, Me Amélie Levasseur du DPCP, Catherine Lapierre et Serge Charbonneau d’Équijustice. Rangée du bas : Dominique Bégin du BAVAC, Catherine Rossi de l’Université Laval, Christine Tremblay, Stéphanie Fradette et Justine Leblanc du MSP.
Réunion hebdomadaire des « Magnifiques », les intervenantes et intervenants du milieu communautaire qui déterminent et appliquent les mesure de rechange.
Cet exemple illustre le type d’interventions qui distingue ce programme hors-norme. L’initiative est entrée en vigueur à la Cour du Québec entre 2017 et 2019, à Sherbrooke, Joliette et Chicoutimi. Des organismes communautaires supervisés par le réseau Équijustice l’appliquent sur le terrain. À l’intérieur de quatre mois, ces unités spécialisées règlent des litiges liés au vol, au vandalisme ou aux coups et blessures. La participation est toujours volontaire.
L’équipe pousse les gens coupables d’un méfait à prendre conscience des conséquences de leur geste. « Parfois, il s’agit de montrer à quelqu’un le tort qu’il cause au propriétaire d’une quincaillerie en volant des outils dans le commerce qui constitue son gagne-pain », note Me Turmel.
Les mesures de réparation varient. Elles collent à la réalité des méfaits plutôt qu’aux lois. Les personnes accusées peuvent ainsi rédiger une lettre d’excuses, faire remplacer la vitre qu’ils ont brisée ou payer la franchise d’assurance d’une voiture volée. En échange, elles n’ont pas à passer par le tribunal. Et elles échappent à la stigmatisation liée à un casier judiciaire, qui complique la recherche d’un emploi ou d’un logement.
D’autre part, ceux et celles qui ont souffert d’un crime ont enfin la possibilité de s’exprimer. Un avantage majeur par rapport au système traditionnel. « Pour avoir longtemps travaillé avec les victimes, je sais qu’elles se sentent peu entendues dans les procédures habituelles, relate la directrice. Avec la justice réparatrice, elles obtiennent souvent des excuses sincères de la part des contrevenants. »
Depuis novembre 2020, le Programme de mesures de rechange général est offert dans les 36 districts judiciaires de la province. En 2020-2021, il a traité 1 781 causes avec un taux élevé de succès. Il dégage ainsi la Cour du Québec, qui gagne du temps pour juger d’affaires plus sérieuses. Il essaime maintenant dans certaines cours municipales, notamment à Montréal, Laval, Québec et Lévis.
Tout cela constitue une fierté pour Audrey Turmel et son équipe, qui se réjouissent de leur place en finale du prix Fonction publique. « C’est une vitrine incroyable pour faire valoir un programme qui fonctionne très bien, et une énorme marque de reconnaissance! »
Retraite Québec dirige des « laboratoires clients » qui optimisent la performance tout en accroissant la satisfaction du public et du personnel. Une démarche de consultation en continu qui fait des adeptes.
Qu’y a-t-il de pire qu’un client insatisfait? Un client dont les récriminations tombent dans l’oubli. À Retraite Québec, on a compris que les commentaires du public, dans tous les registres, représentent un vecteur de perfectionnement. Et qu’ils pavent la voie au succès!
Naissance d’un enfant, départ à la retraite, séparation, décès d’un parent. Les occasions de faire appel à Retraite Québec, mandataire de l’État, sont nombreuses.
« Nous accompagnons les Québécoises et les Québécois dans des étapes significatives de leur vie, tristes ou heureuses. Une approche humaine est essentielle. D’où l’importance d’être connecté à leurs besoins », indique la cheffe de service de l’innovation et de la culture client, Claude-Amélie Robitaille.
France Noël, conseillère experte en expérience client, Isabelle Merizzi, ex-vice-présidente aux services à la clientèle à Retraite Québec et Claude-Amélie Robitaille, chef du Service de l’innovation et de la culture client.
Daniel Charbonneau, vice-président des services à la clientèle, entouré de l’équipe qui a travaillé au projet, venant des directions suivantes : Direction générale de l’évolution des services à la clientèle, Direction de l’innovation et de la culture client, Direction de la statistique et de l’analyse quantitative et Direction des communications.
L’organisme mise sur un accueil hors pair depuis sa création, il y a cinq ans. En 2018, il lançait un programme pour bonifier l’expérience du public. Ainsi ont émergé les « laboratoires clients ». L’idée? Ouvrir un dialogue suivi entre Retraite Québec et ses usagers ou usagères. « Parce qu’on ne peut jamais présumer des besoins du client, nous avons décidé d’aller à sa rencontre afin qu’il nous serve de guide. » Les prestataires contribuent à perfectionner le fonctionnement de l’organisation, transmettant leurs attentes et suggérant des améliorations. Faut-il repenser les étapes d’une demande? Ajuster ou instaurer des services? Les choses évoluent ainsi par la cocréation.
Les laboratoires clients prennent la forme de groupes de discussion, d’entrevues individuelles, de tests par les utilisateurs, de sondages… L’exercice compte trois temps. Un : examiner les attentes des gens. Deux : concevoir une proposition pour les combler. Trois : vérifier le degré d’appréciation après ajustements. Un modèle inédit par son envergure.
À ce jour, 40 rendez-vous du genre ont réuni 1 300 personnes au total. Ils pouvaient viser des orientations globales ou des sujets précis, comme la refonte d’une page Web. Ils ont profité à la clientèle, dont le plus récent taux de satisfaction se chiffrait à 93 %, mais aussi à l’organisation. « Mieux connaître les clients facilite et agrémente le travail des employés. Moins on emprunte de voies non idéales pour nos usagers, plus nos pratiques sont efficaces. » Par ailleurs, le contenu des laboratoires est déposé sur le portail intranet de Retraite Québec. La section intitulée La voix du client est une mine d’or. Elle rassemble des informations tirées d’interactions diverses entre la population et le personnel. Objet des appels, raison des plaintes, profils de consultation du site Web… Croiser les données permet de saisir encore mieux les besoins des gens.
Les laboratoires clients ont généré des retombées positives qui suscitent un grand intérêt. Déjà, plusieurs organisations, publiques ou privées, ont signifié leur intérêt pour prendre ce virage. La méthode a été présentée dans de nombreuses conférences et dans le cadre de formations universitaires. Chose sûre, elle est bien instaurée à Retraite Québec.
« Que nos pairs reconnaissent le changement de culture dans lequel on s’est investis ces dernières années est une fierté, formule Claude-Amélie Robitaille. Notre nomination au prix Fonction publique, c’est la cerise sur le sundae! »
La Direction générale de la santé publique s’est retrouvée au front dès les débuts de la pandémie. Voici comment son personnel a fait face à cette inconnue nommée COVID-19.
En mars 2020, la Direction générale de la santé publique (DGSP) n’avait pas prévu devoir laisser de côté une partie de ses chantiers pour entreprendre le plus grand marathon de son existence, soit la gestion d’une crise sans précédent et au caractère imprévisible. Confinement, lavage des mains, port du masque, distanciation sociale, couvre-feu, paliers d’alerte, assouplissements… Autant de dispositions devenues le lot quotidien des quelque 200 personnes qui composent cette entité du ministère de la Santé et des Services sociaux.
Aux yeux de plusieurs, le moment charnière s’est déroulé au début de l’année 2021. « Par des mesures courageuses et un travail exemplaire de traçage des cas, on a réussi à s’en tirer. En février, le vent a tourné. Mais on a retenu notre souffle », relate Marie-Ève Bédard, sous-ministre adjointe à la Direction générale de la santé publique, qu’elle dirige avec son collègue Dr Horacio Arruda.
Au plus fort de la crise, d’autres ministères envoient des effectifs en renfort, qu’on doit intégrer en mode télétravail. La pandémie frappe tous ces gens doublement, dans leur intimité comme dans leur carrière. Leur service peut s’étendre de tôt le matin à tard le soir, weekend inclus.
De concert avec le réseau de la santé, l’équipe publie le rapport quotidien sur les infections, hospitalisations et décès. Elle implante de nouveaux mécanismes pour obtenir des données précises en temps réel. Elle soutient la production de tableaux de bord lisibles, y verse des informations stratégiques et interprète les projections pour mieux planifier les soins et mesures. Elle élabore l’outil d’autoévaluation des symptômes de la COVID-19. Elle peaufine le dispositif d’enquête épidémiologique qui recense les personnes atteintes et leurs contacts. Enfin, elle répond à plus de 8 000 requêtes des médias!
Les équipes de la Direction générale adjointe de la protection, à l’œuvre, lors des premières conférences de presse portant sur la COVID-19 en mars 2020.
L’équipe en Épidémiologie de la Direction de la vigie sanitaire à l’automne 2020 – De gauche à droite et de haut en bas : Eliel Brochu, Ronaldo Candido, Andrea Bilodeau (au centre), Annick Des Cormiers et Sophie Bonneville.
La Direction de la prévention et du contrôle des maladies infectieuses qui produit, entre autres, des outils d’intervention pour la gestion des cas et des contacts, la prévention et le contrôle des infections.
Wilhelm Dubuisson, conseiller en dépistage à l’époque, en train de travailler sur une mise à jour de l’outil d’auto évaluation des symptômes de la COVID-19, selon les orientations de la DGSP et les avis de l’INSPQ.
Annie Motard Bélanger, Catherine Denis, Marie-Laurence Fillion et Anne-Marie Langlois de la Direction du développement, de l’adaptation et de l’intégration sociale, qui ont veillé à assurer une rentrée sécuritaire pour les élèves, les tout-petits et les étudiants, avec les partenaires du MEQ, du MFA et du MES.
La Direction de la planification et du développement en santé publique, qui a réalisé plusieurs tâches pour soutenir la Direction de la vigie sanitaire et qui a contribué de façon significative à différents mandats transversaux de la DGSP.
Les résultats? Difficiles à chiffrer. « J’ignore combien de vies nos travaux ont pu sauver, mais il y en a eu. Le plan de vaccination qui priorisait l’administration d’une première dose, entre autres, a prévenu plusieurs éclosions. » Certains systèmes mis en place, comme les paliers d’alerte à quatre couleurs, pourraient aussi resservir un jour.
Certains choix s’avèrent déchirants. Ainsi, bannir temporairement les sports de groupe a nui aux saines habitudes de vie. La Direction mène de front divers projets d’intérêt public, comme des campagnes favorisant le bien-être psychologique des jeunes. « L’équilibre entre la protection et la promotion de la santé a été source de beaucoup de dilemmes. »
Et la crise perdure. Alors que déferle la quatrième vague de COVID-19, l’équipe planifie la vaccination des enfants de 5 à 11 ans.
Marie-Ève Bédard aurait préféré soumettre une autre prouesse au jury du prix Fonction publique. « On a investi dans la gestion de la pandémie tout notre talent et notre énergie, mais le bilan demeure imparfait, fait-elle avec humilité. Malheureusement, des vies humaines ont été perdues. On ne l’oubliera jamais. » La place de finaliste réconforte néanmoins l’entourage professionnel du Dr Arruda et de Marie-Eve Bédard, épuisé maisfier. « Dans l’ombre, cette vaste équipe a fait une différence. »
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Des gestionnaires de la Ville de Montréal et des spécialistes de Polytechnique Montréal ont mis au point ensemble un outil pour mieux protéger les ressources en eau potable.
Usines, voies ferrées, autoroutes… Certains décors n’ont rien de très bucolique et peuvent parfois nourrir des craintes concernant la qualité de l’eau potable. Heureusement, la Ville de Montréal veille au grain grâce à un outil simple pour repérer rapidement les zones à risque.
Le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques est bien conscient des dangers qui pèsent sur cette précieuse ressource. Pour mieux les cerner, il propose un guide aux municipalités depuis quelques années. Sauf que ce document peut manquer de précision dans un contexte urbain. De plus, en zone dense, il arrive que plusieurs instances exercent leur autorité sur l’aire de protection d’une même prise d’eau.
Voilà pourquoi la Ville de Montréal a mis au point une méthodologie plus adéquate. Elle a sollicité l’aide du Centre de recherche, de développement et de validation des technologies et procédés de traitement des eaux (CRÉDEAU) de Polytechnique Montréal. Main dans la main, les spécialistes universitaires et les fonctionnaires ont élaboré des fiches techniques claires sur ce territoire habité par 2 millions de personnes. Les documents signalent les industries ou les réseaux d’égouts installés à proximité d’un cours d’eau. Ils mentionnent aussi les lieux de stockage de produits chimiques ainsi que les grands axes de circulation. Des données importantes! D’innombrables véhicules empruntent en effet les autoroutes sur le territoire montréalais.
L’équipe du projet : Marie-Claude Besner de la Ville de Montréal, Michèle Prévost, Sarah Dorner, Natasha McQuaid et Anne-Sophie Madoux-Humery de Polytechnique Montréal.
Le canal de l’Aqueduc, un canal urbain qui prend sa source dans le fleuve Saint-Laurent et qui alimente l’usine de production d’eau potable Atwater à Montréal.
La nouvelle prise d’eau, qui alimente dorénavant l’usine par une conduite en tunnel.
« Ces fiches standardisées se partagent très bien avec d’autres municipalités. Un peu à la manière de recettes, indique Marie-Claude Besner, ingénieure en recherche et développement au Service de l’eau de la Ville de Montréal. On donne des étapes à suivre pour simplifier le plus possible la procédure et faciliter l’échange d’informations. »
L’outil aide à se repérer dans les bases de données publiques pour trouver les faits pertinents et préparer des scénarios d’analyse de risques. Par exemple, dans quel secteur du territoire les égouts débordent-ils le plus souvent? À quelle fréquence? Quel est le nombre estimé de camions à l’intérieur d’un certain bassin de drainage? Autant de renseignements utiles pour dresser une cartographie précise des contaminations potentielles.
Déjà, Montréal, Laval, Gatineau et Lévis utilisent cette méthodologie d’évaluation des risques. D’autres villes pourraient bientôt leur emboîter le pas. « Cet outil est adaptable à la réalité de chaque municipalité. Il facilite ainsi la protection des prises d’eau potable demandée par le ministère de l’Environnement », note l’ingénieure. La métropole pourra ainsi implanter des mesures de sécurité aux endroits vulnérables révélés par l’analyse.
Au bout du robinet, les citoyens et citoyennes profiteront certainement de ces mesures, qui sauvegardent l’accès à une ressource de bonne qualité. « Toutes les personnes qui ont participé à ce projet se sentent vraiment fières, conclut Marie-Claude Besner. Se retrouver parmi les finalistes pour le prix Collaboration scientifique, c’est prestigieux. »
Quand la COVID-19 a frappé le Québec, une agence gouvernementale s’est alliée à un groupe de recherche afin de générer des projections fiables pour le réseau de la santé.
Mars 2020. La COVID-19 se répand, et Québec doit implanter des moyens pour surveiller et anticiper la contagion. Combien de personnes seront infectées? Dans quelles régions? Qui sera hospitalisé, et pour quelle durée? Pour planifier les soins qui sauveront des vies, il faut répondre à d’innombrables questions.
L’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS) propose aussitôt ses services. Si l’État lui procure les données recueillies en temps réel par le réseau hospitalier, il en tirera des projections et prédictions rigoureuses pour faciliter la prise de décision. Un atout majeur en période d’incertitude.
L’innovation représente un défi. « On ne pensait pas s’embarquer pour si longtemps », confie Catherine Truchon, directrice de l’évaluation et de la pertinence des modes d’intervention en santé. Pour peaufiner son approche, l’INESSS recrute des experts en modélisation de l’Université McGill. David Buckeridge et Mathieu Maheu-Giroux partagent leur savoir avec les quelque 30 membres de l’équipe. « La mise en commun de nos idées a permis de bâtir notre avion en plein vol », lance l’administratrice, en empruntant une citation célèbre!
Quelques membres de l’équipe projet participant à une rencontre de veille scientifique.
Présentation, le 23 septembre 2020, de la méthodologie des projections aux médias. INESSS (haut de la photo) : Dr Luc Boileau, PDG et M. Mike Benigeri, directeur du Bureau des données clinico-administratives. Université McGill (bas de la photo) : Dr David Buckeridge, professeur, et M. Mathieu Maheu-Giroux, professeur adjoint, département d’épidémiologie et de biostatistique.
Exemple de rencontre hebdomadaire, qui précède les échanges avec le ministère du Conseil exécutif, pour mettre en commun les données de l’INESSS et de l’Université McGill en vue de la production des rapports de projections sur les risques d’hospitalisation et les besoins hospitaliers.
Accéder à des données de qualité en temps réel s’avère ardu. Exceptionnellement, l’équipe obtient sans délai les renseignements voulus et le soutien des responsables du réseau. Elle croise les faits (tests de COVID-19, hospitalisations, services médicaux facturés, etc.) avec des informations sociodémographiques. Puis, elle en extrait des prévisions grâce à des modèles mathématiques. Ces estimations étonnent par leur fiabilité, comme le prouve le processus de validation en continu.
« L’outil aide vraiment à mieux planifier les services à la population. C’est presque une boule de cristal. »
Chaque lundi à l’aube, l’INESSS réceptionne les données fraîches provenant du système de santé. Il procède aux premières projections, analysées en groupe. « On en distille le message, en plaçant la rigueur scientifique au service de la décision publique. » En soirée, les responsables rencontrent au ministère du Conseil exécutif la haute direction de l’État, incluant le premier ministre. Les prévisions sont raffinées, puis présentées aux PDG des établissements de santé. Le jeudi, elles paraissent sur le site de l’Institut, au bonheur des médias.
L’équipe peut prédire assez précisément le nombre d’hospitalisations par jour pour le mois à venir. Elle génère des analyses ciblées, comme les éclosions par régions ou l’impact des variants. Ces travaux aident le gouvernement à moduler les politiques pour endiguer la pandémie, mais aussi les cadres de la santé à planifier les soins sur le terrain.
Exploiter des bases de données en temps réel constitue un savoir précieux pour l’avenir. « Cette approche de modélisation pourrait soutenir le réseau dans d’autres conditions, comme des recrudescences d’influenza ou des pénuries de main-d’œuvre. Lors de la prochaine crise, on sera mieux préparés! »
Alors que l’alliance formée par l’INESSS avec l’Université McGill poursuit ses travaux, Catherine Truchon prend une minute pour savourer la nomination au prix Collaboration scientifique. « Ça met un baume sur la fatigue accumulée. Et ça prouve qu’on peut faire de belles choses quand on s’unit autour d’une visée commune. »
Chaque année, 4 000 adolescents confiés à la Direction de la protection de la jeunesse basculent du jour au lendemain dans la vie adulte. Un professeur et ses alliés cherchent à comprendre comment faciliter ce passage.
À quel âge vole-t-on de ses propres ailes? Au Canada, dans la population de 20 à 34 ans, plus d’une personne sur trois habite encore chez ses parents. Mais celles supervisées par la Direction de la protection de la jeunesse n’ont pas ce privilège. Presque toutes doivent quitter leur milieu de placement à 18 ans.
« Pour eux, c’est une injonction à l’autonomie. Pourtant, l’indépendance est de plus en plus tardive pour ceux qui bénéficient du soutien familial », note Martin Goyette, professeur à l’École nationale d’administration publique et titulaire de la Chaire de recherche sur l’Évaluation des actions publiques à l’égard des jeunes et des populations vulnérables. Un paradoxe qui illustre bien les défis que ces garçons et filles affrontent à l’aube de leur majorité.
Comment les soutenir dans cette transition? Une imposante recherche menée par le professeur Goyette apporte des réponses à cette question. Entamée en 2014, l’Étude sur le devenir des jeunes placés au Québec examine le parcours d’un millier de jeunes, du moment où ils quittent leur milieu de placement jusqu’à leurs 21 ans. Une première au Québec. Pour rassembler les connaissances et données disponibles dans l’ensemble des régions, il a fallu mobiliser de nombreux acteurs. Les 16 centres intégrés de santé et des services sociaux, responsables de la protection de la jeunesse, contribuent au projet. Plusieurs ministères et organismes communautaires aussi. Sans oublier un groupe de spécialistes hors du commun : un comité de 12 jeunes de 18 à 35 ans qui ont vécu le placement. Ces partenaires participent activement à toutes les phases de la recherche, de son élaboration jusqu’à sa diffusion.
Les membres du comité des jeunes :
Première rangée avant, de gauche à droite : Patrice Turcotte, animateur-accompagnateur, Émilie Roy, Claudine Simon, coordonnatrice et Camille Shaink. Derrière : Marcelle Partouche Gutierrez, Kevin Champoux-Duquette, Geneviève Caron, Samuel Thibault Ladouceur et Jessica Côté-Guimond.
« Leur apport est essentiel. De leur côté, ils aiment l’idée que leurs expériences passées, souvent douloureuses, soient transformées en savoirs. »
En 2018, des données préliminaires ont révélé des facteurs de risque qui appellent des changements. Ainsi, parmi les jeunes rencontrés, 25 % avaient obtenu leur diplôme d’études secondaires à 19 ans, contre 77 % de la population. Environ 39 % rapportaient des troubles de santé mentale, contre 6 % des gens en général. Enfin, 52 % avaient connu de l’instabilité résidentielle après être devenus autonomes, dont 20 % de l’itinérance.
La recherche propose aussi des projections statistiques rigoureuses qui frappent l’imaginaire. Par exemple, une analyse coûts-bénéfices prévoit qu’investir dans des mesures qui ramèneraient le taux de diplomation des jeunes placés à la moyenne du Québec rapporterait des gains de plus de 372 M $!
À sa conclusion, en 2022, l’étude offrira une base scientifique complète pour cibler leurs besoins et mieux les combler. Déjà, les riches informations recueillies à ce jour ont trouvé écho auprès d’un vaste public. Elles ont nourri des recommandations de la commission Laurent et entraîné la bonification de programmes gouvernementaux. Cette prise de conscience sert de moteur de transformation. Ici et ailleurs, car une chercheuse conduit une étude similaire en France. La comparaison pourrait faire émerger des solutions gagnantes des deux côtés de l’Atlantique.
« Notre travail se veut un plaidoyer pour que la société offre à ces jeunes les chances auxquelles ils ont droit, résume Martin Goyette. Les membres de notre comité jeunesse sont d’ailleurs emballés de savoir que le projet se retrouve finaliste au prix Collaboration scientifique! »
La Foire du livre de Francfort a élu le Canada comme invité d’honneur en 2020-2021. Une coalition d’organismes culturels a mis en œuvre tout un plan pour y promouvoir la culture québécoise.
Saviez-vous que le roman ll pleuvait des oiseaux, de Jocelyne Saucier, fait fureur en Allemagne? Cette histoire d’amour entre deux êtres perdus dans une forêt du Nord de l’Ontario s’est vendue à plus de 140 000 exemplaires sous le titre Ein Leben mehr! De 2019 à 2021, environ 100 livres québécois ont été traduits en allemand. Avant, on en comptait plutôt cinq ou six par année.
Cette vague de popularité est due en partie aux efforts de promotion du ministère de la Culture et des Communications. Avec l’aide de plusieurs organisations partenaires, dont la Société de développement des entreprises culturelles, le Conseil des arts et des lettres, l’Association nationale des éditeurs de livres du Québec et de l’Antenne du Québec à Berlin, il a permis aux romans d’ici de trouver leur public dans le monde germanophone. « Certains livres ont eu un écho incroyable, souligne Brigitte Asselin, conseillère en affaires internationales. Les auteurs québécois ont fait l’objet de 200 articles dans les médias allemands en 2020. La reconnaissance accordée à Jocelyne Saucier, entre autres, est belle à voir. »
Tout a commencé quand la Foire du livre de Francfort a sélectionné le Canada comme invité d’honneur pour 2020. Ce marché de la littérature, le plus important au monde, réunit chaque année quelque 300 000 artisans et amoureux des bouquins. Une vitrine d’exception pour les gens de plume. Le Ministère a alors élaboré un plan d’action pour y promouvoir les artistes du Québec, porteurs d’une culture unique.
Avant l’événement, l’équipe responsable a bâti des liens avec des membres du milieu de la traduction et de l’édition, avec l’expertise des attachés culturels basés à Berlin. Le but : faire connaître les œuvres d’ici. Par exemple, un atelier s’est déroulé à Montréal au printemps 2019 pour sensibiliser les traducteurs aux expressions du Québec.
« Ces gens-là sont des fans finis de la littérature québécoise, s’exclame Brigitte Asselin. Une fois rentrés en Allemagne, ils ont convaincu les éditeurs de publier plusieurs titres. Cela témoigne de la qualité et de la richesse de notre production. »
Une anthologie regroupant poèmes, essais et nouvelles de chez nous a aussi paru en allemand. Belle carte de visite pour aborder un public traditionnellement épris de lecture.
Étalage des livres québécois et canadiens à la librairie Hugendubel.Kiosque de Québec Édition.L’exposition extérieure Loop.
Pandémie oblige, la foire s’est déroulée en mode virtuel en 2020. Néanmoins, le Québec a tenu près d’une vingtaine d’activités en Allemagne du printemps à la fin de l’automne. Une grande séduction par la littérature, mais aussi par le théâtre, la danse, le cinéma et les arts visuels. Le Canada était de nouveau à l’honneur lors de l’édition 2021 qui vient tout juste de se terminer. Une trentaine d’événements ont mis en lumière des œuvres d’ici.
Marie-Elisabeth Rakel, attachée culturelle de l’Antenne du Québec à Berlin, Élisa Valentin, déléguée générale du Québec à Munich et Louise Lantagne, présidente-directrice générale de la SODEC.
La délégation du Québec à la Foire du livre de Francfort: Élisa Valentin, Louise Lantagne, Friederike Schröter, Nicole Koufou et Marie-Elisabeth Räkel de l’Antenne du Québec à Berlin et Élaine Dumont, SODEC.
Kim Thuy et Michel Jean, deux auteurs québécois, en entrevue sur scène.
Tout ce foisonnement réjouit Brigitte Asselin, ravie que l’équipe figure en finale du prix Rayonnement international. « La riche programmation littéraire et culturelle à Francfort aura permis à de nombreux artistes québécois de développer un public à l’étranger, conclut-elle. C’est une grande fierté d’avoir participé à sa coordination. »
Trois jours pour faciliter la recherche des origines en adoption internationale? Une équipe a réussi cet exploit en animant un séminaire très couru qui misait sur l’expertise du Québec.
Au Secrétariat à l’adoption internationale (SAI), l’effet se remarque. En 2017, cet organisme qui relève du ministère de la Santé et des Services sociaux recevait environ 50 requêtes de gens souhaitant renouer avec leur passé. En 2020, ce chiffre frôle les 300. « Une croissance phénoménale, constate Josée-Anne Goupil, qui était directrice générale du SAI à cette époque. Adolescents ou gens de 80 ans, nés à l’étranger ou ayant confié un enfant en adoption, curieux de leurs origines ou désireux de rencontrer leur famille… Chaque demande est unique. »
Et chacune constitue un défi. Elle doit en effet se plier à des lois et pratiques qui diffèrent d’un pays à l’autre. Heureusement, l’histoire du Québec en a fait un expert en adoption internationale.
Au tournant des années 1950, de nombreux enfants d’ici trouvent un foyer hors des frontières. Puis, à partir des années 1970, des Québécois et Québécoises commencent à former des familles avec des petits venus d’ailleurs. À ce jour, 40 000 personnes ont vécu ce passage entre le Québec et un autre État.
« Depuis longtemps, on travaillait à consolider cette expertise. Soit en créant des ponts entre nos acteurs de l’adoption, soit en positionnant le Québec comme leader mondial par le partage des connaissances. L’essor des demandes a rendu plus urgent de poser un geste concret pour y arriver. »
Ainsi prend forme le Séminaire international sur la recherche des origines, premier du genre au Québec. Du 27 au 29 mai 2019, 200 congressistes de 33 États se réunissent à Montréal. Ils et elles travaillent pour des gouvernements, des institutions du savoir, des organismes d’adoption ou de retrouvailles… Parents adoptifs et enfants adoptés y assistent aussi. Au programme : bonnes pratiques législatives, collecte d’informations, avancées scientifiques, parcours humains et accompagnement.
Magda Cristallin, technicienne en administration, Johanne François, agente de liaison et Maamar Ghida, conseiller en processus organisationnel.
Maria Klironomos, Marie-Lyne Bergeron et Adelkys Bauza, conseillères en recherche des origines. Employés et bénévoles lors du séminaire.
L’événement, qui enregistre un haut taux de satisfaction, contribue à souder les partenaires autour d’une démarche commune. Il souligne notamment le rôle clé de l’État en matière d’adoption. « Chez nous, la Cour a accepté à l’unanimité de modifier la loi. Cette reconnaissance a fait une grande différence », rappelle Mme Goupil.
Pour le SAI, le séminaire n’était pas tant un but qu’un commencement. « Par nos valeurs de partage, nous continuons d’inspirer la communauté d’adoption internationale, estime Geneviève Poirier, l’actuelle directrice générale. Nous pouvons ainsi mieux aider les gens qui font appel à nous pour franchir une étape fondamentale de leur vie. La fierté d’être finalistes au prix Rayonnement international nous porte sur cette lancée. »
Atténuer les effets des changements climatiques en luttant contre la pauvreté : c’est le pari relevé par une équipe du ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC).
Au Burkina Faso, des maçons produisent des briques de terre crue séchées au soleil pour ériger des bâtiments. Ce mode de construction ancestral, appelé « voûte nubienne », coûte peu cher. Il donne des habitations bien moins chaudes que les abris recouverts de tôle et en béton bâtis ces dernières décennies. Et il ne requiert pas de matériaux dont la fabrication ou le transport favorisent les gaz à effet de serre.
Des initiatives du genre, le MELCC en appuie beaucoup. Son Programme de coopération climatique internationale a soutenu 37 projets entre 2016 et 2020. Les organismes partenaires de 12 pays francophones ont profité de subventions totalisant 27 millions $. Un nouvel appel à projets est prévu en 2022.
Maçon participant au projet « Construire autrement avec la Voûte Nubienne : pour des bâtiments bas carbone adaptés et une économie verte (Burkina Faso) », mené par la firme de services-conseils stratégiques Unisféra.
Participants au projet « Jaden nou, se vant nou – Notre jardin, notre sécurité alimentaire (Haïti) », mené par le Carrefour de solidarité internationale de Sherbrooke.
Tous les pays de la planète ne sont pas égaux devant les bouleversements de la météo. Sécheresses, inondations et cyclones frappent particulièrement certaines régions vulnérables du globe, en proie à la pauvreté et à l’écart de traitement entre les sexes. Or, ces problèmes socioéconomiques réduisent la capacité à faire face aux catastrophes.
« Nous faisons face à un problème mondial, mais les solutions sont locales, résume Josée Michaud, directrice des programmes et de la mobilisation au MELCC. Voilà pourquoi ce programme tente d’abord d’identifier les enjeux avec la population. Puis, il implique celle-ci dans les projets pour favoriser leur pérennité. »
Participantes au « Projet d’amélioration de la résilience des entreprises agricoles (Bénin) », mené par la Fondation Paul Gérin-Lajoie. (Crédit photo Nicolas Montibert).Communauté lacustre de Sô-Ava, projet « Technologie de traitement biologique des eaux pour lutter contre les effets des changements climatiques : une réponse locale à un problème mondial (Bénin) », mené par l’entreprise Umalia.
En témoigne cette mesure renforçant la résilience agricole au Bénin. Pour développer des méthodes de culture moins gourmandes en eau, une équipe a révisé certains cursus agronomiques et la formation des professeurs dans des institutions techniques financées par la Fondation Paul Gérin-Lajoie. Des chercheurs de l’Université Laval ont aussi collaboré avec des entreprises locales dirigées par des diplômés béninois. De nouveaux procédés pour protéger le sol de la sécheresse sont apparus aux champs, ainsi que des variétés de plantes plus productives. Une manière d’augmenter les revenus en tenant compte des changements climatiques.
D’autres pays ont choisi de valoriser les déchets, comme la municipalité de Gonaïves, à Haïti. Biothermica Technologies, une entreprise de Montréal, a réalisé des études d’ingénierie pour récupérer des biogaz et produire de l’énergie avec des ordures collectées à domicile. La fondation de l’organisme Bioénergie Haïti contribue à préserver la nature, mais fournit aussi du travail à des personnes jusque-là au chômage.
Allier les solutions environnementales à une collaboration axée sur le développement local s’avère payant. Organisations et entreprises d’ici peuvent faire rayonner le savoir-faire du Québec tout en contribuant à former une main-d’œuvre dans les pays partenaires. Ce programme s’inscrit dans une diplomatie internationale active pour limiter les changements environnementaux et faciliter l’adaptation. Il a reçu le Prix de l’action climatique mondiale des Nations unies en 2019.
La nomination au prix Rayonnement international confirme pour l’équipe la validité de cette approche. « C’est vraiment primordial pour nous que les solutions viennent des gens directement concernés, souligne Josée Michaud. Rien ne sert d’imposer des technologies adaptées aux changements climatiques si personne ne les utilise! »
Une bonne planification et un dialogue constant avec les propriétaires de commerce ont permis d’aplanir les inconvénients liés aux travaux de réfection du Vieux-Saint-Eustache.
« C’est pas des rénovations de rue qui vont empêcher les œufs de tourner aux Bonheurs de l’œuf, non monsieur, non madame ! » Cette capsule vidéo, tirée d’une série qui met en lumière une quinzaine d’entreprises de Saint-Eustache, a eu un succès fou sur le Web. Et pour cause. Ce n’est pas tous les jours que la population a l’occasion de voir le propriétaire de la pizzeria du coin danser dans sa cuisine, ou encore, un boulanger s’adonner au air guitar version heavy métal…
Cette municipalité des Laurentides a joué la carte de l’humour pour promouvoir ses commerces locaux durant les travaux de rénovation de son centre-ville, de 2018 à 2020. Ce choix l’a bien servie. « Nous voulions absolument éviter leur fermeture pendant cette période difficile, à laquelle s’est ajoutée la pandémie, souligne Céline Falardeau, coordonnatrice aux affaires municipales de Saint-Eustache. Plusieurs ont même vu leur chiffre d’affaires augmenter. »
L’équipe de la Ville a mis le paquet pour soutenir les quelque 50 propriétaires de commerce et leurs clientèles. En amont, elle a tenu plusieurs séances de consultation afin de déterminer le calendrier idéal pour mener les travaux sur la rue principale. Elle a ainsi planifié la rénovation par tronçons répartis sur trois ans. Elle a également nommé une agente de liaison pour faciliter le dialogue entre les entreprises locales et les divers services participant au chantier, ce qui a permis de désamorcer plusieurs irritants. Par exemple, l’alimentation en eau n’était jamais coupée avant 9 h le matin dans le restaurant qui servait des petits déjeuners, même si la conduite en réfection passait devant. Et les personnes qui entraient au salon de massage recevaient un casque d’écoute pour favoriser la détente en musique quand les marteaux-piqueurs résonnaient dans la rue.
« Mettre en place des mesures d’atténuation efficaces, cela ne coûte pas forcément une fortune. Il faut surtout faire preuve de créativité, de souplesse, d’écoute, et allouer au projet les ressources nécessaires », dit Céline Falardeau.
Le pavillon des travaux.La campagne d’achat local. Le marché public sur la rue Saint-Eustache.
Mobilisée à fond, l’équipe a rivalisé d’imagination pour offrir des solutions de rechange aux entreprises perturbées. Les gens d’affaires ont disposé d’une salle polyvalente à l’écart du chantier pour tenir des réunions. Ils ont pu profiter d’un service-conseil personnalisé en matière de marketing et de commerce électronique. De plus, une campagne d’achat local a aidé à fidéliser la clientèle en faisant tirer chaque semaine un chèque cadeau de 150 $ à dépenser dans les commerces de la zone.
Aujourd’hui, Saint-Eustache se réjouit de l’embellissement de son centre historique et du dynamisme de ses commerces. Les fonctionnaires impliqués ont adoré leur expérience, qui leur vaut une nomination au prix Monde municipal.
« Le simple fait de participer à la finale de ce concours est pour nous une reconnaissance du travail accompli, indique Céline Falardeau. Et une motivation à poursuivre dans la voie de l’innovation. » Saint-Eustache a d’ailleurs reçu le prix Joseph-Beaubien 2019, soit la plus prestigieuse distinction du concours Mérite Ovation municipale, décernée par l’Union des municipalités du Québec.
La Ville de Belœil voulait offrir à sa population en plein essor un centre aquatique ultra moderne sans augmenter les taxes. Pari réussi grâce à la force du groupe.
En 2015, la polyvalente Polybel démantèle sa piscine intérieure. Cours de natation et bains libres tombent à l’eau ! La Ville de Belœil, qui louait le lieu pour assurer ces services, doit réagir. Elle vise grand avec l’idée d’un centre aquatique. Mais comment se doter d’une telle installation sans transférer la facture aux citoyennes et aux citoyens ?
« Dès le départ, nous avons misé sur le pouvoir collectif », relate Cathy Goyette, directrice des finances. D’abord, on sonde la communauté. Où construire cette infrastructure ? Quels équipements y intégrer ? La campagne de participation prend plusieurs formes : questionnaires en ligne, consultations publiques, comité. Les milieux de l’éducation, de la santé et des affaires sont appelés à s’exprimer, comme les organismes sociaux. La population aussi. Puis, on rassemble les forces. Belœil invite les municipalités voisines, Otterburn Park et Saint-Mathieu-de-Belœil, à prendre part à l’aventure.
Les gestionnaires du projet, M. Daniel Marineau, directeur des loisirs, de la culture et de la vie communautaire et Mme Julie Pelletier, chef du service des loisirs.
Les divers partenaires, dont les maires de Beloeil, Otterburn Park et Saint-Mathieu-de-Beloeil, les députés provincial et fédéral, en compagnie des gestionnaires du projet, lors de l’inauguration.
« Notre approche régionale a permis d’amortir l’emprunt tout en donnant accès au centre à un maximum de gens. Elle nous a également aidés à obtenir une importante subvention gouvernementale. » Ces partenariats publics, couplés à ceux conclus avec le secteur privé, procurent les sommes nécessaires au projet.
La Ville de Belœil empruntait pour la troisième fois ce modèle plutôt rare dans le monde municipal. Il lui avait servi auparavant à réaliser un centre des loisirs et une place publique.
À un plan financier audacieux s’ajoute une méthode hors-norme pour réaliser l’édifice : la conception-construction. « L’approche traditionnelle veut que l’on contrôle tous les détails du bâtiment final, mais pas son coût. Les dépassements sont fréquents. Ici, inversement, nous avons lancé un appel d’offres avec nos exigences de base et un budget maximal. » Pour proposer un concept adapté, entrepreneurs et professionnels usent de créativité. Les responsables du projet, eux, font preuve d’ouverture.
Le centre aquatique. Les bassins récréatifs. Les estrades, avec vue sur la piscine.
Issu de stratégies novatrices, le bâtiment étonne tout autant. Il se distingue d’abord par ses performances environnementales. La baisse attendue des coûts énergétiques atteint 1,4 million $ sur 10 ans, et celle des gaz à effets de serre, 752 tonnes de CO2 par année.
Géré par un organisme à but non lucratif spécialisé dans les équipements du genre, l’édifice accueille tout le monde en tenant compte des différences, physiques ou autres. Il comporte un vestiaire unique avec cabines individuelles. Il offre un accès universel à tous ses aménagements, incluant une rampe qui permet de gagner le bassin en fauteuil roulant. Une première au Québec. La construction a reçu la distinction À part entière de l’Office des personnes handicapées du Québec en 2020.
Ouvert au printemps 2019, le Centre aquatique Belœil connaît déjà plusieurs retombées positives. Il suscite l’enthousiasme de nombreuses villes qui souhaitent s’inspirer des pratiques ayant mené à cette réussite. Quant aux adeptes de natation ? Dès la première session de cours offerte, leurs inscriptions atteignaient huit fois les prévisions initiales. Voilà un signe qui ne ment pas. « La reconnaissance de l’IAPQ vient d’autant plus souligner les efforts de nos équipes », se réjouit Cathy Goyette.
Trois organisations ont uni leurs forces pour aider les personnes sans domicile qui se réfugient dans le métro. Une alliance qui contribue au bien-être de toute la clientèle.
M. V. « habitait » le métro de Montréal. Régulièrement, on le découvrait blotti dans un coin de station. À 80 ans passés… Un jour, des gens bienveillants l’ont abordé. Ils ont recruté un interprète vietnamien pour échanger avec lui. Ils lui ont trouvé du soutien, déniché un logement, et même fait une épicerie ! Maintenant, M. V. dort chez lui, au chaud. Loin du brouhaha des passants.
Cette histoire illustre bien l’impact de l’Équipe métro d’intervention et de concertation. L’EMIC est née à l’automne 2020 pour aider les gens en difficulté qui cherchent refuge dans le réseau de mobilité urbaine. Une initiative inédite du Service de police de la Ville de Montréal, la Société des transports de Montréal et la Société de développement social.
Robert Francis Turmel, Paul-Emmanuel Montissol et Sophie Bellemare, devant le Solidaribus. Crédit : Bernard Brault, La Presse.Crédit : Bernard Brault, La Presse.
« Le partage des expertises sur le terrain est une richesse. En échangeant nos visions, on fait la différence pour les personnes vulnérables comme pour la collectivité », lance Sophie Bellemare, l’agente responsable du projet. La policière affectionne l’action communautaire depuis son passage dans une équipe mobile vouée aux sans-abri.
Créer une patrouille mixte d’esprit humaniste pour le métro ? L’idée séduit d’emblée les trois organisations. Des épreuves s’annoncent : hausse de la population sans toit, pénurie de logements sociaux, crainte de la COVID-19… Porté par l’urgence, le projet naît en deux mois. Les partenaires rédigent une entente légale qui encadre les enjeux d’assurances et de confidentialité. Ils dénichent aussi une fourgonnette à remplir de collations et de vêtements.
La « brigade du bien » démarre fin novembre, comme le relate La Presse. Avec l’inspecteure du service de Sûreté et contrôle Anik Lavoie et l’intervenant social Paul-Emmanuel Montissol, Sophie Bellemare arpente les stations. Mission : aider les personnes itinérantes à long terme, au-delà des urgences. « Polo » tente la première approche, puis introduit ses collègues, dont l’uniforme peut s’avérer intimidant. Le trio offre son appui sans l’imposer. « On cherche à établir une relation de confiance. »
En secourant des gens en détresse, l’équipe préserve le bien-être de toute la clientèle. Ceux et celles qui se retrouvent à la rue ne posent en majorité aucun danger, mais il peut arriver que la maladie mentale ou la toxicomanie pousse à commettre des délits. La sergente détective Kathleen Goulet entre alors en action. Elle prépare le dossier pour la Cour, en recommandant une solution durable fondée sur les programmes de soutien juridique aux personnes vulnérables.
Dans les stations visitées, les plaintes ont diminué entre le printemps et la fin de 2020. Cet hiver, l’EMIC disposera d’un second véhicule et d’une équipe élargie pour patrouiller de soir et de weekend. À terme, l’approche pourrait favoriser la cohabitation sociale dans des centaines d’abribus ou de gares. À Montréal, mais aussi à Laval, Longueuil, Québec…
« Tout le monde sort gagnant de ce projet », résume avec fierté Sophie Bellemare. Peu importe à qui ira le prix Monde municipal, l’EMIC considère sa place de finaliste comme un accomplissement. Et une invitation à continuer son chemin. « On espère patrouiller ensemble encore longtemps ! »
Un centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) s’est inspiré de l’encadrement offert aux athlètes pour créer un programme de soutien au rétablissement du personnel en congé maladie. Un système totalement autofinancé.
Depuis longtemps, le chef du service de prévention et mieux-être au travail s’interrogeait sur les conditions assurant le succès d’un retour à l’emploi après la maladie. Ses recherches pointaient vers un écueil majeur : l’accès limité aux soins psychologiques.
Au printemps 2018 naissait donc PARTÉO. L’équipe – un conseiller en réadaptation, une technicienne administrative et deux ergothérapeutes – a pu appuyer une centaine de personnes l’an dernier. Avec succès. Pour un même diagnostic de nature mentale, la durée d’absence moyenne a diminué de 57 jours au CISSS. Et le programme n’a rien coûté… En effet, les économies réalisées en assurance salaire ont compensé les dépenses.
Les initiateurs du projet: Sophie Lévesque et Nathalie Rochon, ergothérapeutes, ainsi que Sébastien Duvergé, chef de service prévention et mieux-être au travail. Josianne Roch et Stéphanie Simard, agentes de gestion du personnel, et Audrey Deshaies, conseillère cadre. Une partie de l’effectif du service de santé, sécurité et mieux-être: Cathy Lévesque, chef de service, Karine McCarthy Sabourin, Luce Desjardins, Jade Provencher et Marie-Ève Morand, agentes de gestion du personnel.
« Je ne sais pas comment j’aurais fait sans ce service pour être de retour au travail après seulement deux mois d’arrêt », témoigne un usager. Ce workaholic a appris à reconnaître les premiers signes d’une crise d’anxiété et développé des stratégies pour la contrôler. Pour lui, la thérapie cognitivo-comportementale s’avère d’un grand secours.
Afin de maximiser les chances de succès des gens mis au repos, PARTÉO s’emploie rapidement à identifier tous les obstacles qui leur compliquent la vie. Faut-il dénouer une impasse familiale ? Régler un conflit avec un collègue ? Prendre en compte leur rôle de proche aidant ? Le plan de retour au travail, établi en trois ou quatre mois, fera au besoin appel à la collaboration de l’employeur et du syndicat. Car ce n’est pas tout de ramener la personne à son poste, encore doit-on lui éviter une rechute.
Dans les cas de trouble de la personnalité limite, par exemple, cette approche opère des merveilles. Tant l’employé que le gestionnaire apprennent à interpréter les symptômes d’un dysfonctionnement. Ils peuvent ainsi s’ajuster avant que la situation ne dégénère. « On a sauvé des gens qu’on allait mettre à la porte », se réjouit Sébastien Duvergé.
En matière de santé mentale, les préjugés ont la couenne dure. On stigmatise encore beaucoup les personnes atteintes. Et l’aide fait terriblement défaut. Or, les besoins augmentent à vue d’œil. Moins physique qu’autrefois mais plus cognitif, le travail sape de plus en plus les ressources nerveuses des humains. « C’est un mal dont il faut s’occuper », insiste celui qui a découvert l’importance du soutien psychologique en pratiquant du sport de haut niveau. Joueur de rugby en France, skieur au Québec, il en a lui-même testé les vertus.
L’équipe voit sa nomination au prix Gestion des ressources humaines comme un encouragement à poursuivre l’œuvre amorcée. Les besoins demeurent criants. « On manque de personnel partout, note Sébastien Duvergé. Il faut en prendre soin ! »
Pour avoir une clientèle satisfaite, il faut d’abord avoir une main-d’œuvre heureuse. C’est la vision de Retraite Québec, qui mise sur le bonheur au travail pour bonifier ses services !
Retraite Québec a épaté son personnel en mars 2021. L’organisation a invité chacun et chacune à bloquer le vendredi après-midi dans son agenda. Pour toujours ! Ainsi sont nés les « vendredis sans réunions » entre 13 h et 17 h. Depuis, chaque semaine se clôt par un moment de calme qui permet de gérer ses messages et de mieux planifier le travail à venir.
« Ce geste n’a pas renversé la Terre, mais beaucoup d’employés ont dit “wow”, relate Daniel Charbonneau, vice-président aux services à la clientèle. Ils partaient en weekend débordés par les appels et les courriels. Maintenant, ils profitent mieux de leur temps personnel et reviennent plus motivés au travail. »
Cette mesure symbolise bien la nouvelle « expérience employé » offerte par l’organisme gouvernemental. La direction cherchait à améliorer son rapport avec la clientèle. Elle a vite réalisé que pour avoir des usagers satisfaits, il faut d’abord des effectifs heureux. Attention : on parle ici d’un bonheur vérifiable sur le terrain. « L’expérience employé ne doit pas être une mode, mais une culture vécue au quotidien », estime le vétéran des ressources humaines.
Le personnel de la Direction des ressources humaines et de la Direction des communications qui a collaboré au projet.
À partir de 2018, Retraite Québec a donc pris une série de dispositions pour accroître le bien-être et la mobilisation. Elle a abonné son personnel à LifeSpeak, site qui prodigue des conseils pour surmonter les difficultés de l’existence. Elle s’est fait certifier Entreprise en santé — Élite. Quand le télétravail s’est imposé, elle a préconisé l’adoption de saines habitudes, dont la pause entre deux visioconférences. À cela s’ajoutent des initiatives carrière comme les rencontres sur les possibilités d’avancement. Ces petits pas mènent loin, assure le gestionnaire, un fervent randonneur qui s’entraîne dans les escaliers du Vieux-Québec !
L’organisation sonde aussi ses membres sur leurs attentes et besoins. « Même si on ne peut répondre à chaque demande, quand les gens se sentent écoutés, ils réagissent positivement. Mettre les employés au cœur des pratiques de gestion, ça passe par la communication. »
Résultat? À l’automne 2020, l’organisation obtenait une cote Expérience employé globale de 8,1 sur 10 — un excellent classement, surtout en pandémie. Pas moins de 96 % des salariés affirment qu’ils sont fiers de leur employeur, et 95 % que leur gestionnaire leur fait confiance. Cette ambiance positive alimente en retour la performance. L’organisation enregistre en effet un taux de satisfaction de 93 % chez ses usagers.
Le plus beau, c’est que les travailleuses et travailleurs épanouis contribuent à attirer les talents. Ils figurent d’ailleurs en vedette sur la page carrière de Retraite Québec. Des as du bouche-à-oreille : en 2020, plus du tiers des recrues avaient connu leur milieu de travail par une personne en place.
La nomination au prix Gestion des ressources humaines, Daniel Charbonneau la dédie à l’ensemble du personnel de Retraite Québec. « Je vois cette reconnaissance comme une preuve que notre projet est plus qu’une opération de marketing », réagit-il. Reste à faire vivre ces bonnes pratiques à long terme. Un défi que l’équipe accepte avec joie !
Superviser des stages nécessite temps et énergie, sans revenu supplémentaire. Un établissement de santé s’est donné pour mission de valoriser le personnel qui contribue à former la relève.
L’accueil de stagiaires fait partie du quotidien de tout établissement de santé. Au Centre intégré de santé et de services sociaux de Chaudière-Appalaches, 1 800 personnes supervisent chaque année environ 3 000 novices dans 70 disciplines. Ce qui totalise 83 000 jours de stages !
Cette étape cruciale de la formation de la relève repose sur l’engagement de membres du personnel dévoués, qui acceptent d’accomplir plus de tâches pour le même salaire. « Ils le font par passion, parce qu’ils croient au partage des savoirs, pour redonner au suivant. Ils méritent donc qu’on prenne soin d’eux », affirme Karine Dumont, conseillère-cadre au développement de la mission universitaire et instigatrice du Programme de soutien et de reconnaissance des superviseurs de stages.
Les membres du comité consultatif des superviseurs de stages, en novembre 2018. Première rangée, de gauche à droite : Janie Lapierre, Anick Audet, Marie Corriveau, Audrey Tanguay, Marie-Claude Poulin, Hélène Gagné, Nathalie Serro et Marlène Viger. Deuxième rangée : Ève Robitaille, Karine Dumont, Yannick Deblois, Valérie Alain, Audrey Labbé, Catherine Dion, Stéphanie Marcotte et Martin Guimond.
Les employés et gestionnaires de l’équipe d’enseignement de la Direction de la recherche et de l’enseignement universitaire du CISSS.
En 2018, après deux ans d’élaboration, le projet est implanté pour de bon grâce à la mobilisation d’une vaste équipe. La direction de l’organisation en a aussi fait une priorité. « Dès l’accueil des nouveaux employés, l’attention portée aux superviseurs est nommée de manière claire. »
Très structuré, le programme propose un éventail de mesures. Mois de la reconnaissance, Soirée des superviseurs, tirages de prix… Certaines visent à valoriser le personnel qui transmet son savoir à la jeunesse. D’autres cherchent plutôt à lui offrir du soutien : souplesse des horaires, ouverture à la cosupervision, achat d’équipement ou accompagnement par des collègues. D’autres encore s’attardent à la formation continue et au maintien des compétences. Une application Web conviviale, développée pour la cause, facilite la communication et la gestion des activités.
Julie Dussault, gestionnaire, et Marise-Sylvie Châtigny, superviseure de stage, gagnante d’une carte-cadeau pour son implication en supervision.Marianne Harvey, superviseure de stage, gagnante d’une carte-cadeau pour son implication en supervision.
Désormais, la totalité des revenus de stages octroyés par les maisons d’enseignement sert uniquement au mieux-être des gens qui contribuent à la supervision. « Cette pratique est novatrice car elle permet une totale reconnaissance des superviseurs. »
Dans le milieu, les réactions s’avèrent probantes. Depuis sa mise sur pied, le programme obtient un taux de satisfaction très élevé tant chez la main-d’œuvre participante que chez la population étudiante. Dans la même période, plus de 30 % des personnes embauchées au CISSS de Chaudière-Appalaches ont réalisé un stage dans l’organisation. « Ça démontre que les superviseurs sont garants de la pérennité de nos établissements. Aussi, par leurs contacts avec les jeunes, ils deviennent au fait de connaissances à la fine pointe qu’ils transmettent ensuite à leurs collègues. Des atouts précieux pour notre personnel et notre clientèle. »
Plus encore, le programme a fait de l’accueil des stagiaires une activité recherchée. Alors qu’ils étaient 935 en 2015-2016, on compte 1 965 superviseurs en 2020-2021. Signe de réussite, le programme suscite l’intérêt. Il fait l’objet de nombreuses présentations dans des colloques ou d’autres centres de santé du Québec, dont certains sont en voie d’acquérir l’application Web.
L’actuelle nomination dans la catégorie Gestion des ressources humaines constitue « une reconnaissance de haut niveau », se réjouit Karine Dumont. Malgré sa fierté, l’équipe n’en vise pas moins l’amélioration continue. « Le contexte évolue rapidement. Avec notre comité consultatif, formé de gens présents sur le terrain, nous restons à l’affût d’autres idées à venir ! »
Gérer de façon humaine et mobiliser le personnel dans des projets pour faire évoluer la métropole : c’est l’ambition de Serge Lamontagne, grand maître en administration municipale.
« Serge Lamontagne, t’es malaaade ! » Voilà ce que le directeur général de la Ville de Montréal a entendu, en 2018, lorsqu’il a annoncé son intention de faire la tournée de son organisation. Il tenait mordicus à prendre le temps de visiter le personnel des 19 arrondissements.
« Le dialogue avec les employés, c’est fondamental, a-t-il expliqué. Même dans une grande ville, il faut travailler à échelle humaine. » L’homme gère un effectif de 28 000 personnes et un budget annuel de 6 milliards $. La méthode Lamontagne pour y parvenir ? « Faire confiance au monde, et donner une vision à suivre. »
Serge Lamontagne en compagnie de diverses équipes de la Ville de Montréal lors de la tournée des employées et employés.
Mais avant tout, le dirigeant aime prendre du recul. Il a ainsi entamé son mandat par une colossale enquête. Quelque 15 000 salariés municipaux ont rempli un questionnaire sur ce qui allait bien et moins bien au travail. Chaque équipe a ensuite élaboré un plan d’action avec son cadre. « Le sondage de mobilisation a été l’expression de l’importance que j’accorde aux employés. Et la clé du succès, car les gens ont senti qu’il se passait quelque chose. »
Pour rédiger le plan stratégique Montréal 2030, même approche. Environ 12 500 citoyens ont décrit à quoi leur métropole devrait ressembler dans une décennie. Les employés aussi ont été consultés. La Ville en a tiré des priorités en matière de vie de quartier, de transport, d’habitation et de soutien aux personnes vulnérables. La démarche de consultation, première du genre à Montréal, a permis de mieux arrimer les plans et politiques en clarifiant la vision à concrétiser.
« Serge a une capacité hors du commun à transformer les organisations. Pour lui, briser les silos et couvrir tous les angles, c’est primordial », affirme Diane Bouchard, directrice générale adjointe des services institutionnels à la Ville de Montréal.
Le bachelier en activité physique et maître en administration des affaires débute en 1993 comme directeur du Service des loisirs à Amos, un secteur de proximité avec le public, ce qu’il adore. En 2005, il est nommé à la tête de l’arrondissement de Saint-Laurent, à Montréal, premier d’une série de postes à responsabilités.
C’est une crise majeure qui le propulse au sommet de son art. En janvier 2014, il accepte la mission de directeur général à la Ville de Laval. La cité se trouve alors sous tutelle de l’État à la suite d’un scandale de corruption. Ce champion de la mobilisation va redonner aux effectifs la fierté de leur travail en révisant le fonctionnement de l’organisation et en créant un bureau d’intégrité et d’éthique. « Sur 3 500 employés, certains ont dû partir, mais ce sont les 3 450 autres qui ont remis la ville en place, note-t-il. Il fallait juste leur permettre d’exprimer leur talent. » L’École nationale d’administration publique accompagne la direction dans ce chantier, objet d’une publication et lauréat de trois distinctions, dont le Prix d’excellence de l’administration publique dans la catégorie Monde municipal en 2016.
Serge Lamontagne dégage un optimisme contagieux, décrit Patrice Guay, avocat en chef de la Ville de Montréal, qui l’a suivi dans le secteur public après 20 ans en pratique privée. « C’est un modèle pour mobiliser les troupes dans un projet commun. Il faut le voir parler devant un groupe. Il est simple et sincère. »
Ses décisions, le gestionnaire les prend en pensant au futur de M. Henri. Ce grand personnage est… son petit-fils, âgé de 2 ans. L’humain demeure au cœur des actions de ce père de quatre enfants, en couple avec sa conjointe depuis bientôt quatre décennies.
En appui à la mairie, il continue de veiller à la réalisation de projets ambitieux, dont le Plan climat 2020-2030. Montréal se donne 10 ans pour réduire de 55 % ses émissions de gaz à effet de serre. Pour atteindre cette cible, la Ville mise sur les secteurs où s’étend son influence. Mobilité active et collective, électrification des transports, urbanisme…
Pour l’ensemble de ses réalisations, Serge Lamontagne reçoit le prix Hommage 2021. On le sent ému. Les 18 derniers mois ont été costauds avec la gestion de la pandémie et les autres grands défis de la métropole. « Je vois dans cette distinction une reconnaissance de ma carrière, mais aussi de tout le travail accompli dans le milieu municipal, conclut-il. C’est avec les gens qu’on réussit à changer les choses. »
De la rémunération adéquate du travail des femmes à la défense des droits des citoyens vulnérables, Marie Rinfret poursuit un inlassable combat pour la justice sociale.
Crise d’Oka, juillet 1990. Des membres de la communauté mohawk de Kanesatake bloquent une rue pour exprimer des revendications territoriales. Québec envoie un négociateur chargé de conclure une entente pour le démantèlement des barricades. À ses côtés se tient une jeune avocate, qui n’oubliera jamais l’expérience. « L’ambiance était émotive, relate Marie Rinfret. Le droit autochtone se trouvait en pleine effervescence à l’époque. Il a fallu régler une quantité de détails pour parvenir à rétablir la paix. » Au point qu’elle-même ne retrouvera son foyer qu’en septembre…
De ce baptême du feu, Marie Rinfret tire une conviction : la société doit apprendre de ses erreurs si elle souhaite s’épargner de pareils conflits. « Pour tisser des liens durables, on doit traiter les gens avec respect, empathie et ouverture, résume l’actuelle Protectrice du citoyen. Et agir ensemble dans l’intérêt du bien commun. »
La justice sociale, c’est son moteur. En 1980, elle lance sa carrière en créant une coopérative de recherche d’emploi dans un quartier déshérité de Québec. Après quelques années en pratique privée, elle choisit la fonction publique. Au Conseil du statut de la femme, elle rédige un avis sur la réalité des mères porteuses. Elle passe ensuite 12 ans au ministère de la Justice.
À partir de 2001, elle se consacre à la cause de la juste rémunération des Québécoises. Elle devient successivement secrétaire générale, commissaire, puis présidente de la Commission de l’équité salariale. L’exercice de comparaison des paies améliore la vie de milliers de travailleuses. Il encourage les employeurs à établir la valeur des tâches, notamment celles de tradition féminine, pour les rétribuer adéquatement. Il sert aussi les entreprises en les aidant à cerner leurs besoins en main-d’œuvre, précise l’administratrice agréée, qui donnera maintes conférences à ce sujet.
« Mon intérêt pour la reconnaissance du travail des femmes est né de l’expérience. À mes débuts en droit, il arrivait que des collègues m’appellent madame plutôt que maître devant la clientèle. » Son appui à la relève féminine lui vaudra le Mérite Christine-Tourigny, décerné par le Barreau du Québec.
Louise Harel, qui était ministre d’État de l’Emploi et de la Solidarité, ministre de la Sécurité du revenu et ministre responsable de la Condition féminine en 1996 ainsi que Dominique Vien, ministre du Travail, en compagnie de Manuelle Oudar et de Marie Rinfret, lors des célébrations entourant les 20 ans de la Loi sur l’équité salariale en 2016.
Marie Rinfret recevant le Mérite Christine-Tourigny.
En 2017, Marie Rinfret est nommée Protectrice du citoyen, choix entériné par les deux tiers de l’Assemblée nationale. Sa mission : appuyer l’administration publique québécoise dans ses efforts pour offrir des services adaptés à tous et à toutes. « Un défi constant, convient-elle. Il faut être à l’écoute des autres pour bien saisir leurs enjeux. »
Plus de 40 ans après Oka, la situation des personnes d’ascendance autochtone la préoccupe toujours. « Pendant longtemps, on n’a pas pris en considération la réalité de ces gens. Je ne suis pas dans le discours politique quand je vous dis qu’on a besoin d’une évaluation et d’une reddition de compte à ce sujet ! » Elle a embauché une ressource issue des Premières Nations pour mieux joindre ces communautés. Actuellement, elle implante un comité consultatif formé de gens appartenant à ces peuples et d’organismes alliés. La Protectrice du citoyen publiera un rapport sur le sujet, elle qui veille à la mise en œuvre des recommandations de la commission Viens.
Manuelle Oudar, chef de la direction à la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail, ne tarit pas d’éloges pour son amie de longue date. « Le sentiment de justice vit en elle depuis qu’elle est toute jeune. Son humanité, sa détermination et son audace méritent d’être soulignées. »
Hélène Vallières, vice-protectrice Affaires institutionnelles et prévention au Protecteur du citoyen souligne de son côté les qualités de gestionnaire de la lauréate : « Elle incarne un mode de gestion inclusif, qui favorise la collaboration et la recherche de solutions concrètes. »
Quand on demande à la lauréate son principal motif de fierté, elle n’hésite pas. « Ma plus grande contribution à la société, je l’ai faite avec mon chum », sourit cette maman de trois adultes accomplis, aussi grand-mère.
Touchée de recevoir le prix Hommage 2021, Marie Rinfret salue tous ceux et celles qui ont croisé sa route. « J’ai eu beaucoup d’opportunités dans ma vie, remarque-t-elle avec gratitude. Je ne pense pas en avoir jamais refusé une. » Son conseil à la relève ? Suivre son propre chemin avec confiance. « Quand on va vers l’inconnu, il faut accepter qu’on n’ait pas toutes les réponses. Pas grave. On les trouvera avec l’aide des autres. »